Peut-on faire repartir l’investissement d’une Europe très hé
L’attractivité de l’Europe et le positionnement plus ou moins haut de gamme de son économie dépendent de ses investissements, explique une étude de France Stratégie. Or, depuis 2011, les investissements se replient en Europe, alors qu'ils se redressent aux États-Unis.
Trois cents milliards d’euros pour la période 2015-2017: c’est le montant du programme d’investissements annoncé par Jean-Claude Juncker, le nouveau président de la Commission Européenne, le 15 juillet dernier.
Une annonce politique qui signale l’importance de l’enjeu des investissements pour l’économie du territoire, estiment les auteurs de «Y a-t-il un retard d’investissement en France et en Europe depuis 2007 ?». Cette note d’analyse de septembre 2014, émane de France Stratégie, organe de réflexion rattaché au Premier ministre. D’après les analystes, suite à la crise de 2007, les investissements ont connu des évolutions diverses selon les pays et les secteurs – ce qui dessine des pistes d’action publique différentes. Pour la France, si la situation en matière d’investissement n’est pas la plus défavorable d’Europe, elle comporte néanmoins des points faibles importants, notent les économistes qui évoquent un «mal-investissement». En effet, non seulement l’hexagone a connu un reflux marqué de ses investissements, mais, en plus, une partie non négligeable d’entre eux sont dirigés vers des secteurs «qui ne préparent pas l’avenir», indique le document. En particulier, la part dédiée à la recherche et développement serait insuffisante. Pourtant, «rien n’indique que les entreprises soient contraintes par un rationnement du crédit, et la mise en place de la Banque Publique d’Investissement améliore le financement de celles des activités (innovation notamment) qui font face à des contraintes de financement», poursuit la note. Or, cette baisse de l’investissement productif privé risque d’obérer la croissance future : déjà, d’après la Banque de France, l’âge moyen du capital en machines et équipements a significativement augmenté depuis 2008. Restent les investissements publics : là aussi, le constat n’est pas totalement satisfaisant. Il est vrai que la France a conservé un niveau d’investissements publics «relativement stable», précise le document, contrairement à la plupart des pays européens, lesquels ont vu leurs dépenses publiques d’investissement baisser après avoir mis en place des plans de relance suite à la crise de 2008-2009. Mais les auteurs de l’étude indiquent toutefois que ces investissements se concentrent davantage dans les équipements en infrastructures que sur la formation de «capital humain», pourtant nécessaire à préparer l’avenir.
Le grand écart intra et extra européen
En matière d’investissements publics, l’Allemagne est plus mal lotie que la France : une politique budgétaire très rigoureuse lui a été néfaste, ce qui se répercute sur l’état des infrastructures. Et ce n’est là qu’un exemple des différences entre les évolutions des pays de la zone Euro. Italie et Espagne, en particulier, ont connu un reflux de leurs investissements productifs particulièrement marqué et qui ne s’est pas stabilisé, contrairement à la France et à l’Allemagne. Résultat, ces pays du Sud de l’Europe n’ont pas retrouvé leur niveau de production d’avant crise. Un fort ralentissement «voire un arrêt de l’investissement» peut être mis en évidence, signale France Stratégie. Résultat de l’accumulation de ces tendances, au niveau global, la zone euro a accumulé un retard important en matière d’investissements vis-à-vis des États-Unis à partir de 2011, date à laquelle ils ont commencé à se redresser outre -Atlantique. Les dépenses européennes en recherche et développement, en particulier, croissent à un rythme ralenti. «Ce phénomène implique à la fois une capacité réduite de l’économie à se rapprocher de la frontière technologique en sortie de crise, mais également, et, c’est plus grave à court terme, à retrouver son potentiel d’avant crise : une partie des capacités non utilisées pourrait être en train de disparaître», alertent les analystes. Par ailleurs, à moyen terme, le sous-investissement public est néfaste à l’attractivité de la zone euro et nuit à sa capacité à attirer les investissements étrangers et la localisation de nouvelles activités créatrices d’emplois. D’après la note de France Stratégie, les politiques publiques peuvent intervenir à différents niveaux en levant les freins à l’investissement privé, notamment en créant les conditions d’une plus grande prévisibilité, ou en anticipant des investissements publics. Le tout, dans le cadre d’une Europe où la tendance est plus à un accroissement qu’à une diminution des écarts entre les différents pays.