Pour la première fois, le porte-avions français sous commandement de l’Otan

Le porte-avions Charles-de-Gaulle, fleuron de la flotte française, va passer pour la première fois sous contrôle opérationnel de l’Otan pour une mission de 15 jours en Méditerranée, un symbole de l'engagement renforcé de Paris auprès...

Le porte-avions Charles de Gaulle à Toulon le 8 février 2017 © ANNE-CHRISTINE POUJOULAT
Le porte-avions Charles de Gaulle à Toulon le 8 février 2017 © ANNE-CHRISTINE POUJOULAT

Le porte-avions Charles-de-Gaulle, fleuron de la flotte française, va passer pour la première fois sous contrôle opérationnel de l’Otan pour une mission de 15 jours en Méditerranée, un symbole de l'engagement renforcé de Paris auprès de l'Alliance atlantique face à la Russie.

Cette mission regroupant des bâtiments de plusieurs nations (Etats-Unis, Grèce, Espagne, Portugal) va se dérouler du 26 avril au 10 mai sous le commandement de l'état-major maritime StrikforNato, comptant quinze nations dont la France, et dirigée par un vice-amiral américain, a annoncé jeudi l'état-major des armées.

"C’est la première fois que l'on place le porte-avions nucléaire Charles-de-Gaulle et l'ensemble de son escorte, dont un sous-marin nucléaire d’attaque, sous le contrôle opérationnel de l’Otan pendant 15 jours", souligne le vice-amiral français Didier Maleterre, numéro deux du commandement maritime de l’Otan.

Mais "à tout moment on peut récupérer le mandat, et en un claquement de doigt récupérer le commandement national en cours d’opérations si nécessaire", précise le haut gradé.

Autrefois vue comme un allié difficile, faisant encore l'objet de méfiance à Bruxelles, la France réinvestit l'Otan depuis le retour de la menace russe, en parallèle de son désengagement militaire en Afrique.

Membre fondateur de l'organisation créée en 1949 pour faire face à la menace soviétique, elle en avait quitté le commandement militaire intégré en 1966, sous l'impulsion du général de Gaulle, en raison de désaccords avec les Etats-Unis. Elle y est revenue en 2009, sans toutefois intégrer le groupe des plans nucléaires de l'Alliance. 

Le Charles-de-Gaulle, avec ses avions de chasse Rafale Marine à son bord, reprendra ainsi fin avril les opérations après huit mois de travaux. Escorté par un sous-marin nucléaire d’attaque, des frégates spécialisées et un ravitailleur - le tout constituant le "groupe aéronaval" français, NDLR -, il a déjà participé à des exercices et opérations de l’Otan mais toujours sous contrôle national.

La mission permettra à la France "de rentrer dans le rang en se mettant au même niveau que nos alliés. On va aussi beaucoup apprendre", a estimé le commandant du groupe aéronaval français, le contre-amiral Jacques Mallard.

Message aux Russes

Elle "est un message vis-à-vis des Russes. Face à la menace qui croît, le fait d'être efficace collectivement prime", commente Pascal Ausseur, directeur général de la Fondation méditerranéenne d'études stratégiques.

Le message est également à destination des autres nations de l'Alliance atlantique, un temps critiques du soutien français à Kiev, qu'ils estimaient trop léger à la suite de l'invasion russe de l'Ukraine le 24 février 2022. Mais la France a multiplié récemment les déclarations fortes à l'égard de Moscou, son président Emmanuel Macron ayant notamment appelé mi-mars à une "défaite de la Russie".

"Il y a un tournant assez significatif dans l'approche française. A Bruxelles, les alliés regardent tout cela de très près, et plus il y aura de gestes concrets comme celui-ci, plus forte sera leur perception d'un changement français crédible", souligne Robert Pszczel, ancien responsable à l'Otan et chercheur au Centre for Eastern studies.

Cette mission "reflète notre engagement commun à renforcer la coopération et à assurer l'interopérabilité dans un environnement de sécurité difficile", a déclaré la porte-parole de l'Otan, Farah Dakhlallah.

Depuis le retour de la menace russe, la France a déployé plus de 1.500 hommes à la frontière de l'Ukraine, en Roumanie, où elle a pris le rôle de nation-cadre de l'Otan.

En France, plusieurs partis politiques s'opposent à la présence au sein du commandement intégré de l'Otan. Mais le président du Rassemblement national (RN, extrême droite), la principale force d'opposition, a nuancé récemment sa position en affirmant qu'il n'était pas question d'en sortir, tant que la guerre en Ukraine était en cours.

En réponse à la guerre en Ukraine, l'Otan a augmenté significativement sa présence maritime en Europe. Les Etats-Unis ont placé un de leur porte-avions sous contrôle opérationnel de l'Otan en 2022, pour la première fois depuis la Guerre froide, tandis que les Britanniques l'ont fait en 2023, une première également pour eux avant la France, selon l'Otan.

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