Pour le président de Noriap, « nous sommes à une période charnière pour l'agriculture »
Jusqu'alors vice-président, David Saelens a pris la présidence du groupe Noriap en décembre dernier. Il succède ainsi à Jean-François Gaffet, qui a souhaité passer la main après 14 ans à la présidence du groupe coopératif agricole.
Le changement dans la continuité. Ce qui est la marque de fabrique du monde agricole se vérifie aujourd'hui encore au sein du groupe Noriap, basé à Amiens. Après que son président, depuis 2007, ait annoncé souhaiter passer la main, le Conseil d'administration de la coopérative régionale a élu l'un des vice-présidents pour lui succéder.
David Saelens, 56 ans, est agriculteur à Offignies, entre Poix-de-Picardie et Aumale. Avec son épouse et son fils, et un autre associé, il y élève des bovins "viande" et cultive des céréales, des oléoprotéagineux, des pommes de terre et du lin. « La coopération, je suis tombé dedans quand j'étais petit », sourit David Saelens, rappelant la logique mutualiste qui a marqué la carrière de ses parents.
Aujourd'hui, il prend donc la tête d'un groupe qui compte 8 500 agriculteurs clients ou adhérents et plus de 1 200 salariés, et qui est présent du Havre à Noyon et de Dunkerque à Beauvais.
L'entreprise se compose désormais de cinq pôles, bien au-delà de son activité première de collecte de grains et d'approvisionnement en intrants. « Depuis 15 ans, nous avons choisi de nous diversifier sur d'autres activités. Il fallait adapter notre modèle économique aux évolutions, politiques, réglementaires et économiques », explique David Saelens.
Œufs et engrais : garder le cap dans la tourmente
En particulier Noriap est largement investi dans le domaine de l'alimentation animale avec sa filiale Novial, dans le machinisme agricole, la jardinerie avec 23 magasins Gamm vert, mais aussi dans la filière œufs avec Cocorette. Une filière dans la tourmente depuis 18 mois. « Au printemps 2020, nous avons connu un énorme regain d'intérêt des consommateurs pour les œufs bio ou label. »
Mais depuis, cette demande s'est effondrée, alors même qu'en parallèle les coûts de production des éleveurs sont en hausse. Cocorette, en tant qu'intermédiaire, a joué les amortisseurs en 2021, mais difficilement.
« Nous venions juste de devenir majoritaires dans Cocorette. Nous avions une organisation structurelle qui n'était pas suffisamment efficiente pour s'adapter à une telle crise », explique David Saelens. Il l'avoue, Cocorette est « un peu en difficulté », mais un plan de retournement est engagé et les renégociations de tarifs sont en cours avec la grande distribution.
Pour le reste, la situation de la coopérative régionale est solide. Même sur le terrain des approvisionnements, dans la tourmente du marché des matières premières, ne pose pas de problème à l'heure actuelle.
« On travaille beaucoup sur la base de l'engagement. Nous avons donc, très tôt, une vision précise des quantités dont nos adhérents ont besoin. Donc toutes les commandes de nos adhérents seront honorées. Cela nous permet aussi de travailler sur le prix. Nous avons ainsi pu anticiper de manière très efficace les commandes d'engrais dès juin ou juillet, au tout début de la montée des prix », explique le président.
Légumes : des créneaux à prendre
Au-delà de ces sujets très conjoncturels, David Saelens et Noriap continuent d'adapter leur modèle dans le temps. La coopérative compte bien accompagner les agriculteurs dans de nouvelles productions et filières, notamment autour des légumes. « C'est une vraie opportunité pour notre groupe et pour nos adhérents. Et il y a encore des créneaux à prendre. »
Mais l'évolution concerne aussi les pratiques culturales. Un vrai défi que de répondre aux nouvelles réglementations environnementales et aux attentes des consommateurs. « Nous sommes à une période charnière pour l'agriculture. Et les jeunes générations nous challengent », se félicite David Saelens. Ce sont d'ailleurs là des piliers de la politique RSE que la coopérative compte développer dans les années à venir.