Passage de témoin au Medef Côte d'Opale

Avec 31 ans passés en tant que délégué général du Medef Côte d'Opale, Patrick Gheerardyn est une figure incontournable du Mouvement des Entreprises de France sur le littoral. Le 31 décembre prochain, il quitte ses fonctions pour laisser la place à son actuel adjoint, Franck Hélias, en poste depuis le 1er février. Interview croisée.

Franck Hélias, délégué général adjoint du Medef Côte d'Opale à gauche, et l'actuel délégué général Patrick Gheerardyn.
Franck Hélias, délégué général adjoint du Medef Côte d'Opale à gauche, et l'actuel délégué général Patrick Gheerardyn.

La Gazette : Qui êtes vous, Franck Hélias ?

Franck Hélias : Etant breton à l’origine, je suis arrivé ici à la fin des années 1980. J’ai fais mes études à Dunkerque à l’ISCID – l’ISCID CO maintenant – une formation commerciale tournée vers l’international. Puis j’ai fait vingt ans dans l’industrie, dix ans en France et dix à l’étranger, ce qui nous emmène en 2013. Là j’ai fait un virage au niveau professionnel en rejoignant Dunkerque Promotion en tant que directeur de l’agence de développement économique. Puis j’ai rejoint le Medef et le Quai des Entreprises le 1er février de cette année.

Patrick Gheerardyn : Ce qui est très important avec l’arrivée de Franck dans l’équipe, c’est qu’il a une expérience internationale mais également une compétence que nous n’avons pas dans cette maison : la compétence économique. Il va pouvoir apporter son expertise et ses capacités d’innovation dans ce domaine, au profit de nos entreprises au sein du Medef Côte d’Opale et de Quai des Entreprises.

Même si votre prise de fonction en tant que délégué général adjoint est récente, vous avez passé ces vingt-cinq dernières années à travailler en France et à l’étranger, puis dans le Dunkerquois. Y a-t-il eu un décalage entre la vision que vous aviez du territoire et celui-ci aujourd’hui ?

Au 1er janvier 2019, Franck Hélias devient le nouveau délégué général du Medef Côte d’Opale.

FH : Quand je suis arrivé ici, j’avais 20 ans. Ce qui m’étonne, ce sont les a priori que les gens peuvent avoir. J’ai eu la chance d’aller dans beaucoup de lieux et de me rendre compte qu’un endroit comme la Côte d’Opale, c’est énormément d’atouts et une qualité de vie. Mais j’en entends beaucoup qui dénigrent leur territoire. Quand on parle des jeunes qui partent, c’est tout à fait normal ; il ne faut pas que ça soit une prison. Je ne suis pas d’accord avec ceux qui disent : les gens doivent habiter ici, y travailler, s’y marier. Non. S’ils veulent revenir par la suite, ça ne peut être que bénéfique. La démographie, c’est important. Quand celle-ci sera en notre faveur, alors on verra le territoire renaître. J’aime combattre les a priori. Avant de rejoindre Dunkerque en 2013, je travaillais pour une société américaine. Culturellement, ça n’a rien à voir. Donc il faut un peu gratter, être curieux, et défendre le maillot à la manière d’un joueur de foot. Nous jouons pour la Côte d’Opale.

Patrick Gheerardyn, vous quittez vos fonctions de délégué général le 31 décembre prochain, que comptez-vous faire après ?

PG : Je cesse mes fonctions le 31 décembre. Je pars en retraite selon la formule consacrée. Cela dit, je suis un homme du territoire. J’habite la Côte d’Opale et je continuerai d’y habiter, et de m’investir dans son intérêt mais sous une autre forme. Bien entendu, je resterai en contact avec les amis et les collaborateurs de cette belle organisation pour continuer autant que de besoin à leur apporter quelques connaissances historiques que j’ai sur certains dossiers. Je resterai un homme engagé au service du territoire.

FH : Même si Patrick ne sera plus salarié du Medef, il y a un certain nombre de mandats qu’il va continuer à exercer.

Dès le 1er janvier, Franck Hélias vous serez donc le nouveau délégué général. Comment se passe cette transition ?

FH : Ce qu’on a voulu, c’est une transition de qualité pour nos adhérents et notre équipe.

PG : Franck monte en puissance. Pour tout dire, depuis la rentrée, il assume l’opérationnel. Il a pu découvrir l’équipe qu’il a autour de lui. Il peut en apprécier aujourd’hui les compétences et je suis sûr qu’il saura, avec son talent, donner pleine confiance aux collaborateurs.

