Lumière sur l’aquaculture en région
La Picardie et le Nord-Pas-de-Calais sont unies depuis longtemps par la filière aquaculture. La pisciculture d’eau douce dans ces régions est presque exclusivement représentée par l’élevage des salmonidés : truite arc-en-ciel en grande majorité, truites fario, ombles de fontaine et ombles chevalier. Bien élevés pour le meilleur du goût, les poissons d’aquaculture de Picardie séduisent.
Le Cipa, Comité interprofessionnel des produits de l’aquaculture, créé le 16 décembre 1997, regroupe les organisations professionnelles représentatives de la filière piscicole. Tous les acteurs de la pisciculture marine et continentale, producteurs, transformateurs et fabricants d’aliments, sont ainsi représentés au sein d’une même interprofession. En Picardie et dans le Nord, la plupart des sites piscicoles sont implantés à l’amont des cours d’eau de bonne qualité. Certains utilisent les eaux souterraines qui présentent une qualité physico-chimique et sanitaire particulièrement favorables pour la salmoniculture et notamment pour les premiers stades de développement du poisson. Les truites sont généralement acheminées vivantes aux clients : grossistes, parcours de pêche et sociétés de pêche, industries de transformation. Les truites destinées à la consommation directe se retrouvent sur l’étal du poissonnier moins de 48 heures après l’abattage en atelier de transformation. L’aquaculture continentale des régions Picardie et Nord-Pas-de-Calais se place au 3e rang national derrière l’Aquitaine et la Bretagne, avec environ 6 500 tonnes de truites produites par an sur plus de cinquante piscicultures.
Développer les territoires ruraux picards
La production est essentiellement réalisée dans la Somme où coexistent de grandes unités de production et des piscicultures de petite taille axées sur des marchés de proximité. Alors que plusieurs régions françaises ont accusé une baisse sensible de production ces dernières années, les pisciculteurs de Picardie ont mieux maintenu leur production, restant ainsi dans le trio de tête des régions aquacoles du pays. La région présente de nombreux atouts pour le développement de la pisciculture continentale, aussi bien en matière d’environnement qu’en matière de débouchés commerciaux, permettant d’envisager sereinement le développement de ce secteur. « Alliant tradition et modernité, la pisciculture régionale est aujourd’hui une économie rurale saine, dynamique et compétitive. Certaines piscicultures possèdent de petites unités de transformation et de conditionnement du poisson. D’autres participent pleinement à la vie économique régionale en proposant une activité de pêche loisir, en organisant des visites de leur élevage ou disposant d’un “magasin” de produits régionaux à base de truite sur le site. Citons l’entreprise de fabrication d’aliments pour l’aquaculture, Trouw France dans l’Aisne ou le centre de formation aquacole d’Éclusiers Vaux dans la Somme », explique Marc Lamothe, président du Cipa.
En finir avec les idées reçues
Régulièrement le Cipa organise des déjeuners-tables rondes autour des poissons d’aquaculture de nos régions. L’un des derniers a eu lieu au lycée hôtelier Saint-Martin d’Amiens. Au programme : présentation par Tugdual Debéthune, chef du centre culinaire contemporain, de l’étude réalisée pour le Cipa sur la caractérisation culinaire et sensorielle de la truite et du bar, et dégustation à l’aveugle de recettes imaginées et réalisées par les élèves du lycée hôtelier d’Amiens sous la houlette du chef. La truite nature et fumée, le bar et la daurade sont passés tour à tour entre les papilles expertes de restaurateurs et des grossistes picards présents afin de découvrir le goût des poissons d’aquaculture de leur région préparés selon des modes de cuissons différents. Les pisciculteurs présents ont ensuite pu expliquer comment ces poissons nés d’un travail rigoureux et respectueux offrent le meilleur du goût. « En entrée, j’ai apprécié la truite fumée pour son aspect et son goût, ainsi que la belle couleur rosée du produit. Elle offrait une très bonne tenue en bouche, une texture fine et délicate, conforme à mes attentes. J’ai préféré le turbot sauvage pour sa texture en bouche, mais j’ai mieux noté le turbot d’élevage sur l’odeur et le goût. D’où l’importance de la cuisson sur la texture de la chair, le turbot d’élevage demandant une cuisson moindre. J’ai eu plus de difficultés à choisir entre le bar d’élevage et le sauvage, les deux poissons étaient très proches. La différence d’appréciation s’est faite principalement sur le goût. L’élevage a obtenu une meilleur note que le sauvage au final », résume Nicolas Chauveau, chef au restaurant amiénois le Quai, spécialiste des poissons et grand adepte des produits frais. Philippe Renou, gérant de la pisciculture du Moulin Du Roy et président du syndicat des pisciculteurs salmoniculteurs du Nord, présent à sa table, insistait sur le besoin d’un soutien plus important et une aide au développement de la filière : « L’aquaculture française est en danger, plusieurs régions ont accusé une baisse sensible de production ces dernières années, les pisciwculteurs de Picardie et du Nord-Pas-de-Calais ont réussi à maintenir leur production mais nous avons besoin du soutien des pouvoirs publics pour continuer à nous développer ! ». Mais Philippe Renou reste optimiste : « Je constate que l’opinion sur l’aquaculture française a beaucoup évolué, nos produits sont très bien jugés et leur qualité est reconnue. Nous avons le soutien des consommateurs qui plébiscitent des poissons élevés près de chez eux, notre vocation est de leur offrir ce choix ».
La filière aquacole picarde en quelques chiffres :
– 3 500 tonnes produites par an en Picardie (10% production française)
– 32 sites de production
– 20 entreprises
– 100 emplois directs
– Commercialisation : 60% grossistes, 30% pêche loisir, 10% pour transformation, repeuplement, négoce, détail.