Passage obligé au zéro phyto pour les collectivités
Au 1er janvier 2017, l’État, les collectivités locales et les établissements publics auront l’interdiction d’utiliser des produits phytosanitaires pour l’entretien des espaces verts, promenades, forêts et voieries. Pour coller à la loi Labbé et trouver des méthodes alternatives, ils peuvent compter sur le soutien de plusieurs organismes et structures qui leur prodiguent conseils et subventions.
Tout l’enjeu pour les collectivités va résider dans la mise en place de cette gestion différenciée qui leur permettra de répondre aux directives de la réglementation. Certaines ont déjà entamé une réduction des produits phytosanitaires, d’autres sont en passe de pouvoir se targuer de ne plus utiliser de produits phytosanitaires, et quelques unes ont déjà atteint l’objectif “zéro phyto”. Pour mémoire, la loi Labbé a avancé au 1er janvier 2017 l’objectif “zéro phyto” (initialement prévu pour 2020) pour les personnes publiques, conformément à la loi afférente à la Transition énergétique pour la croissance verte adoptée en juillet dernier qui s’étendra aux privés en janvier 2019. La conséquence pour les collectivités : un passage aux techniques alternatives qui nécessite quelques ajustements, dont l’achat de matériel et un accompagnement technique et pédagogique. Les collectivités sont également encouragées à signer la Charte d’entretiens des espaces publics initiée en 2009, qui évolue au 1er janvier et ne comptera plus que trois niveaux au lieu des cinq existant jusquelà. Les financements de l’Agence de l’eau (voir encadré) sont mobilisables dans le cadre de la Charte, d’où l’intérêt pour les acteurs publics d’y souscrire. Et pour diminuer les coûts liés à l’acquisition de matériel – comme les désherbeurs thermiques –, les collectivités sont encouragées à jouer la carte de la mutualisation.
Une question d’adaptation « Nous n’intervenons pas au niveau de la réglementation proprement dite », explique Xavier Jamin, chargé d’opérations à l’Agence de l’eau Seine-Normandie, « nous avons pour mission d’accompagner les collectivités dans le respect de la Charte [ndlr, l’Agence de l’eau travaille à son uniformisation avec la Région et l’Agence de l’eau Artois-Picardie] et les guider pour atteindre cet objectif de “zéro phyto”. Les collectivités qui ne respectaient qu’une partie des engagements listés dans la Charte doivent désormais aller jusqu’au bout rapidement pour parvenir au niveau 2, c’est-à-dire l’application du “zéro phyto” dans l’ensemble de la commune, y compris sur les terrains de sport et les cimetières, et l’acquisition de matériels alternatifs. » Le niveau 3, va lui encore plus loin, avec une intégration globale comprenant la création d’une zone de biodiversité, l’adaptation de l’urbanisme et la gestion du pluvial. Plus de 140 collectivités de l’Aisne et l’Oise ont déjà adhéré à la Charte, mais seules 30% ont atteint le “zéro phyto”. « C’est surtout une question d’adaptation », estime Mélissa Magoutier, chargée de communication à l’Agence de l’eau SeineNormandie. « Le premier frein, ce peut être les habitants, il faut que les collectivités communiquent auprès d’eux et de leurs agents sur ce virage et ce changement, et que tous soient sensibilisés. » Car sans produits phytosanitaires, la nature reprend ses droits dans la ville, et les plantes (ré)apparaissent. À charge aux collectivités de repenser leur aménagement sur le long terme, via le plan de gestion différenciée, au moment de rénover l’espace urbain, en laissant la part belle aux végétaux, qu’ils soient plantés ou spontanés. Mélissa Magoutier et Xavier Jamin se veulent rassurants : « Les collectivités se prennent de plein fouet l’avancée de la loi, et dans la précipitation, elles ont tendance à occulter tout le travail qu’elles ont mené en amont. Elles doivent prendre leur temps, l’essentiel pour 2017 est d’adhérer à la Charte pour impulser leur réflexion. »
Accompagnement pédagogique Les Agences de l’eau ne sont pas les seules structures vers lesquelles les collectivités peuvent se tourner. Le Centre permanent d’initiatives pour l’environnement (CPIE) des Pays de l’Aisne – une des plus anciennes antennes du réseau national – a comme vocation de faire en sorte que les acteurs du territoire intègrent les enjeux environnementaux dans leur politique et actions. « Nous leur donnons le pouvoir d’agir, en leur apportant des informations, leur donnant des points d’appui et les mettant en réseau pour plus d’efficience », explique Muriel Morbelli, chargée de mission. En 2008 déjà, le CPIE avait organisé une journée “Objectif zéro phyto” destinée à dispenser des éléments concrets aux collectivités pour qu’elles changent leurs habitudes. « L’enjeu est d’accueillir plus de biodiversité dans les communes en les fleurissant différemment, mais aussi de protéger la santé des agents municipaux. Nous accompagnons les collectivités en fonction de leur propre problématique, certaines sont encore dans le déni quant à la dangerosité des produits phytosanitaires »,