Quelle route pour les voitures électriques en Picardie ?
En Picardie, ce sont d’abord les entreprises et les collectivités qui commencent à s’équiper, optimistes sur l’avenir du véhicule décarboné. Depuis la loi sur l’air de 1996, il y a l’obligation lors du renouvellement des flottes publiques d’acquérir un certain nombre de véhicules propres.
L’article 24 de la loi sur l’air impose en effet l’achat de véhicules propres (GPL, GNV, hybrides, électriques) pour le changement d’un parc à hauteur de 20 % de ce renouvellement. En ce qui concerne les véhicules électriques, les collectivités se sont surtout dotées de tricycles et quadricycles développés pour l’entretien des espaces verts, le nettoyage des voiries. Côté grand public, les voitures 100 % électriques Nissan Leaf, Citroën C-Zéro, Peugeot iOn, Renault Twizy et autres ZE (zéro émission), d’une autonomie de 185 km pour cette dernière, sont déjà nombreuses sur le marché. La Poste vient d’ailleurs de doter les facteurs d’Abbeville de 10 Renault Kangoo ZE pour la collecte et la distribution du courrier. Au total, 44 voitures électriques et 26 Quadéos sont attendus en Picardie d’ici fin 2012. Déjà 270 voitures électriques circulent actuellement et 10 000 Renault Kangoo ZE seront déployés d’ici 2015 pour la collecte et la distribution du courrier par les facteurs sur l’ensemble du territoire. Le 1er octobre 2009, le plan national pour le développement des véhicules propres était lancé. Objectif : deux millions de véhicules décarbonés sur les routes en 2020, soit 16 % du marché neuf. Le conseil général de la Somme, positionné sur le créneau des énergies durables, prévoit par exemple de s’équiper prochainement. A compter du 1er juillet 2012, les parkings des immeubles et des bureaux neufs devront être équipés d’installations de recharge des véhicules électriques ou hybrides ainsi que d’infrastructures pour le stationnement sécurisé des vélos. L’obligation d’équipement des bâtiments existants, quant à elle, ne s’appliquera qu’à compter du 1er janvier 2015.
Vers la logique d’usage
« Compte tenu de son autonomie, même si celle-ci est amenée à progresser et que les bornes de recharge rapide vont se développer, les utilisateurs de véhicules électriques seront davantage dans une logique de multimodalité, notamment pour les trajets les plus longs. En fonction du modèle économique retenu par les constructeurs, la possession du véhicule ne sera plus forcément la règle. En tout cas, il est quasi acquis que les batteries seront proposées en location. On passera donc d’une logique de possession à celle d’un usage, même s’il y aura vraisemblablement une période de transition pour les consommateurs que nous sommes. D’où les solutions innovantes de type autopartage que pourront être amenées à développer des entreprises ou des collectivités », explique Yannick Paillet, chargé de mission transport et déplacement à l’Ademe de Picardie qui a aidé quelques villes à acquérir des véhicules de voiries électriques telles que celles de Salouel, Abbeville, Cayeux-sur- Mer ou Roye. L’agglomération de Beauvais a d’ailleurs reçu un prix en 2011 pour la politique ambitieuse qu’elle compte mettre en place. Pour autant, des solutions de ce type ne peuvent voir le jour qu’avec un système de transport public performant : un système d’autopartage n’est pas intéressant pour faire du domicile- travail, par exemple dans des villes comme Amiens, car le nombre de véhicules nécessaires serait trop important. Le véhicule en autopartage est là pour des déplacements autres que pour des motifs de déplacements contraints (domicile-travail et domicile-école) : achats, loisirs de courte durée, démarches administratives… Il faut donc que pour les déplacements contraints ce soit le système de transports publics qui permettent d’assurer le besoin de déplacement.
Les innovations de demain
De la batterie au plomb née il y a 130 ans à celle lithium-ion de l’ordinateur portable, la technologie ne cesse d’avancer pour les batteries du futur comme le projet LIO sur la faisabilité d’une batterie lithium-air qui permettrait un jour de rouler 1 000 km sans polluer. « Dans nos laboratoires R&D, nous testons la voiture électrique de demain. Nous travaillons notamment sur les batteries de stockage d’électricité. Nous testons les batteries qui coûtent encore relativement cher aujourd’hui. Nous réfléchissons aussi à un procédé de recharge sans contact par induction », explique Bernard Salha, directeur d’EDF R&D. Les innovations de demain en matière de batteries issues des centres de recherche offriront donc des véhicules avec plus d’autonomie et moins chers. En 2015, l’autonomie sera de 250 km, puis de 500 km d’ici 2020. Une voiture électrique qui vaut aujourd’hui entre 30 000 et 35 000 euros ne coûtera plus que 5 000 euros avant 2020. Cela, grâce à de nouvelles technologies de stockage d’énergie qui seront utiles aussi bien pour les transports collectifs que pour les véhicules électriques. « Selon l’association de promotion des véhicules, un à deux millions de véhicules électriques et hybrides rechargeables pourraient être sur les routes françaises d’ici 2020. Ils ne représenteront qu’à peine 1 % de la consommation d’électricité. Mais leur impact sur le réseau pourrait être significatif s’ils se rechargeaient en même temps : en charge normale, cela correspondrait à 3 000 à 6 000 MW, (soit la puissance de deux à quatre réacteurs nucléaires EPR), conclut Yannick Paillet. D’ou la logique des réseaux électriques intelligents (smart grids) qui devraient permettre une gestion plus élaborée et plus fine des charges, notamment en fonction de la disponibilité de productions électriques locales. Certains imaginent même utiliser la charge des batteries des véhicules électriques pour soutenir le système électrique, ce qui aussi donnerait en outre une valeur ajoutée à la batterie. »