Médine, européennes: à gauche, une rentrée dans le dur

Les quatre partis de la Nupes ont fait jeudi leur rentrée politique en ordre dispersé, sur fond de désaccords au sujet des élections européennes et de polémique autour du rappeur...

Le premier secrétaire du PS Olivier Faure g) etle député insoumis Manuel Bompard (d), le 21 septembre 2022 à l'Assemblée nationale, à Paris © Thomas SAMSON
Le premier secrétaire du PS Olivier Faure g) etle député insoumis Manuel Bompard (d), le 21 septembre 2022 à l'Assemblée nationale, à Paris © Thomas SAMSON

Les quatre partis de la Nupes ont fait jeudi leur rentrée politique en ordre dispersé, sur fond de désaccords au sujet des élections européennes et de polémique autour du rappeur Médine qui accentue les tensions à gauche.

Point d'orgue de cette première journée, l'artiste controversé est attendu aux journées d'été des écologistes dans sa ville natale du Havre, pour une "explication de texte" à 18H45 avec la secrétaire générale d'EELV Marine Tondelier.

Un véritable clash-test pour la patronne des Verts, dont l'invité vedette est depuis deux semaines au coeur d'une polémique pour son tweet jugé antisémite à l'encontre de l'essayiste Rachel Khan, juive et petite-fille de déportés qualifiée de "resKHANpée".

"Une erreur" que Médine a reconnue mercredi dans la presse, affirmant que "l'antisémitisme est un poison (qu'il) combat depuis longtemps", pour mieux fustiger un "antiracisme de salon" qui cherche à "discréditer la gauche à travers (lui)".

Pas de quoi ramener le calme à EELV, dont plusieurs ténors ont pris leurs distances avec la direction, de Yannick Jadot à Sandrine Rousseau, en passant par les maires écolos de Bordeaux et Strasbourg.

La tête de liste aux européennes, Marie Toussaint, a enfoncé le clou en affirmant que son parti s'est "tendu un piège" tout seul.

"Cette polémique, on s'en serait bien passé", a admis Mme Tondelier, qui "en assume la responsabilité" et soutient que ces "désaccords s'expriment en toute transparence et avec beaucoup de bienveillance". 

Les militants non plus ne cachent pas leur embarras. "C'est pas les journées d'été de Médine", proteste Gabriel Sampaio, 46 ans dont une douzaine chez EELV. "Ses propos n'engagent que lui, nos valeurs restent les mêmes", tranche cet adhérent du Val-de-Marne.

La Lyonnaise Brigitte Alban, 64 ans et encartée depuis deux décennies, n'en pense pas moins: "On n'a pas de leçons à recevoir sur l'antisémitisme", dit-elle, observant que "tout est prétexte à saquer les écolos".

Le sentiment de gâchis domine, alors que l'événement devait servir de rampe de lancement à une campagne sans les autres forces de gauche.

Hypocrites

Partisans au contraire de l'union à tous les scrutins, les Insoumis ne se privent pas d'appuyer là où le bât blesse. 

A l'instar d'un Jean-Luc Mélenchon jugeant que "Médine n'est pas raciste" et que les Verts sont "soumis au qu'en-dira-t-on des hypocrites", et d'un Manuel Bompard dénonçant des écologistes qui "cèdent à une campagne orchestrée par l'extrême droite et reprise par la macronie".

Point d'états d'âme au contraire à LFI, "heureuse" comme Mathilde Panot d'accueillir à son tour le rappeur, victime d'une "cabale ignoble", samedi à son université d'été dans la Drôme.

La cheffe des députés insoumis entend insister sur les vertus d'une "liste unique" aux européennes, qui pourrait selon elle damer le pion à la majorité et à l'extrême droite. "Sinon la Nupes n'aurait plus de matérialité", prévient-elle.

Mais leurs alliés ne l'entendent pas ainsi et récoltent des accusations de "double langage", en particulier le numéro un du PS Olivier Faure vivement interpellé sur X (ex-Twitter) par M. Mélenchon qui lui a reproché des "choix sectaires" notamment aux prochaines élections sénatoriales, où LFI a été exclue des accords conclus entre le PS, les Ecologistes et le PCF.

Des tensions qui fragilisent la coalition, mais "personne n'est assez fort pour casser notre union", affirme Mme Tondelier, pour qui ceux qui s'adonnent aux "provocations" se placent "en dehors du jeu collectif".

Moins optimiste, le sénateur PS Patrick Kanner observe que "la confiance est en train de s'effriter entre les partis composant la Nupes" et considère que Jean-Luc Mélenchon doit "accepter qu'il y ait d'autres légitimités que celle de l'élection présidentielle".

Les socialistes, qui se réunissent à Blois à partir de vendredi autour de la reconquête des "classes populaires", n'ont pas encore annoncé de liste autonome aux européennes, mais ils semblent en prendre le chemin. 

L'ex-président François Hollande, farouche opposant d'Olivier Faure et d'une liste commune Nupes aux européennes, y sera aussi de passage, invité en amont de l'université d'été par les socialistes anti-LFI pour parler de l'Ukraine et de l'Europe. 

Et son ancien Premier ministre Bernard Cazeneuve, qui a quitté le PS à cause de l'alliance avec LFI, tend la main à son ancien parti, dans le Figaro, pour retrouver l'unité des socialistes aux Européennes.   

De leur côté, les communistes se retrouveront à Strasbourg autour de leur secrétaire national Fabien Roussel, et de leur tête de liste aux européennes, Léon Deffontaines, mais sans Médine, qui sera à l'affiche de la Fête de l'Humanité en septembre.

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