Procès des otages en Syrie: Mehdi Nemmouche condamné à la perpétuité
La cour d'assises spéciale de Paris a condamné vendredi le jihadiste Mehdi Nemmouche à la réclusion criminelle à perpétuité, le reconnaissant coupable d'avoir été le geôlier de quatre journalistes français otages du groupe Etat islamique (EI) en Syrie en 2013...

La cour d'assises spéciale de Paris a condamné vendredi le jihadiste Mehdi Nemmouche à la réclusion criminelle à perpétuité, le reconnaissant coupable d'avoir été le geôlier de quatre journalistes français otages du groupe Etat islamique (EI) en Syrie en 2013, mais aussi de toutes les victimes syriennes anonymes.
Mehdi Nemmouche, 39 ans, jean, chemise noire, rasé de près, n'a pas montré de réaction. Une fois terminé l'énoncé du verdict, il a discuté, debout accoudé à la vitre du box, avec des avocats de la défense.
La cour, qui a délibéré pendant plus de 10 heures, a assorti sa peine d'une période de sûreté maximale de 22 ans, pendant laquelle il ne pourra pas demander de libération anticipée.
Le président Laurent Raviot n'a donné aucune motivation de la décision, mais a étendu le périmètre des victimes reconnues.
D'abord, à l'ensemble des 25 journalistes et humanitaires occidentaux kidnappés en Syrie. Plusieurs d'entre eux, dont certains proches étaient dans la salle d'audience, avaient été assassinés dans des mises en scènes macabres et filmées, à genoux dans des tenues oranges, pour des vidéos de propagande qui ont fait le tour du monde.
La cour a également reconnu victimes "tous les ressortissants syriens non identifiés". Pendant le procès, les ex-otages français ont raconté leur supplice de 10 mois dans les geôles de l'EI, mais souligné avoir vite compris que leurs vies avaient plus de valeur, aux yeux de leurs geôliers, que celles des milliers de Syriens torturés à mort "jour et nuit" dans les cellules voisines.
Mercredi, le parquet antiterroriste avait réclamé la peine maximale pour Mehdi Nemmouche, afin de "protéger définitivement la société" de ce "véritable sociopathe dénué de toute empathie".
Mehdi Nemmouche avait été identifié comme leur ancien geôlier par Didier François, Edouard Elias, Nicolas Hénin et Pierre Torres après l'attaque du musée juif de Bruxelles en 2014, où il avait abattu quatre personnes, un mois après le retour en France des journalistes français.
Petit joueur
"Faire de la surenchère dans le mal, ça ne fait pas de vous un héros du mal", a réagi après le verdict Nicolas Hénin.
"C'est vraiment fort qu'ils aient associé l'ensemble des Syriens, qui ont vécu à la fois l'écrasement de Bachar al-Assad et la folie de Daesh", a de son côté salué Didier François.
Le coaccusé de Mehdi Nemmouche, Abdelmalek Tanem, 35 ans, que les ex-otages n'ont pas reconnu, a été condamné à 22 ans de réclusion criminelle avec une période de sûreté des deux tiers.
La cour a également ordonné la prison à vie pour deux accusés présumés morts: Oussama Atar, déjà condamné à la perpétuité pour avoir commandité les attentats du 13-Novembre, qui "supervisait personnellement la gestion des otages" selon l'accusation, et Salim Benghalem, l'un des chefs des geôliers.
Enfin, une peine de 20 ans a été prononcée à l'encontre du Syrien Kais Al Abdallah, 41 ans, identifié comme l'ancien numéro 2 de l'EI à Raqqa et impliqué dans l'enlèvement des otages français.
Dans ses derniers mots dans la matinée, Mehdi Nemmouche, déjà condamné en 2019 à la perpétuité pour l'attentat du musée juif, s'est lancé dans une diatribe anti-Occident - "Daesh, à côté, c'est un petit joueur" -, pendant une quinzaine de minutes, sans un mot au sujet des ex-otages et des accusations le visant.
Tout au long du mois de procès, il avait juré n'avoir rejoint l'EI que pour y combattre l'ex-dictateur syrien Bachar al-Assad, et n'avoir jamais rencontré les quatre journalistes français qui ont eux formellement reconnu ce geôlier "pervers", "sadique", "qui parlait trop, qui parlait tout le temps".
"C'est par le terrorisme que le peuple syrien s'est libéré de la dictature", a lancé Mehdi Nemmouche dans ses derniers mots. "Oui j'ai été un terroriste et je ne m'en excuserai jamais, je ne regrette pas un jour, pas une heure, pas un acte".
Hors audience, un ex-otage syrien, partie civile, avait recadré: Mehdi Nemmouche "oublie que 95% des victimes de l'EI sont syriennes et musulmanes. Je suis l'une d'entre elles. L'Etat islamique n'est pas venu en Syrie pour combattre Bachar al-Assad mais pour combattre tout le monde, pour créer leur califat", avait déclaré Radwan Safar Jalany.
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