Remède à la déprime ambiante, les vacances ont la cote
En 2016, les Français n’ont pas renoncé à partir en vacances. Par ailleurs, leurs pratiques évoluent fortement, liées au boom de l’utilisation des smartphones dans la préparation des voyages, d’après une étude du cabinet Raffour.
Face à une actualité déprimante, en 2016 les Français n’ont pas renoncé à partir en vacances, bien au contraire. Dans le même temps, leurs pratiques ont nettement évolué avec la diffusion des outils numériques mobiles. Tel est le bilan de l’année touristique 2016, issu de la 15e édition du baromètre Opodo, réalisée par le cabinet Raffour Interactif et présentée le 14 mars à Paris. L’enquête a été réalisée en janvier et février, par téléphone, auprès de 1 010 individus de 15 ans et plus, représentatifs de la population française.
Premier constat, donc : en dépit d’une actualité morose, faite d’attentats, de grèves et de soubresauts géopolitiques, en 2016 les Français n’ont pas renoncé à partir en vacances. En fait, c’est tout l’inverse, explique Guy Raffour, fondateur du cabinet éponyme. Partir est vu comme un “besoin vital. (…) La soupape des vacances existe encore plus qu’avant”, précise-t-il. Au total, le nombre de Français s’évadant pour un séjour de loisirs, de détente ou de vacances a augmenté de trois points par rapport à 2015 : ils sont 63% à être partis en 2016. “On voit que les gens continuent de réserver. Les Français ne sont pas prêts à sacrifier leurs vacances. Ils vont aménager la durée, changer la destination, mais la tendance de fond est qu’ils continuent de partir”, confirme Quentin Bacholle, directeur général d’Opodo France, voyagiste sur Internet.
Les évolutions dans la manière de partir en vacances prennent diffé- rentes formes, constate l’étude Raffour. Tout d’abord, pas question de retourner, comme chaque année, dans la maison de campagne ou chez les amis qui habitent dans le Sud : en 2016, 21,9 millions de Français ont privilégié les longs séjours (à partir de quatre nuits) avec un hébergement marchand, une tendance en hausse de cinq points par rapport à l’année précédente. A l’inverse, ils sont 13,3 millions d’individus à avoir opté pour un long séjour avec un hébergement non marchand, une tendance en baisse de quatre points par rapport à 2015. Destination ailleurs, mais en France. A la base, “on veut changer, découvrir un nouveau lieu, une nouvelle réalité. Il y a un besoin énorme de changement”, analyse Guy Raffour. Pour autant, “les Français n’ont pas plus de moyens qu’avant”, poursuit-t-il. Résultat, ils sont nombreux à s’être concentrés sur un seul type de séjour, renon- çant à ceux brefs (de une à trois nuits) en hébergement marchand. Une tendance qui se traduit chez Opodo par une diminution des achats de billets court séjour : ils représentent 23% de la demande en 2016, contre 25% l’année précédente.
Autre évolution des pratiques, la destination choisie : en 2016, 26,7 millions de Français ont opté pour la France, soit 1,4 million de personnes de plus que l’année précédente. Cela représente 79% des départs. Les autres, soit 11,5 millions de voyageurs, ont préféré l’étranger. Et là, “les destinations changent”, constate Guy Raffour. C’est peu dire que les touristes ont fui le Sud du pourtour méditerranéen, frappé par les attentats et les perturbations politiques : en 2016, les départs vers la Turquie ont chuté de 25%, après une année 2015 déjà désastreuse pour le tourisme de ce pays. Tunisie et Egypte sont également à la peine. A contrario, les voyageurs se sont reportés sur d’autres destinations. “Des pays ont cartonné en Europe du Nord, et aussi l’Espagne, le Portugal et l’Italie”, précise Guy Raffour, qui rappelle les chiffres de Bercy : l’Europe constitue l’essentiel (80%) du tourisme français à l’étranger. Reste un important bémol à ce tableau des vacances des Français : ces derniers partent de manière très inégale, en fonction de leur catégorie sociale. 80% des catégories socioprofessionnelles supérieures (CSP+) sont allées en vacances, représentant 16% des départs. Les flux les plus importants (près de la moitié des départs) sont le fait des catégories intermédiaires, employés et ouvriers : 68% d’entre eux sont partis en vacances. Quant aux artisans et commerçants, dont 63% d’entre eux partent, ils représentent 7% des départs. Autre population importante pour les acteurs du tourisme, les retraités (un sur deux prend des vacances), qui représentent 25% des départs. Quant aux étudiants et aux inactifs, qui partent à 43%, ils ne représentent que 4% des touristes.
Le smartphone devient indispensable. Au-delà de ces évolutions liées au contexte économique et politique, les Français, toujours plus internautes – près de 47 millions d’entre eux – modifient également leurs pratiques touristiques en fonction de cet outil largement rentré dans leur vie quotidienne. Parmi ceux partis en vacances, en 2016, ils sont 26,1 millions à pré- parer leurs séjours en ligne, à partir d’un poste fixe ou mobile, soit 1,4 million de plus que l’an dernier. La croissance est très rapide : il y a sept ans, ils étaient moins de 15 millions à le faire. Pour le cabinet Raffour, de multiples motivations les conduisent à préparer leurs voyages en ligne, parmi lesquelles la recherche du meilleur rapport qualité-prix, la possibilité de consulter des sites en toute liberté, à n’importe quel moment et de pouvoir organiser soi-même son déplacement. De plus, souligne Guy Raffour, ils sont motivés par un “sentiment de proximité numérique avec les prestataires”, accentué par les réseaux sociaux, ainsi que par la recherche d’offres originales et d’expériences inédites.
Cette dernière motivation contribue à expliquer une tendance forte enregistrée par l’étude Raffour : le boom de l’utilisation d’un mobile (smarphones ou tablettes) dans la préparation des vacances. En 2016, plus de 18 millions de Français l’ont fait, soit 5,5 millions de plus que l’année d’avant. “C’est un véritable changement comportemental. (…) Et c’est en train de modifier la manière de consommer le tourisme localement”, analyse Guy Raffour, évoquant la possibilité de réserver une nuit d’hôtel supplémentaire pour prolonger son séjour ou de découvrir et réserver un spectacle et une excursion sur place.
Chez Opodo, 30% des réservations sont déjà effectuées par ce biais. Mais audelà, “c’est une nouvelle industrie du tourisme. (…) Il existe une demande croissante pour savoir ce qu’on va faire durant le séjour. Il faut proposer du contenu inspirationnel”, explique Quentin Bacholle. Exemple : fournir des guides de destination gratuits, mais aussi des services comme le fait de signaler à l’internaute le tapis de l’aéroport sur lequel vont arriver ses bagages.