Quand l’Angleterre manque terriblement à la France
Depuis début juin, une quatorzaine est mise en place entre la France et le Royaume-Uni. Le trafic de voyageurs entre les deux pays est donc toujours à l’arrêt, et ce n’est pas sans conséquences pour l’économie de la région. De l’activité portuaire à l’hôtellerie, la clientèle britannique manque grandement.
Mise en place jusque fin juin au moins, la quatorzaine britannique, destinée à servir de sas sanitaire entre la France et le Royaume-Uni, prolonge la crise du confinement. Sur le port de Calais, cela se traduit très concrètement avec l’absence quasi totale de voyageurs sur les lignes de ferries. «Par jour il y a entre 50 et 100 voitures… Ce n’est rien, ce n’est pas un trafic», déplore Jean-Marc Puissesseau, le président de la Société d’exploitation des ports du Détroit (SEPD), qui se félicite toutefois de constater la bonne tenue du trafic des poids lourds. Néanmoins, tout n’est pas rose non plus sur ce terrain-là. Les formalités administratives se sont fortement complexifiées. «C’est très compliqué, déplore David Sagnard, le président de la fédération des transporteurs. Cela prend énormément de temps de créer des documents pour pouvoir autoriser les conducteurs.» Le résultat, c’est évidemment un engorgement rapide du port, dès le lundi et jusqu’au milieu de semaine. «On se retrouve dans des files de poids lourds que l’on n’avait pas vues depuis un an et demi…» Tout ceci est évidemment compliqué à gérer, et cela coûte cher puisque les chauffeurs sont payés lors de ces temps d’attente… «Avec en prime le risque accru de voir des migrants entrer plus facilement dans les camions.»
L’hôtellerie-restauration et le tourisme en première ligne
Mais ce sont surtout les activités touristiques qui sont les plus touchées. «La clientèle britannique est la première clientèle internationale en Hauts-de-France, explique Laurence Péan-Cousin, directrice des marchés internationaux au Comité régional du tourisme. En 2019, cette clientèle représentait 34% des nuitées internationales, soit 1,2 million de nuitées dans les Hauts-de-France.» Cette quarantaine britannique a donc de «lourdes conséquences» comme le souligne Pierre Nouchi, vice-président de l’UMIH des Hauts-de-France : «Les Britanniques étaient partout sur la Côte, à Arras, Lille, Reims… Du Pas-de-Calais jusqu’à Reims, c’était chez eux. Aujourd’hui, ce sont des villes qui vont souffrir. D’autant que c’est une clientèle qui a de l’argent.»
Fort heureusement, cette situation ne devrait pas durer éternellement. Les conditions de la levée de la quatorzaine sont encore très floues et rien n’est gravé dans le marbre, mais tout le monde prend son mal en patience. «Boris Johnson est un monsieur qui peut surprendre, philosophe Jean-Marc Puissesseau. Je pense qu’il ne prolongera pas la quarantaine au-delà du 30 juin. Ou s’il la prolonge, c’est pour que les Britanniques restent sur leur île pour faire redémarrer l’économie. Nous verrons, nous avons une chance sur deux…»
Conserver le lien avec cette clientèle
En attendant, les acteurs du tourisme ne baissent pas les bras. «La clientèle britannique est très attachée à la destination France, assure Laurence Péan-Cousin. Et son image reste très bonne dans les mentalités : «Les Britannique gardent une excellente image de l’art de vivre, de la gastronomie, du patrimoine, du golf à la française. L’image de la région Hauts-de-France n’est pas atteinte.»
Cette image a été constamment entretenue sur les réseaux sociaux durant tout le confinement. Les posts se sont multipliés tous les jours, afin de continuer à faire rêver les Britanniques et leur donner envie de voyager. «Nous avons notamment une base client d’un peu plus de 15 000 contacts réguliers à qui on envoie des newsletters, des suggestions de visites afin de garder le contact», insiste la directrice du Comité régional du tourisme. Et bien sûr, il s’agit aussi de rassurer, comme d’ailleurs pour la clientèle française. Gites, parcs d’attractions, hôtellerie, restauration, musées… tous les acteurs du tourisme et de la culture se remettent en marche avec des protocoles sanitaires stricts qui ont pour objectif de rassurer.
En attendant, le secteur touristique compte surtout sur le tourisme domestique et régional qui pourrait sauver la saison, et aussi, probablement, impacter les mois de septembre et octobre : «On vise plus de profit sur cette période où l’on touchera la clientèle des retraités, qui voyagera quand il y aura moins de monde et qui consommera.» C’est évidemment le souhait de tous.