"Mon père ne voulait pas que je sois un fils à papa !"

Son père, le fondateur, explique Didier Roth, lui a transmis le groupe familial. Mais pas tout de suite : il a fallu qu’il fasse ses armes et apprenne le métier en travaillant.

Didier Roth, dans les locaux du groupe à Petite-Forêt ; C’était lors des trente ans de l’une des filiales (Décor Peinture)
Didier Roth, dans les locaux du groupe à Petite-Forêt ; C’était lors des trente ans de l’une des filiales (Décor Peinture)
D.R.

Didier Roth, dans les locaux du groupe à Petite-Forêt. C’était lors des 30 ans de l’une des filiales, Décor peinture.

Didier Roth, 56 ans, préside depuis 2001 le groupe familial créé par son père, Armand, en 1972. Le groupe est spécialisé dans la peinture industrielle et le bâtiment1. Pourquoi les Victoires des autodidactes ? “Mon entourage a voulu me mettre en avant et m’a proposé“, dira-t-il en faisant le récit de son parcours. S’il se reconnaît des qualités, comme celle de “meneur d’hommes“, il confie que son père l’aura mis à bonne école.

L’influence du père. Son parcours professionnel a été placé, dès le départ, sous le double signe de la peinture et du bâtiment : CAP et BEP à Tourcoing ; brevet de technicien à Meaux (en 1979) ; tous ses mois d’août dans l’entreprise paternelle entre 14 et 20 ans, à Anzin à l’époque… “Mon projet, c’était vraiment de faire le même métier que mon père.” Mais, souligne-t-il, ce dernier n’a jamais voulu qu’il apparaisse comme un “fils à papa“. C’est ainsi qu’il s’est retrouvé à Lyon, dans l’entreprise Prezioso, un concurrent. 

Premier entretien d’embauche.Je me souviens de mon entretien d’embauche. M. Prezioso m’a posé trois questions. Est-ce que vous voulez reprendre l’entreprise familiale ? Est-ce que je peux vous tutoyer ? Aux deux premières, j’ai répondu oui. La troisième, c’était : tu commences quand ? Et quelques jours plus tard, il était peintre. Premier chantier : les murs d’une centrale nucléaire. Didier Roth raconte qu’on lui a très vite confié une équipe de dix personnes et qu’il est devenu conducteur de travaux en six mois. Comment l’explique-t-il ? “Mon père n’avait que le certificat d’études, mais il avait surtout un sacré tempérament, actif, pragmatique, efficace. Il me l’a transmis.” La confiance et le sens de l’action ont fait le reste.

Respect de la parole. Après ces premières armes voulues par son père, il est revenu dans le Nord. Didier Roth raconte l’histoire d’une parole donnée. “Quand j’ai quitté Lyon, mon patron avait peur que j’utilise tout ce que je savais contre lui. Mais je lui ai donné ma parole que pendant dix ans, je ferais preuve d’honnêteté vis-à-vis de lui et qu’il ne me trouverait pas en travers de son chemin. J’ai tenu parole…

Retour à la case départ. À Petite-Forêt, site actuel du groupe, Didier Roth a retrouvé son père. “Il m’a dit : maintenant tu vas apprendre à travailler. J’ai alors redémarré comme chef de chantier. Ensuite, conducteur de travaux, passage au bureau d’études des prix et devis, apprentissage du contact avec la clientèle… Et à sa retraite, en 1989, mon père, qui avait bien organisé son départ, a mis en place une direction collégiale à trois. Ce n’est donc qu’en 2001 que j’ai repris la direction totale.

Chef d’entreprise. Malgré ce parcours très initiatique, Didier Roth reconnaît que lorsque l’on arrive à la tête d’une entreprise, la connaissance du métier, les qualités de meneur d’hommes, l’instinct, la confiance que l’on inspire, c’est bien, mais ça ne suffit pas. “J’ai dû apprendre à compter, c’est-à-dire la comptabilité et la gestion. A 45 ans, je suis retourné à ‘l’école du bâtiment’ et au tournant des années 2010, confronté aux réalités de la conjoncture, un financier s’est révélé indispensable. La survie et le développement passaient aussi par une bonne gestion.” Savoir déléguer, faire preuve d’humilité, c’est essentiel, constate-t-il.  

Et l’avenir ?L’entreprise, dit-il encore, c’est le travail en équipe. Il m’a apporté mes meilleurs moments. Mais il y a aussi les nuits blanches, les doutes, la tristesse. Le pire qui puisse arriver, c’est l’accident du travail grave. La plaie ne se referme jamais… Mon rêve, c’est bien sûr de transmettre à mon tour à mes enfants. Mais, pour tout ce que je viens de dire, je ne leur imposerai rien…

1. La SAS familiale, que préside Didier Roth, a son siège à Petite-Forêt. Elle comprend un ensemble d’entités indépendantes (créées ou reprises) spécialisées dans la peinture industrielle et le bâtiment. Elle représente un groupe d’environ 140 personnes, après la reprise de Dheedene,à Seclin cet automne.

Infos sur http://roth.fr