L’inquiétude croît chez les PME
Questionnements sur la réalisation du plan de relance, crainte du «mur de la dette», durcissement des mesures sanitaires… L’inquiétude monte chez les PME, à laquelle s’efforce de répondre Bercy.
«L’État ne laissera tomber personne.» Le 28 septembre, à Bercy, Bruno Le Maire, ministre de l’Économie présentait le PLF 2021, projet de loi de Finances, qui inclut le plan de relance. Mais avant tout, il a tenu à réaffirmer le soutien de l’État aux petites et moyennes entreprises. Car l’inquiétude grandit : le durcissement des mesures sanitaires, en particulier à Marseille, ainsi qu’à Paris et dans dix métropoles, annoncées, le 23 septembre, par Olivier Véran, ministre de la Santé, ont fait l’effet d’une douche froide auprès des petites entreprises, dont la trajectoire de reprise s’interrompt brusquement. Il s’agit d’un «sacré coup de massue», a réagi sur Europe 1 François Asselin, président de la CPME. L’État a prévu des mesures d’accompagnement pour les entreprises concernées par les nouvelles mesures de fermeture administrative, notamment via le fonds de solidarité. La situation n’en est pas moins préoccupante, à en suivre l’enquête de la CPME auprès de ses adhérents (menée avant les annonces du 23 septembre). Les prévisions des PME pour «les six derniers mois de l’année 2020 doivent nous alerter : près de la moitié (47 %) des dirigeants interrogés estiment que la pérennité de leur TPE-PME est -au moins potentiellement- menacée», précise la CPME. Plus de la moitié des dirigeants ont observé une baisse de leur CA en juillet et août, et le tiers, une dégradation de leur trésorerie. Pour la suite, leurs inquiétudes se concentrent sur leur trésorerie. En effet, depuis le début de la crise, plus de la moitié des répondants ont bénéficié d’un report de charges fiscales et sociales (57 %) et 54 % du prêt garanti par l’État (PGE). Parmi ceux-ci, 28 % estiment ne pas être en capacité de rembourser ces charges et 34 % auront des difficultés à rembourser le PGE. Pour faire face à ce «mur de la dette», la CPME propose la mise en place d’un «prêt consolidation» qui permettrait de regrouper ces échéances et de les rembourser à moyen terme. C’est l’une des solutions avancées par François Asselin, le 23 septembre, devant la délégation aux Entreprises du Sénat. Cette dernière avait organisé une table ronde consacrée aux conséquences de la situation sanitaire pour les entreprises et au plan de relance.
«Qui pilote ?»
Ce jour-là, Pierre Goguet, président de CCI-France, Chambres de commerce et d’industrie, François Asselin, président de la CPME (Confédération des petites et moyennes entreprises), Joël Fourny, président de CMA-France, qui regroupe les chambres de métiers et de l’artisanat et Olivier Schiller, administrateur du METI, Mouvement des entreprises de taille intermédiaire, auditionnés, se sont rejoints sur un constat : celui d’une reprise aux effets très inégaux. Ainsi, Pierre Goguet a souligné la «grande dispersion» des situations. Au sein d’un même secteur, comme le nettoyage, une PME peut avoir bien traversé la crise ou la subir de plein fouet, selon que sa clientèle soit hôtelière ou non. Autre position partagée par les représentants d’entreprises, une opinion globalement très positive sur les mesures d’urgence mises en œuvre par Bercy, dès le mois de mars. «Le gouvernement a bien fait le job», a notamment résumé Olivier Schiller, pour le METI. Concernant le plan de relance, en revanche, les représentants de ces entreprises nourrissent deux types d’inquiétudes. Tout d’abord, sur ses modalités d’applications : «On peut avoir les meilleures intentions du monde si l’intendance ne suit pas, cela ne vaut rien (…). Nous sommes en attente forte de méthodologie. Qui pilote ? Comment cela va se passer ?» a ainsi déclaré François Asselin. Avec Joël Fourny, il redoute que les petites entreprises ne bénéficient pas de dispositifs trop complexes qui ne parviendraient pas à les toucher. Autre souci majeur, celui du «mur de dettes», auquel risquent de se heurter les petites entreprises. En plus du «prêt consolidation», les représentants d’entreprises ont proposé une évolution des normes comptables permettant de traiter les prêts au titre des capitaux propres, comme pour les prêts participatifs, et non pas comme des dettes qui entraînent une dégradation de la cotation Banque de France. Ils ont également demandé une inscription dans la durée de la baisse des impôts de production. Autant d’inquiétudes auxquelles Bercy a tenté de répondre ce 28 septembre. «Il n’y aura aucune augmentation d’impôt», a promis Bruno Le Maire. Quant à la réalisation du plan de relance, elle est confiée aux préfets et aux présidents de régions. «Les crédits commencent à être décaissés», a également précisé le ministre de l’Économie. L’appel à projet concernant la rénovation des bâtiments publics est lancé, avec échéance fixée au 9 octobre.