Macron propose "une autonomie à la Corse", mais pas "contre l'Etat"

Emmanuel Macron a proposé jeudi à la Corse "une autonomie dans la République", en prévenant que ce "moment historique" ne se fera pas...

Le président Emmanuel Macron s'adresse aux membres de l'assemblée de Corse, le 28 septembre 2023 à Ajaccio © Pascal Pochard-Casabianca
Le président Emmanuel Macron s'adresse aux membres de l'assemblée de Corse, le 28 septembre 2023 à Ajaccio © Pascal Pochard-Casabianca

Emmanuel Macron a proposé jeudi à la Corse "une autonomie dans la République", en prévenant que ce "moment historique" ne se fera pas "sans" ou "contre" l'Etat français.

"Le statu quo serait notre échec à tous", a insisté le président de la République, venu clore 18 mois de discussions qui avaient débuté après l'explosion des violences insulaires de 2022, consécutives à la mort du militant indépendantiste Yvan Colonna, agressé en prison où il purgeait une peine à perpétuité pour l'assassinat du préfet Erignac en 1998.

"Nous devons avancer et il faut pour cela l'entrée de la Corse dans notre Constitution", a-t-il commencé. Avant de lancer: "Ayons l'audace de bâtir une autonomie à la Corse dans la République". S'exprimant à Ajaccio devant l'assemblée de Corse, contrôlée par les nationalistes, Emmanuel Macron a cependant averti: "Ce ne sera pas une autonomie contre l'Etat, ni une autonomie sans l'Etat".

Il a ensuite répondu, souvent indirectement, aux principales demandes fondamentales exposées par les nationalistes dans une résolution adoptée par 75% des voix de l'assemblée de Corse le 5 juillet dernier.

A la demande de co-officialité de la langue corse, le président a seulement précisé qu'il souhaitait que celle-ci "puisse être mieux enseignée et placée au cœur de la vie de chaque Corse", via la création d'un "service public de l'enseignement du bilinguisme".

Sur le souhait d'un "statut de résident", pour lutter contre la dépossession foncière, Emmanuel Macron a reconnu qu'il y avait une "situation immobilière et foncière insoutenable", appelant à l'établissement de "dispositifs, notamment fiscaux", pour lutter contre la spéculation immobilière. Mais ce "tout en respectant notre droit européen", a-t-il ajouté.  

Concernant la volonté nationaliste de voir la notion de "peuple corse" inscrite dans la Constitution, il a seulement proposé qu'une "communauté insulaire, historique, linguistique et culturelle" y soit reconnue.

Satisfait et prudent

Enfin, sur le souhait de confier un pouvoir législatif à l'assemblée de Corse, le chef de l'Etat a appelé à "rendre plus simple et plus effectif le droit d'adaptation et le droit d'habilitation", se déclarant "favorable" à ce que l'île puisse "définir des normes sur des matières transférées". Mais cela "sous l'autorité du Conseil d’Etat" et du "Conseil constitutionnel", a-t-il spécifié.

Concrètement, il a donné "six mois" aux groupes politiques corses, des indépendantistes à la droite, pour arriver à un "accord" avec le gouvernement menant à un "texte constitutionnel et organique" qui pourrait alors être présenté à Paris.

L'attente était immense sur l'île de Beauté, dirigée par les nationalistes depuis huit ans.

"Le statut d'autonomie que nous appelons de nos vœux s'inscrit au sein de la République française", avait promis de son côté Gilles Simeoni, président autonomiste de l'exécutif de Corse, en accueillant le chef de l'Etat.

 "Il y a une ouverture, mais tout reste à faire", a-t-il ensuite commenté à Bastia.

L'autonomie et "l'inscription de la Corse dans la Constitution", cela ne "changera rien" au "quotidien des habitants corses", a pour sa part assuré à l'AFP Fabien Roussel, le chef du parti communiste, en marge de ces commémorations qui se sont poursuivies en fin de journée à Bonifacio.

Pour Paul-Félix Benedetti, leader du parti indépendantiste Core in Fronte, Emmanuel Macron "n'a pas eu de mots forts", a-t-il écrit sur X (ex-Twitter).

Après ce volet politique, le président a donc rendu hommage aux Corses résistants à l'occasion du 80e anniversaire de la libération de l'île de Beauté, le premier territoire français libéré, le 4 octobre 1943. 

A midi, à la citadelle d'Ajaccio, il a salué la mémoire du résistant corse Fred Scamaroni, avant d'aller saluer celle de Danielle Casanova, résistante communiste corse morte en déportation à Auschwitz. "On vient célébrer les héroïnes et les héros pour ne jamais les oublier", a-t-il dit à des enfants d'une école voisine, avant un bain de foule dans la bonne humeur.

Le chef de l'Etat s'est ensuite rendu à Bastia, pour une prise d'armes. Il y a remis les insignes de chevalier de l'ordre national du Mérite au dernier tirailleur marocain encore en vie, Salah Ben El Hadj, 104 ans, venu spécialement du Maroc.

Le chef de l'Etat a conclu sa visite à Bonifacio (Corse-du-Sud), où il a dévoilé, en présence de Fabien Roussel, des plaques rendant hommage au résistant communiste Albert Ferracci, dans un collège qui porte désormais son nom.

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