Loi immigration: la majorité sous haute tension
Sommée de s'accorder sur une version durcie du projet de loi immigration, la majorité est soumise depuis lundi à de fortes tensions, une partie des députés, à la gauche de Renaissance et au MoDem, n'étant...
Sommée de s'accorder sur une version durcie du projet de loi immigration, la majorité est soumise depuis lundi à de fortes tensions, une partie des députés, à la gauche de Renaissance et au MoDem, n'étant pas prête à un compromis à tout prix.
C'est un effet secondaire du vote de la motion de rejet sur le projet de loi immigration, lundi: le mistigri de la division est passé de la droite à la majorité.
En décidant de réunir une commission mixte paritaire sénateurs-députés, lundi prochain, le gouvernement a accepté de repartir de la copie du Sénat. Avec le risque, si le texte issu de la commission est trop à droite, qu'une partie des députés de la majorité ne le vote pas.
Si le groupe Horizons, du nom du parti présidé par Edouard Philippe, s'est dit en accord avec la version du Sénat mi-novembre, Renaissance et le MoDem ont vivement marqué leur désaccord, et le texte a été largement détricoté en commission des lois de l'Assemblée. La dernière version assouplissait notamment les conditions de régularisation de travailleurs sans papiers exerçant dans des métiers en tension.
Prenant la parole mardi devant l'intergroupe de la majorité, la Première ministre Elisabeth Borne a dit ne pas vouloir d'un compromis "au détriment de l'unité de la majorité".
Mais force est de constater que celle-ci est mise à mal, comme l'a montré selon plusieurs participants une réunion du groupe Renaissance présidée par Sylvain Maillard mercredi soir à l'Assemblée.
L'organisation d'un vote "surprise" pour confier un mandat de négociation au rapporteur général du texte Florent Boudié a mis le feu aux poudres, au point que l'ancienne ministre Nadia Hai a quitté la réunion en claquant la porte en signe de protestation.
D'autant que certains participants ont pu comprendre "en cours de route" que le vote valait engagement à approuver le texte dans l'hémicycle en cas de CMP conclusive.
"Je suis extrêmement choqué par cette procédure" faite pour "tordre le bras de tous ceux qui ne seront pas dans la ligne. On n'a jamais fait ça depuis sept ans !", s'indigne un député macroniste de la première heure.
OPA de droite
In fine, une écrasante majorité des présents a cependant voté pour accorder ce mandat de négociation, seuls quatre députés se disant contre, selon des participants.
Depuis lundi, l'exécutif pousse la majorité à accepter un compromis avec la droite, en prenant acte de sa défaite dans l'hémicycle.
"Quel est le seul moyen aujourd'hui pour qu'une telle loi passe ? C'est de reprendre la version du Sénat", en la faisant évoluer sur l'AME (Aide médicale d'État) et les conditions d'accès aux aides sociales, a par exemple expliqué le ministre de l'Economie Bruno Le Maire.
Le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin a lui jugé "évident" jeudi "qu'on doit se rapprocher du texte du Sénat".
Un député Renaissance issu de la droite partage ce point de vue: "Des députés disaient mercredi soir +nous on votera pour si c'est le texte de l’Assemblée+… Ben il s’est passé des trucs depuis quand même,(...) qui ressemblent quand même à un échec de notre part. Donc il faut en tenir compte".
"L'ambiance n'est pas bonne" au sein du groupe Renaissance, tranche un de ses membres. "Une partie des députés veulent faire une OPA de droite sur la ligne du groupe", grince cette source, pointant une divergence de lignes entre les députés de 2017 et les nouveaux arrivants de 2022, pour beaucoup issus de la droite.
Un autre député soupçonne une "frange du groupe" de vouloir "hâter la réalisation" du scénario d'une "convergence" de la droite et de la majorité.
Les députés de l'aile gauche de Renaissance pourraient trouver du renfort auprès de ceux du MoDem, qui défendent un "compromis sans compromission".
"Nous sommes attachés au texte issu de la commission des lois, dont il faut rester le plus proche possible", a estimé la députée MoDem Maud Gatel.
Les trois groupes de la majorité se sont réunis jeudi soir en présence d'Elisabeth Borne, sans beaucoup avancer. "Beaucoup ont dit à la Première ministre qu'ils réservaient leur vote", en attendant de savoir sur quoi ils devront se prononcer, selon une participante. "Notre groupe est un peu inquiétant car il semble très divisé", a témoigné une députée Renaissance.
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