Ourse tuée dans les Pyrénées: prison avec sursis requise contre le chasseur
Quatre mois de prison avec sursis ont été requis mercredi à Foix à l'encontre d'un chasseur de 81 ans, poursuivi pour "destruction d'espèce protégée" après avoir accidentellement abattu l'ourse Caramelles, lors d'une battue au sanglier...

Quatre mois de prison avec sursis ont été requis mercredi à Foix à l'encontre d'un chasseur de 81 ans, poursuivi pour "destruction d'espèce protégée" après avoir accidentellement abattu l'ourse Caramelles, lors d'une battue au sanglier non autorisée, en 2021 dans les Pyrénées.
Dans son réquisitoire devant le tribunal correctionnel de Foix, le procureur Olivier Mouysset a également réclamé des suspensions du permis de chasse et des amendes à l'encontre des seize chasseurs ayant participé à cette battue "sans autorisation" dans la réserve du Mont Valier, en Ariège, le 20 novembre 2021.
L'octogénaire auteur du tir fatal "a pris sciemment le risque d'une confrontation avec l'ourse dans la réserve, qui est une zone de quiétude" pour cet animal, a affirmé le magistrat, qui a aussi requis contre lui deux ans d'interdiction de port d'arme.
Invité à relater les circonstances qui l'avaient conduit à presser la détente ce jour-là, l'homme avait assuré mardi qu'il n'avait pas eu le choix, après avoir été attaqué et grièvement blessé par l'ourse dans cette zone escarpée à 1.300 mètres d'altitude. C'est la première fois qu'un homme est blessé par un ours dans les Pyrénées depuis des dizaines d'années.
"Elle m'a attrapé la cuisse gauche, j'ai paniqué et j'ai tiré un coup de carabine. Elle a reculé en grognant, elle m'a contourné et m'a mordu le mollet droit, je suis tombé, elle me bouffait la jambe, j'ai réarmé ma carabine et j'ai tiré. Elle est morte cinq mètres plus bas", avait-il raconté au tribunal.
Préjudice environnemental
Lors des plaidoiries des parties civiles, les associations écologistes ont demandé réparation du préjudice environnemental, de façon collective.
François Ruffié, avocat de l'Association pour la sauvegarde et la protection des animaux sauvages (ASPAS), a demandé au tribunal de condamner solidairement les 16 prévenus à verser 175.000 euros, l'équivalent du coût de la réintroduction d'un ours.
Il a pointé des "imprudences et négligences" et lancé aux chasseurs prévenus: "vous êtes les gardiens" de la biodiversité, "nul n'est censé ignorer la loi et les limites de la réserve".
L'ours est en voie d'extinction dans le massif pyrénéen, malgré un programme de restauration de la population lancé dans les années 1990.
Relaxe demandée
L'avocat de la défense, Charles Lagier, demande la relaxe des prévenus. Son client, dit-il, "a tué une ourse car il n'avait pas d'autre solution, il se trouvait en état de nécessité. Cela n'appelle pas de récriminations pénales".
Il a pointé une défaillance des services de l’État. L'absence de l'ONF et de l'OFB au procès est "un obstacle à la manifestation de la vérité, estime l'avocat de la défense. Ils auraient dû prévenir les chasseurs de la présence de l'ours".
Mais pour l'avocate de plusieurs associations écologistes, Alice Terrasse, on voit mal "comment les 16 chasseurs pourraient ne pas être condamnés".
"Nous voulons que la faute soit actée et une réparation du préjudice environnemental. Il faut a minima qu'un ours soit réintroduit pour compenser la mort de Caramelles", a précisé Me Terrasse qui exige 100.000 euros pour financer l'opération.
Car même si ce procès n'apporte pas de réponse à cette revendication des associations pro-ours, les parties civiles, a souligné l'avocate, réclament "que l’État tienne ses engagements" et procède à de nouveaux lâchers pour compenser la disparition des ours tués par l'Homme, déjà quatre depuis 2020.
Pour l'avocat de l'organisation One Voice, Me Andrea Rigal-Casta, il "aura fallu un accident pour que l'inertie fautive soit bousculée". "Il est impératif", a-t-il insisté, "de respecter les zones de quiétude des ours, comme les réserves", notamment pour les femelles accompagnées d'oursons.
Alors qu'il avait pratiquement disparu des Pyrénées, l'ours est aujourd'hui bien présent dans le massif, où on compterait quelque 80 spécimens, majoritairement en Ariège. C'est déjà trop pour les éleveurs de brebis qui se plaignent des centaines de prédations chaque année dans les hauts pâturages.
La décision du tribunal correctionnel de Foix a été mise en délibéré au 6 mai.
372Z4P8