Lutter contre le chômage partiel et le licenciement

Prêt de salariés : Samuel Bensimon de Mobiliwork et Philippe Descamps d’Alliance partenaires

La reprise se profile à l’horizon, mais la fin probable des mesures de chômage partiel laisse craindre des vagues massives de licenciements. Dans ces conditions, le prêt de main-d’œuvre temporaire entre entreprises, un dispositif encore mal connu, apparaît comme une alternative intéressante. Samuel Bensimon de Mobiliwork et Philippe Descamps d’Alliance emploi nous expliquent tout…

L’entreprise qui prête ses salariés évite ainsi d’avoir recours au licenciement et de perdre des compétences utiles lors d’une reprise d’activité. (@Pixabay)
L’entreprise qui prête ses salariés évite ainsi d’avoir recours au licenciement et de perdre des compétences utiles lors d’une reprise d’activité. (@Pixabay)

Alors que certaines entreprises mettent leur personnel en chômage partiel, d’autres peinent à recruter en raison d’une activité accrue et parfois ponctuelle. Partant de là, et en prévision de l’après-crise, il semble logique de favoriser la flexibilité et la mobilité des salariés sur un même bassin d’emploi, avec un dispositif de prêt de salariés entre entreprises.

Comment ça marche ?

«C’est très simple, explique Samuel Bensimon, un des créateurs de Mobiliwork, première plateforme de prêt de salariés. L’entreprise s’inscrit sur la plateforme. Le salarié doit, bien entendu, être volontaire. Il signe un document dans lequel il donne son accord. L’entreprise prêteuse signe un contrat avec l’entreprise qui reçoit le salarié. Le salaire est versé par l’entreprise prêteuse, et le salarié garde tous ses avantages et reçoit le même salaire qu’auparavant. L’entreprise prêteuse établit une facture à l’entreprise d’accueil.» 

Mobiliwork s’est spécialisée dans cette solution de flexisécurité et a développé des clients dans toute la France. La plateforme met en relation les entreprises et assure l’accompagnement juridique et administratif. Le dispositif a déjà séduit de nombreuses entreprises de toute taille sur le territoire national et dans des domaines variés : Sevelnord, Alcatel Lucent, Daher…

En automne 2020, un projet avait aussi été initié dans l’Oise avec la communauté de communes du Valois pour trouver des salariés pour l’entreprise Mon Albumphoto/Home Box à Nanteuil-le-Haudouin qui connaît un pic d’activité très important au moment des fêtes de fin d’année. Trop court en délai, ceci n’a finalement pas abouti, mais ce n’est sans doute que partie remise

«Il y a toute une phase indispensable de préparation et d’explications», explique le créateur de Mobiliwork.

Un partenaire de poids

Une nouvelle étape est en cours de finalisation avec Philippe Descamps président d’Alliance emploi, dont le siège est situé à Marcq-en-Baroeul. 

Cet ancien DRH de l’usine Renault de Douai est un expert en matière de sauvegarde et de création d’emploi. Alliance emploi, qu’il a créé en 1998, est devenu le plus important groupement d’employeurs français. Cette plateforme a permis de finaliser 14 000 emplois depuis sa création. Elle regroupe aujourd’hui un réseau de 14 agences, 290 entreprises et 1 700 salariés

«Le groupement d’employeurs est très utile dans le cas d’entreprises qui ont une forte saisonnalité de leur activité. Les entreprises y trouvent de la flexibilité et les salariés peuvent accéder au plein emploi. Ceci a souvent permis d’offrir un premier emploi à des jeunes et de les faire monter en compétences. On a ainsi souvent vu ces contrats se transformer en recrutements en CDI.» La crise a cependant un peu modifié la donne.

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Le salarié donne son accord pour travailler dans une autre entreprise. (@Pixabay)

Préparer la reprise

Préparer la reprise a été une préoccupation dès le premier confinement. Philippe Descamps a ainsi participé, sur la zone de Lille et son important bassin d’emplois, à la création d’une plateforme digitale d’accompagnement et d’aide aux entreprises : «La Cité de la reprise»

L’idée était de préparer l’après-crise, en mode «solutions», de faire réfléchir ensemble les décideurs des Hauts-de-France. «Nous avons ainsi pu identifier et actionner les trois leviers de la reprise qui sont à la fois sanitaire, financier et lié à l’emploi», explique Philippe Descamps. 

La Cité de la reprise s’appuie sur la puissance digitale de Linkedin et crée un écosystème collaboratif public-privé, quelle que soit la taille de l’entreprise

«Le prêt de personnel est une solution à laquelle nous avons pensé. A partir de là, le rapprochement avec Mobiliwork, dont nous avions déjà entendu parler, a été une évidence. Et comme il faut être pragmatique, on a testé et ça marche !»

Un dispositif gagnant/gagnant

Les bénéfices du prêt de personnel sont évidents. L’entreprise qui prête ses salariés évite ainsi d’avoir recours au licenciement et de perdre des compétences utiles lors d’une reprise d’activité. Pour l’entreprise d’accueil, les charges seront beaucoup moins élevées qu’en intérim. Quant au salarié, il ne perd rien de son salaire, de ses avantages et continue à accumuler de l'expérience. C’est une alternative innovante au dispositif actuel du chômage partiel dont on ne connaît pas les évolutions à venir.

Un kit d’outils juridiques et de communication accompagne, de façon très précise, la mise en place du dispositif. Une communication et un lien régulier doivent persister avec l’entreprise d’origine pendant les mois de la mission. Résultat ? De nombreuses entreprises adhérentes d’Alliance emploi de l’aéronautique, de l’automobile ou de l’industrie du plastique, se disent prêtes à se lancer…

Agnès Guillaumin