Pour «une intelligence portuaire complète»
Président du Conseil régional et sénateur du Pas-de-Calais, Daniel Percheron fait le tour des grands sujets des territoires et prend à témoin l'opinion sur des sujets délicats. Rencontre.
La Gazette. La grande actualité économique, c’est le canal Seine-Nord, un budget qui passe de 4,4 à 6,5 milliards. A quoi doit-on s’attendre de la part de l’Etat et de l’Europe ?
Daniel Percheron. Pour la première fois depuis 400 ans, nous nous branchons sur la prospérité rhénane allemande. Seine-Nord, ça n’a pas de prix. Pourquoi on n’a pas fait Seine-Nord avant ? Sûrement parce qu’on avait la houille sur place. A l’époque, on a tourné le dos au duc de Bourgogne, à la Flandre… Aujourd’hui, Seine-Nord, c’est vital. En pleine déprime, un projet encore retardé. A aucun moment, vous n’entendez parler du financement de l’Etat. Le déménagement aux Batignolles du palais de justice de Paris, c’est 2,5 milliards d’euros… Vu de Paris, Seine-Nord n’est pas une priorité. J’ai dit qu’on pourrait passer de 200 à 250 millions d’euros.
Dans le cadre de l’appel à projets que la Région a lancé afin d’actualiser et d’harmoniser ses concessions portuaires, la CCI Côte d’Opale a finalement été la seule à déposer une offre, Eurotunnel s’étant ravisé au dernier moment. Que faut-il en penser ?
M. Gounon est un homme très avisé. S’il n’a pas déposé de candidature, c’est qu’il a pensé peut-être qu’il y avait d’autres moyens de s’associer au développement des ports du littoral. Jacques Gounon a probablement trouvé prématuré d’ouvrir un débat sur le monopole qu’Eurotunnel pouvait incarner si elle avait la gestion des ports. Il n’est pas du tout exclu que la CCI dise qu’elle espère associer d’autres partenaires à la gestion du port. La Région verrait de manière très positive l’association d’Eurotunnel, du Port de Dunkerque et de la Caisse des dépôts. Le président Puissesseau est en train de réaliser sa dernière et belle mue. Il n’est plus uniquement calaisien. C’est plein de promesses. Avec Dunkerque, nous serions le premier ensemble portuaire de France. L’intelligence portuaire de la région sera alors complète.
Eurotunnel n’est pas très présent sur l’investissement dans le rail sur la ligne Calais-Dunkerque…
Vous savez, si je pouvais, j’impliquerais la SNCF, et même Eurostar !
Justement, le Nord-Pas-de-Calais veut être une grande région ferroviaire européenne…
Je suis de l’avis de Jacques Attali quand il dit qu’il n’y a qu’un seul endroit en Europe où nous pouvons construire encore un cœur de mondialisation : c’est le long de la voie ferrée Londres-Calais-Lille-Bruxelles-Amsterdam-Cologne. Nous proposons de décider, avant la fin de l’année, le RER eurorégional : des trains adaptés qui roulent vite qui connecteront la Métropole à la Belgique et au bassin minier. C’est entre 2 et 2,5 milliards d’euros. Une ligne qui partira de Courtrai, plongera sous Lille, desservira le Grand Stade, filera à travers Lesquin et Carvin vers Hénin-Beaumont avant d’emprunter le réseau classique vers Douai et Lens. Cela unifiera une zone de 2,8 millions d’habitants d’ici 2022. C’est un signal très fort.