Perpétuité requise contre Zepeda, la défense avance un scénario alternatif
La réclusion criminelle à perpétuité a été requise mercredi contre le Chilien Nicolas Zepeda, jugé en appel pour l'assassinat de son ex-petite amie Narumi Kurosaki, tandis que la défense a avancé l'hypothèse...
La réclusion criminelle à perpétuité a été requise mercredi contre le Chilien Nicolas Zepeda, jugé en appel pour l'assassinat de son ex-petite amie Narumi Kurosaki, tandis que la défense a avancé l'hypothèse d'une mort infligée involontairement à l'étudiante japonaise.
"Tout conduit vers Nicolas Zepeda dans la mort de Narumi Kurosaki", a martelé l'avocat général Etienne Manteaux, qui n'a pas requis de peine de sûreté.
Deux heures durant, il s'est employé à démontrer "la pleine et entière culpabilité" de l'accusé, malgré l'absence du corps de l'étudiante, jamais retrouvé.
Pour M. Manteaux, le Chilien de 33 ans est l'"auteur évident" du crime, bien qu'il ne cesse de clamer son innocence, alors que son procès en appel touche à sa fin après presque trois semaines d'audiences.
Le magistrat a aussi requis une interdiction définitive de territoire une fois la peine purgée.
En première instance, M. Manteaux avait déjà requis la perpétuité mais n'avait pas été suivi par les jurés : Nicolas Zepeda avait été condamné à 28 ans de réclusion.
Féminicide
Il "a tué Narumi parce que c'était une femme" qui a eu "l'audace de le quitter" alors qu'elle venait d'entamer un séjour en France pour ses études, a martelé M. Manteaux. L'accusé, impassible pendant le réquisitoire, a été "dévoré par (...) son délire de possession", a-t-il ajouté, évoquant le terme de "féminicide".
L'accusé a élaboré deux "options" : reconquérir Narumi ou la tuer. C'est son "amour corrompu" qui va le pousser "à mettre en œuvre la seconde option" après l'échec de la première.
A Besançon, il épie plusieurs jours Narumi, attendant que la jeune femme, qui a entamé une relation avec Arthur Del Piccolo, partie civile au procès, soit seule pour aller à sa rencontre.
Dans le même temps, il effectue des "repérages" dans une forêt près de Dole, où coule la rivière le Doubs, explique le magistrat.
A propos de la nuit du crime, celle du 4 au 5 décembre 2016 durant laquelle des témoins disent avoir entendu des "hurlements d'épouvante" et un "râle" à l'étage de la résidence universitaire où logeait Narumi, M. Manteaux concède ne pas pouvoir dire avec certitude comment elle s'est déroulée.
Une chose est sûre, pour le magistrat : Nicolas Zepeda a tué Narumi. Il l'a "étouffée" ou "étranglée" avant, probablement, de mettre le cadavre dans la valise de l'étudiante et de se débarrasser du corps le 6 décembre dans le secteur des repérages.
Nicolas Zepeda, qui avait acheté un bidon d'essence et des allumettes, l'a peut-être brûlé ou immergé dans le Doubs, estime le magistrat.
L'ancien étudiant en économie, fils d'une famille aisée, a ensuite quitté la France, puis regagné le Chili d'où il a été extradé en juillet 2020.
De leur côté, ses avocats se sont employés à instiller le doute chez les jurés, pilonnant les arguments de l'avocat général.
Nicolas Zepeda "fait un coupable très plausible" mais "pour condamner, il faut des preuves", a insisté Me Sylvain Cormier, raillant "le fouillis d'actes" de ce dossier.
Délire d'avocat
Renaud Portejoie propose, lui, un scénario alternatif à l'assassinat : celui de violences volontaires ayant entraîné la mort sans intention de la donner, faits moins sévèrement réprimés.
Si les jurés décident de valider cette hypothèse, M. Zepeda, en tant qu'ancien conjoint de Narumi, encourrait en effet 20 ans de réclusion et non plus la perpétuité.
Haussant la voix, parfois jusqu'à crier, Me Portejoie déroule son hypothèse, s'appuyant sur l'impossibilité pour l'accusation de déterminer avec précision la scène de crime.
Il brandit un témoignage évoquant des "bruits contre un radiateur", entendu en même temps que les hurlements. "S'il y a une dispute?" entre Narumi et son client, s'interroge l'avocat, qui déroule : sa tête "tape" sur le radiateur de sa chambre, les hurlements sont des cris de douleur, elle s'est "fracassée le crâne", un traumatisme pouvant entraîner une mort assez rapide, "dans un râle".
"Qu'est-ce qui vous empêche de penser que ça s'est passé comme ça?", lance-t-il aux jurés, sans expliquer ce que son client a fait du corps de Narumi.
"Ce n'est pas le délire d'un avocat!", a-t-il assuré, demandant à la cour d'acquitter Nicolas Zepeda des faits d'assassinat.
Le verdict est attendu jeudi.
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