Mort d'un cycliste à Paris: l'automobiliste mis en examen pour meurtre et écroué

"Je n'ai jamais voulu l'écraser", a assuré vendredi l'automobiliste de 52 ans mis en examen pour meurtre et écroué, soupçonné d'avoir volontairement écrasé un cycliste de...

Des équipes de secours sur les lieux où un cycliste est mort écrasé par une voiture après un différend avec son conducteur,  le 15 octobre 2024 à Paris © Veronique Lagarde
Des équipes de secours sur les lieux où un cycliste est mort écrasé par une voiture après un différend avec son conducteur, le 15 octobre 2024 à Paris © Veronique Lagarde

"Je n'ai jamais voulu l'écraser", a assuré vendredi l'automobiliste de 52 ans mis en examen pour meurtre et écroué, soupçonné d'avoir volontairement écrasé un cycliste de 27 ans mardi en plein Paris.

"Je suis désolé de ce qu'il s'est passé. Je n'ai jamais été un voyou, je n'ai jamais fréquenté des voyous", a assuré Ariel M. lors d'une audience devant un juge des libertés et de la détention, à laquelle l'AFP a assisté.

Après avoir pleuré à plusieurs reprises au cours des débats, l'homme aux cheveux grisonnants est resté coi quand le magistrat a ordonné son incarcération.

Le parquet avait requis la détention provisoire, insistant sur "le trouble à l'ordre public". "Quelqu'un est mort, en pleine rue, et cela émeut le peuple français".

Le procureur s'est alarmé de la "dangerosité" du conducteur et d'un "risque de renouvellement pas forcément de meurtre, mais d'une commission d'infraction assez grave".

"Le trouble à l'ordre public est évident, mais c'est un homicide involontaire", a estimé l'avocat de l'automobiliste, Franck Cohen.

"C'est un dossier dramatiquement simple", avec "ce qui semble être une erreur de manœuvre ou une perte de contrôle du véhicule dans le stress et l'angoisse d'une situation conflictuelle dont il cherchait à se dépêtrer", a-t-il plaidé.

Me Cohen a balayé le profil dangereux esquissé par le procureur. "C'est un père de famille tranquille, de quatre enfants dont deux à charge, qui amenait sa fille de 17 ans à un rendez-vous chez l'ophtalmo".

Il a relaté la version des faits de son client, technico-commercial vivant en région parisienne.

"Monsieur a fait l'erreur de prendre la piste cyclable car l'ophtalmo l'attend pour sa fille et là, la victime malheureusement est là. 

Il a baissé sa vitre de voiture pour lui demander de se déplacer mais la victime s'est immédiatement mise en colère, à juste titre. La victime a frappé très fort sur le capot, puis lui a dit qu'il roulait sur son pied".

"Et là, mon client recule ! Des témoignages semblent dire qu'il aurait reculé pour prendre de l'élan, mais avec son véhicule (un SUV), on a aucunement besoin de reculer si on veut prendre de l'élan. Reculer est la preuve qu'il n'a pas l'intention de tuer", a avancé l'avocat. 

Enfin, son client "s'est arrêté" quand il a vu "dans le rétro" qu'un attroupement s'était formé. "Il a essayé de réanimer" le jeune homme à terre, "il n'y a aucun délit de fuite. Il ne se serait jamais sauvé, c'est un homme très croyant", a souligné Me Cohen.

Danger public

La version du suspect "est catégoriquement démentie par l'enquête", a réagi Yassine Bouzrou, avocat de la famille du cycliste, Paul Varry.

"Mes clients sont soulagés par la décision du juge, car ils estiment que le meurtrier est un véritable danger public. Il n'a pas hésité à tuer un homme froidement sur la voie publique devant des dizaines de témoins", a-t-il affirmé.

A ce stade de l'enquête, sept témoignages mettent à mal la version du conducteur sur ce drame, qui a eu lieu mardi à 17H45, sur le boulevard Malesherbes, dans le 8e arrondissement.

Selon ces témoignages et l'exploitation de la vidéosurveillance, "le conducteur du véhicule remontait la piste cyclable sur 200 mètres et aurait roulé sur le pied du cycliste qui se trouvait à sa gauche", avait relaté le parquet à l'issue de sa garde à vue.

Paul Varry "avait donné un coup sur le capot pour alerter le conducteur, qui aurait dans un premier temps reculé, dégageant le pied", poursuit le ministère public. 

"Le cycliste avait lâché son vélo pour se positionner à l'avant gauche de la voiture, manifestant son mécontentement. Le conducteur avait alors tourné ses roues en direction du piéton et repris une marche avant en sa direction", a-t-il ajouté. 

"L'autopsie a confirmé les marques d'un franchissement du corps par le véhicule" et "la vidéosurveillance montre une surélévation de l'avant, puis de l'arrière du côté gauche du véhicule", a précisé le parquet.

L'accident a suscité de vives réactions parmi les élus de la capitale, où les "mobilités douces", en particulier les vélos, ont pris ces dernières années une place de plus en plus prépondérante.

Vendredi, la mairie de Paris a indiqué souhaiter "qu'un lieu de Paris puisse porter le nom" du jeune cycliste. Une minute de silence sera également observée en son hommage à l'ouverture du prochain Conseil de Paris, le 19 novembre.

Des manifestations de cyclistes sont prévues samedi en France. 

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