Etude de l'Observatoire de l’emploi des entrepreneurs

Record des pertes d’emploi des patrons en 2024

En 2024, les pertes d’emploi des chefs d’entreprise ont atteint un niveau record, touchant plus de 60 000 dirigeants. Les secteurs de la construction et du transport sont particulièrement vulnérables aux tensions économiques conjoncturelles.

(c) Adobe Stock
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Les chiffres sont en ligne avec la remontée des défaillances d’entreprises. Selon l’Observatoire de l’emploi des entrepreneurs, porté par l’association GSC (assurance chômage pour les indépendants et chefs d’entreprise) et le cabinet Altares, publié le 10 mars, 60 852 dirigeants ont perdu leur emploi en 2024, suite à la liquidation judiciaire de leur entreprise, soit une hausse de 18% par rapport à l’année précédente, un record depuis la création de ce baromètre, en 2015.

Des petites structures et des seniors fragiles

L’étude confirme la plus grande vulnérabilité des petites structures : près des trois quarts des entrepreneurs contraints de stopper leur activité dirigeaient des TPE de moins de 3 salariés. Ceux à la tête d’entreprises de 6 à 9 employés subissent la plus forte augmentation (+30,2%, soit 3 347 dirigeants touchés). Les artisans-commerçants et les professions libérales sont fragilisées avec des hausses de 18,3% et 16,6%, respectivement. En revanche, les pertes d’emploi de dirigeants de sociétés de plus de 50 salariés reculent de 19,8%.

Sur les entrepreneurs en difficulté, 24 390 réalisaient un chiffre d’affaires inférieur à 500 000 euros, représentant près de 40% du total, contre seulement 369 dont le CA excédait 5 millions d’euros. Même les structures établies depuis longtemps et les entrepreneurs expérimentés ne sont pas à l’abri, souligne l’étude, puisque près d’un tiers des patrons impactés géraient des entreprises de plus de 10 ans d’existence.

Et les patrons seniors de plus de 60 ans figurent parmi les profils vulnérables, avec une nette accélération (+33,2%) : quelque 8 000 d’entre eux ont été touchés, dont près d’un tiers travaillant dans le secteur du bâtiment ou de la restauration. Cette tendance «soulève également la question des difficultés de transmission d’entreprise pour les entrepreneurs seniors», pointe l’étude. Les jeunes entrepreneurs de moins de 26 ans semblent mieux résister (+3%,1 277 cas). Mais ceux d’âge mûr, en particulier de 41 à 50 ans, sont durement pénalisés avec 16 328 dirigeants se retrouvant en situation de chômage (+17,1%), soit plus d’un quart du total.

La construction et le transport en première ligne

Les professionnels de la construction et les agences immobilières traversent une période difficile, avec des pertes d’emploi qui grimpent respectivement de 23,7% et 34,7%. «L’envolée des coûts des matériaux de construction et la flambée des taux d’intérêt (…) ont exacerbé cette situation», soulignait, en janvier, Victor Geneste, président du Conseil national des greffiers des tribunaux de commerce, en préambule du Bilan national des entreprises 2024.

Le transport et la logistique affiche aussi une augmentation nettement supérieure à la moyenne nationale (29,3%). La situation reste aussi alarmante dans le secteur de la sécurité, avec une envolée de 112,8%. Le commerce, notamment alimentaire, montre une certaine résilience (-5,4%) et le secteur de l’hôtellerie-restauration et débits de boissons connaît une des plus faibles augmentations des fermetures d’entreprises (+6,6%) depuis la pandémie de Covid-19.

L’ensemble du territoire impacté

La hausse des défaillances d’entreprises affecte les entrepreneurs de l’ensemble du territoire avec des situations variables selon les régions. En Île-de-France, le nombre de patrons ayant dû mettre fin à leur activité progresse de 25,2%. Le territoire francilien concentre près d’un quart des cas à l’échelle nationale (14 227). Deux régions se distinguent par une forte hausse du nombre de dirigeants en situation de chômage : la Normandie, (27,9%, 2 534) et les Pays de la Loire (26,8%, 2 568). La région Sud/Provence-Alpes-Côte d’Azur (+19,5%, 6 243) et la Bretagne (+19,1%, 2 304) connaissent également une progression supérieure à la moyenne nationale. La Nouvelle-Aquitaine, les Hauts-de-France et la Bourgogne-Franche-Comté frôlent les 15 % de hausse des pertes d’emploi. La Corse et le Centre-Val de Loire sont relativement épargnées (en-deçà de 10%).

A.B et B.L