"Remettre à l'emploi un tiers des allocataires du RSA"
Le Conseil départemental s'attaque à la question du RSA et fait de l'insertion professionnelle l'une des priorités du mandat. À la tête du Nord depuis maintenant neuf mois, Jean-René Lecerf a dévoilé les grandes orientations stratégiques.
“Nous dépassons les 150 000 foyers allocataires du RSA, ce qui signifie que dans certains arrondissements on atteint presque 15% des personnes. Nous sommes dans une situation assez grave, nous adoptons donc un dispositif exceptionnel“, martèle Olivier Henno, vice-président du Conseil départemental en charge de l’insertion. En effet, avec une hausse de 8% d’allocataires du RSA entre l’exercice 2014 et celui de 2015, la situation semble préoccupante pour un Département qui a décidé, en 2015, d’allouer 660 millions d’euros au RSA. Et l’inquiétude quant au positionnement de l’État persiste : “Si l’État ne bouge pas d’un centimètre sur le RSA, on ne pourra pas s’en sortir“, résume Christian Poiret, premier vice-président en charge des finances, du contrôle de gestion et de l’administration générale. Mais le Conseil départemental assure qu’il n’attendra pas les décisions des acteurs extérieurs “pour bouger les lignes“. Ainsi, une série d’orientations stratégiques et innovantes ont été définies au cours des derniers mois.
Plates-formes de retour à l’emploi. Pour permettre à un tiers des allocataires du RSA de revenir à l’emploi (70% sont sous la responsabilité de Pôle emploi, ndlr), le Département s’engage à créer huit plates-formes de retour à l’emploi sur le territoire du Nord. Seront regroupées dans ces structures des acteurs clés (CGPME, Medef, Pôle emploi, Chambre de commerce, Chambre des métiers, etc.), une “mobilisation exceptionnelle” selon Olivier Henno. Pour chaque plate-forme, “des objectifs de retour à l’emploi seront fixés selon le territoire en question“. Le but ? Rapprocher le demandeur d’emploi de l’offre d’emploi par un circuit court et grâce à des partenaires économiques du territoire impliqués dans ce dispositif. “Ces initiatives sont en complémentarité avec le monde de l’entreprise, le monde associatif, ainsi que les travailleurs sociaux” résume Jean-René Lecerf, président du Conseil départemental, qui regrette notamment que très peu de crédits formation en France “soient orientés vers les demandeurs d’emploi (15%) et quasiment rien vers les allocataires du RSA“.
Privilégier la médiation. “En mettant tous les acteurs autour de la table, nous ferons en sorte que des personnes accèdent immédiatement à l’emploi“, affirme Olivier Henno. Facile à dire mais plus compliqué à faire ? Le dispositif a déjà été expérimenté à Caudry (dans le Cambrésis), où on a demandé à des allocataires du RSA de réfléchir sur leurs projets professionnels. “À partir de là, la présence de la Chambre des métiers et des organismes de formation agit pour faire en sorte que ces personnes accèdent tout de suite à l’emploi“, résume Olivier Henno.
Généralisation de la clause d’insertion. L’une des grandes orientations consiste également à généraliser la clause d’insertion sociale à toute une série d’autres types de métiers, y compris les métiers féminins par exemple. Ainsi, le Département mène un travail sur le long terme avec les entreprises, notamment dans le secteur du BTP. Les espoirs reposent aussi en grande partie sur le projet du canal Seine-Nord Europe (dont l’ouverture est prévue en 2017, ndlr) qui “contribuera à la création de milliers d’emplois” selon Christian Poiret.
Lutter contre la fraude. Alors que le département du Nord a pour objectif de réaliser 100 millions d’économies sur l’exercice 2016, il entend récupérer 200 millions du RSA. En appliquant forcément une politique d’insertion professionnelle (expliquée ci-dessus) mais également en luttant contre la fraude au RSA. “C’est environ 10 millions d’euros qui sont récupérés chaque année en s’attaquant à la fraude“, martèle Jean-René Lecerf. Pour aller plus loin dans la “traque” des fraudeurs, le Département a instauré un système de données qui permet de croiser les fichiers bancaires et de repérer ainsi les fraudeurs grâce à une étroite collaboration avec la CAF.
ENCADRE : Le Département est confronté à une situation financière préoccupante
À son arrivée le 2 avril dernier, Jean-René Lecerf déplorait une situation financière critique : une épargne brute divisée par deux depuis 2011 “134 millions d’euros en 2014, 117 en 2013, 198 en 2012, 262 en 2011…” , une faible progression des recettes, des dotations de l’État en baisse et des économies drastiques à réaliser. Neuf mois plus tard, le Département poursuit le redressement de ses comptes, et croit en ses nombreuses mesures pour changer la donne et faire s’envoler la menace de mise sous tutelle…