Mathieu Roumens, fondateur de Joyeuse (conteuses pour enfants) : «Il y a une grande tension sur le marché des composant…

«Pour les soutenir les détaillants indépendants, nous avons lancé une carte de France interactive pour lister toutes les boutiques qui font du click & collect», assure Mathieu Roumens, fondateur de Joyeuse.
«Pour les soutenir les détaillants indépendants, nous avons lancé une carte de France interactive pour lister toutes les boutiques qui font du click & collect», assure Mathieu Roumens, fondateur de Joyeuse.

Créée en mai 2017, la start-up Joyeuse fabrique des conteuses à histoires pour les enfants. Mathieu Roumens, son dirigeant et cofondateur, revient sur la période cruciale de Noël pour les ventes et les difficultés d’approvisionnement liées à la crise sanitaire et économique, ainsi que sur les mesures sanitaires appliquées dans l’entreprise.

 Comment est née Joyeuse et quels sont ses produits ?

C’est en observant mes enfants âgés de 1 et 3 ans que j’ai pris conscience de la force maléfique des écrans. Lors d’une formation en design thinking, où chacun était invité à résoudre un problème de son quotidien, a germé l’idée de fabriquer une conteuse pour enfants : je voulais trouver autre chose qu’un smartphone à mettre dans les mains de mon aîné pour écouter des histoires. En 2018, je me suis associé à Marie Garidou et Valérie Latour-Burney pour lancer la conception industrielle de notre conteuse au sein de la PME nantaise Seico. Le produit est doté du label Origine France, garantissant que 70 % de sa valeur a été créé dans l’Hexagone. Les conteuses sont commercialisées sur des plateformes type Amazon ou Greenweez et chez 150 détaillants indépendants. Pour les soutenir, nous avons lancé une carte de France interactive pour lister toutes les boutiques qui font du click & collect. La conteuse est également commercialisée auprès des distributeurs habituels (Cultura, Fnac, Oxybul, Bonhomme de Bois et Nature & Découvertes). Nous avons tiré les leçons du premier confinement et avons basculé toutes les opérations de vente et de promotion en digital et mis en place notre propre e-shop avec une solution logistique dédiée.

Avez-vous rencontré des difficultés d’approvisionnement liées à la crise ?

Nous aurons écoulé cette année 40 000 produits. In fine, on va doubler les ventes par rapport à 2019 ! Nous sommes sur une catégorie de jouets en plein développement, c’est une chance. On tire notre épingle du jeu car notre produit est considéré comme intelligent par les parents dans le sens où il constitue une véritable alternative aux écrans et stimule les capacités intellectuelles, émotionnelles et sensorielles des enfants. Mais nous n’avons pas commandé suffisamment de matières premières et, à la veille de Noël, nous sommes obligés de refuser des commandes de distributeurs qui se retrouvent donc en rupture de stock. Nous avions, par exemple, fait fabriquer 5 000 «Première conteuse merveilleuse», notre nouveau produit destiné aux 0-2 ans, et aurions dû prévoir le double, voire le triple en termes de production. Notre produit contient beaucoup de composants électroniques et leur approvisionnement doit s’anticiper trois à six mois à l’avance. Nous avons passé les commandes en avril et en juin et avons eu du mal à apprécier le bon volume de ventes avec la crise. J’ai essayé de passer une nouvelle commande en dernière minute sur des marchés parallèles, mais les composants coûtaient le double du prix habituel. La crise nous a donc impacté à la fois en termes de visibilité et au niveau logistique avec la pénurie sur des composants électroniques clés pour notre produit : nous avons accumulé un mois et demi de retard sur notre production. L’entreprise franco-italienne STMicroelectronics où nous nous approvisionnons pour les composants les fait fabriquer aux Philippines et a rencontré, comme beaucoup d’autres acteurs, des problèmes d’approvisionnement. Au final, c’est toute l’industrie qui a été pénalisée.

Quelle organisation de l’entreprise avez-vous adoptée pour ce deuxième confinement ?

Nous sommes tous -les six collaborateurs de l’entreprise-, en télétravail. Nous avons maintenu une réunion hebdomadaire en physique le lundi après-midi, pendant deux à trois heures dans une grande salle au sein de Pépinière 27 à Paris où se trouvent nos locaux. Nous respectons les gestes barrières : on porte tous un masque, on respecte une distance géographique et on ouvre les fenêtres. De mon côté, je suis obligée de me rendre régulièrement dans notre usine de fabrication, à Nantes, pour vérifier la qualité des produits. Cela ne peut pas se faire à distance ! Pour communiquer au sein de l’équipe, nous avons pris l’habitude d’organiser des «scrums» tous les matins à 9 heures. Ce terme, qui vient du rugby, signifie «mêlée.» Le principe : on prend la parole à tour de rôle pour expliquer ce que l’on a fait la veille, ce sur quoi on a buté, si on a besoin de quelque chose pour avancer et ce que l’on prévoit de faire le jour-même. Ce quart d’heure pris tous les matins nous permet d’avoir un contact humain quotidien, même s’il reste désincarné. Parfois, on déborde un peu sur le timing pour aborder des problématiques plus personnelles. Un moyen de laisser le temps aux collaborateurs d’échanger comme s’ils étaient au bureau. Le reste du temps, on communique beaucoup par e-mail, en one to one ou lors de conf call.

Charlotte De SAINTIGNON