Régis Thévenet : "On nous demande de retravailler mais c’est le Gouvernement lui-même qui enraye la machine"
Comme les autres corps de métier, les architectes sont touchés de plein fouet par la crise sanitaire. Le président du Conseil régional de l’ordre des architectes (Croa) Régis Thévenet revient pour Picardie La Gazette sur les principales inquiétudes et attentes de la profession.
Picardie La Gazette : Comment la profession a réagi à l’annonce du confinement ?
Régis Thévenet : Plutôt bien et vite à mon sens. Les architectes sont pour la plupart habitués à travailler en divers lieux et à distance. En quelques jours, la majorité des agences étaient actives en télétravail, avec des réunions en visioconférence, etc. Le problème aujourd’hui, c’est que nous avons beaucoup de mal à comprendre les directives du Gouvernement : on nous dit de rester confinés, mais il ne faut pas arrêter les chantiers… Non seulement on nous donne le feu vert pour retravailler, mais on nous y pousse.
“Même si l’on nous enjoint de continuer pour ne pas gripper la machine économique, de fait elle est au point mort”
C’est-à-dire ?
Nous n’avons en tant que libéraux pas droit au chômage partiel, tout du moins dans la première mouture, la Direccte refuse systématiquement les dossiers des libéraux. Nous devons donc continuer de travailler, c’est possible pour tout ce qui est conception, dessin… des tâches pour lesquelles les interactions ne sont pas nécessaires. Ce qui bloque, c’est que nous ne pouvons plus rencontrer nos maîtres d’ouvrage, nos clients concrètement, ils ne peuvent donc pas valider nos phases, et nous ne pouvons pas les facturer. Il faudrait une validation numérisée. Aujourd’hui, quasiment toute la population française est à l’arrêt, même si l’on nous enjoint de continuer pour ne pas gripper la machine économique, de fait elle est au point mort, il ne se passe plus rien sur les chantiers actuellement. Peu de chefs d’entreprise vont vouloir endosser cette responsabilité de retravailler, et les salariés n’ont pas non plus envie de se mettre en danger, ce qui est totalement légitime.
Quelles sont vos attentes ?
Il faut attendre la fin du confinement et de la pandémie. Pour l’instant, la profession peut juste avancer sur les études de chantier. Ce qui permettra quand l’activité redémarrera d’avoir déjà bien avancé sur les dossiers, et les entreprises du BTP pourront elles aussi reprendre plus rapidement. Nous avons demandé que les permis de construire puissent continuer d’être reçus et instruits, mais le Gouvernement par voie d’ordonnance n’a pas jugé cette demande prioritaire… et annoncé que les permis ne seraient pas étudiés avant le 25 juin. On nous demande de retravailler mais c’est le Gouvernement lui-même qui enraye la machine !