Quelle est votre ambition pour ce territoire Franck Hélias ?

FH : Modestement, notre ambition c’est d’apporter un service aux entreprises du territoire. Au niveau local, on souhaite que ces entreprises se développent et que les nouvelles soient accueillies le mieux possible. Aujourd’hui, on a des relations très en amont avec certaines d’entre elles alors que les chantiers n’ont pas encore démarré. On fait tout un travail d’accueil et d’accompagnement pour qu’elles ne regrettent pas leur choix. Le tout, c’est de créer un environnement favorable pour leur développement. J’ai connu la région à la fin des années 80 et je peux dire qu’il y a eu un certain nombre d’évolutions, notamment le rapprochement entre les villes de la côte. Moi, je suis assez optimiste pour que cela se prolonge, afin d’avoir une vision un peu plus euro-régionale. On est au cœur de l’Europe, mais parfois elle paraît lointaine. Peut être que dans trente ou quarante ans ce sera moins étanche. Evidemment le Brexit nous alarme, mais on ne sait pas si ce sera un épiphénomène ou non.

Vous partagez ce point de vue Patrick Gheerardyn ?

Le 31 décembre Patrick Gheerardyn quitte ses fonctions de délégué général du Medef Côte d’Opale, mais continuera d’exercer d’autres mandats.

PG : S’il y a bien une région qui peut se dire au cœur de l’Europe, c’est bien nous ! Nous avons un rôle éminent à jouer puisque nous assurons un rôle essentiel en terme d’infrastructures. Nous sommes situés sur la porte d’entrée du continent avec le corridor numéro 2, mer du nord – mer méditerranée. Le port de Dunkerque l’a bien compris. Calais également. Ils travaillent ensemble au sein de NorLink, l’instance de concertation entre les ports maritimes et les ports intérieurs. Eurotunnel est en première ligne. Le rôle de la Côte d’Opale c’est de jouer la carte de la porte d’entrée sur le continent avec l’hinterland que constitue le nord de la France et l’est. Il y a un véritable enjeu de conquête, de reconquête de l’hinterland. Avec le Havre bien sûr.

 

Patrick Gheerardyn, en trente ans, qu’est-ce-qui a changé sur ce territoire ?

PG : Indéniablement ce qui a changé, c’est l’intégration économique et sociale croissante entre les villes du littoral. Ce sont des villes qui historiquement, voire sociologiquement, sont très différentes l’une de l’autre. Boulogne est une ville plutôt picarde, Dunkerque est flamande et Calais est une ville d’entrée sur le continent. Ces différences culturelles se sont estompées grâce à l’intégration du littoral sur le plan administratif et économique. Nous avons une Université Littoral Côte d’Opale qui y a contribué et des administrations comme la DREAL. Il y a également des infrastructures – l’autoroute a16 – qui ont grandement facilité les communications entre les villes. J’ai connu un temps où il fallait passer dans les centres-villes pour aller d’une agglomération à une autre. Tout ça a participé à l’intégration des trois villes. Ensuite, il y a le rôle joué par les grands aménageurs qui prennent pleinement conscience de leur implication dans le territoire. Aujourd’hui, le grand port maritime de Dunkerque, le port de Calais et Eurotunnel sont conscients d’avoir un impact sur la Côte d’Opale. Et puis il y a également les réseaux d’entrepreneurs qui ont fabuleusement explosé. Bref, j’ai connu un temps ou les villes fonctionnaient de façon cloisonnées. Maintenant la question qui se pose, c’est celle d’une intégration un peu plus poussée au plan politique, ou pas.

De quelle opération ou de quel dossier êtes-vous le plus fier ?

PG : Grâce au soutien des différents présidents, on a pu être l’un des premiers acteurs économique et social sur la Côte d’Opale. Nous avons été précurseurs par rapport aux CCI, et au Syndicat Mixte Côte d’Opale devenu aujourd’hui Pôle Métropolitain de la Côte d’Opale. Le Medef a joué son rôle en réunissant deux organisations territoriales qui étaient différenciées. Pour moi, c’est une grande fierté, parce qu’il a fallu convaincre les autres et ça n’a pas toujours été évident, mais nous l’avons fait.

Avez-vous des regrets ?

PG : Au bout d’une trentaine d’années de carrière on a tendance à oublier les choses négatives, ou les dossiers pas encore aboutis. L’affaire qui ne l’est pas encore suffisamment, c’est de faire une IUMM Côte d’Opale…