Pompiers volontaires: la France viole la Charte sociale européenne, estime le Conseil de l'Europe

Le Comité européen des droits sociaux, organe du Conseil de l'Europe, affirme dans une décision publiée mercredi que la différence de rémunération en France entre les sapeurs-pompiers volontaires et professionnels constitue un traitement discriminatoire...

Pompiers volontaires: la France viole la Charte sociale européenne, estime le Conseil de l'Europe © PHILIPPE HUGUEN
Pompiers volontaires: la France viole la Charte sociale européenne, estime le Conseil de l'Europe © PHILIPPE HUGUEN

Le Comité européen des droits sociaux, organe du Conseil de l'Europe, affirme dans une décision publiée mercredi que la différence de rémunération en France entre les sapeurs-pompiers volontaires et professionnels constitue un traitement discriminatoire au regard de la Charte sociale européenne.

Le Comité avait été saisi par l'Union syndicale Solidaires SDIS (Sud Sdis), qui estimait notamment que l'absence de reconnaissance de la qualité de "travailleurs" des sapeurs-pompiers volontaires, qui n'ont ni le statut de fonctionnaire, contrairement aux sapeurs-pompiers professionnels, ni celui de salarié soumis au code du travail, portait préjudice à leurs droits.

L'institution a donné raison au syndicat sur plusieurs points. Elle souligne que les sapeurs-pompiers volontaires "apportent une contribution vitale au service public, au point d'être devenus indispensables à son fonctionnement global", et estime que la différence de traitement entre pompiers volontaires et professionnels présente un caractère "discriminatoire".

"Alors que 78,6% des sapeurs-pompiers de France sont des volontaires, et qu'ils se chargent de 34% à 66% des activités courantes de lutte contre l'incendie", le montant des indemnités représentait "moins d'un quart de l'ensemble de la masse salariale du système de sécurité civile" en 2017, note le Comité.

Celui-ci souligne également que les dispositions limitant le temps de travail des pompiers professionnels ne s'appliquent pas aux pompiers volontaires, pour qui "la notion de temps plein est rendue inapplicable dans la pratique". Il rappelle que "la très grande majorité des départements ne respectent pas" l'obligation de fixer un plafond du temps de travail des pompiers volontaires.

Le Comité conclut donc à une violation de la Charte en raison de la "non-prise en compte de la totalité de leur temps de travail", et du "vide réglementaire" concernant leur temps de travail.

Enfin, le Comité a estimé qu'en impliquant des pompiers volontaires mineurs dans des opérations de lutte contre les incendies, et alors que les mesures pour assurer leur sécurité étaient "insuffisantes", la France avait violé la Charte, qui impose de ne pas exposer de mineurs à des "occupations considérées comme dangereuses".

Sollicitations "exponentielles

Le gouvernement français avait estimé que les pompiers volontaires mineurs "ne relevaient pas du champ d'application de la Charte", selon le compte-rendu des débats publié par le Comité.

"On attend désormais de voir quelle sera la réaction de l'Etat français, puisque cette décision, si elle constate des violations, n'est pas assortie d'injonctions particulières", a réagi auprès de l'AFP Manuel Caullet, délégué national Sud Sdis.

"On espère que cela amènera l'Etat français à se mettre en conformité avec le droit sur la question de la reconnaissance des sapeurs-pompiers volontaires comme des travailleurs, au moins sur une grande partie de leur activité", a-t-il poursuivi. "Les sollicitations des sapeurs-pompiers volontaires sont exponentielles ces dernières années, et conduisent à les mettre dans des situations dangereuses."

La Charte sociale européenne est un traité du Conseil de l'Europe qui garantit un large éventail de "droits sociaux et économiques fondamentaux" liés à l'emploi, au logement, à la santé, à l'éducation, ou à la protection sociale.

Elle est parfois présentée comme la "Constitution sociale de l'Europe". Son application est surveillée par le Comité européen des Droits sociaux.

Les Etats parties à la Charte ont l'obligation de coopérer avec le Comité et sa jurisprudence.

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