Les propositions des notaires face à la crise du logement
Permis de construire, cahiers des charges des lotissements, statut du bailleur privé, décote sur l’achat d’un logement social, vente en viager à un héritier, financement de la rénovation énergétique… Le Conseil supérieur du notariat a récemment présenté plusieurs propositions de réformes en matière immobilière.
Alors
que le Conseil national de la refondation (CNR) logement vient de
formuler quelque 700 propositions et que la Première ministre,
Élisabeth Borne, a annoncé une vingtaine de mesures pour faire face
à la crise du logement en France (prolongation
du dispositif de prêt à taux zéro jusqu’en 2027, extension de la
caution publique pour les locataires, développement du bail réel
solidaire…), le Conseil supérieur du notariat (CSN) a
présenté, le 7 juin dernier, cinq
propositions en matière de logement. Ces dernières constituent une
partie de l’ensemble des préconisations qui seront débattues et
votées par la profession, fin septembre, lors de son prochain
congrès, à Deauville, consacré au thème du logement.
Des
mesures d’ordre structurel pour s’adapter à un «changement
d’ère»
Il
s’agit de réagir au «changement d’ère» qui
s’opère depuis quelques mois, a expliqué Edouard
Grimond, porte-parole du CSN en charge de l’immobilier, lors
de la présentation de ces propositions à la presse. Baisse des
volumes de ventes, stagnation des prix de ventes – voire baisse
dans certains secteurs tels que l’immobilier ancien en
Ile-de-France –, quasi-absence des primo-accédants dans les
opérations, du fait de nombreux refus de prêt, marché du neuf à
l’arrêt… «Après avoir connu des sommets, nous
atterrissons, un peu violemment peut-être.» La profession émet
des propositions d’ordre structurel destinées «à faire
évoluer l’arsenal juridique existant», et donc
«complémentaires à celles retenues par le gouvernement»
qui sont «des mesures budgétaires et financières
d’urgence pour relancer l’activité immobilière», a
précisé Yves Delecraz, en
charge de la présidence du 119e congrès des notaires.
Faciliter
la délivrance des permis de construire
Une
première proposition vise à encourager le recours au processus de
concertation avec les administrations, les habitants et les
associations, pour réduire les délais d’instruction des demandes
de permis de construire et limiter les recours contre ces
autorisations. Ce processus de concertation, qui est déjà prévu
par les textes, est aujourd’hui peu utilisé et de façon variable
selon les communes. Les notaires souhaitent donc que cette pratique,
qui doit rester facultative, se généralise.
Faire
évoluer le contenu des cahiers des charges des lotissements
Nombre
de cahiers des charges de lotissements, qui sont des documents
contractuels privés et modifiables uniquement à l’unanimité,
contiennent des dispositions contraignantes qui entravent les projets
de construction. Les maires ont la possibilité de mettre ces cahiers
des charges en concordance avec les plans locaux d’urbanisme. Les
notaires proposent de faciliter et de développer cette pratique pour
faire en sorte que ces derniers se limitent à fixer les règles de
vie au sein du lotissement, et ne soit pas des documents d’urbanisme.
Rendre
le statut du bailleur privé plus cohérent et plus attractif
Pour
rendre l’investissement locatif plus attractif, dans le neuf comme
dans l’ancien, la profession préconise de substituer aux
différents statuts actuels un régime uniforme laissant le choix au
bailleur d’opter pour le statut de loueur professionnel ou de
particulier (avec les règles fiscales associées en matière de
revenus et de plus-values), qu’il s’agisse de location nue ou de
location meublée. Il ne serait alors plus nécessaire de meubler un
bien pour bénéficier du statut de loueur professionnel et du régime
fiscal associé.
Maintenir
dans le temps la décote accordée lors de l’acquisition d’un
logement social
Pour
favoriser l’accession à la propriété, les organismes de logement
social proposent à leurs locataires d’acheter le logement qu’ils
occupent à un prix décoté. Or, ce système peut constituer un
effet d’aubaine dans la mesure où il permet parfois aux acquéreurs
de réaliser d’importantes plus-values dès la première revente,
au prix du marché, alors que ce n’est pas l’objectif visé.
Les notaires suggèrent
d’imposer, lors des reventes, la même décote que celle accordée
initialement pour faire en sorte que le bien reste sur le marché du
logement intermédiaire.
Élargir
la vente en viager au cadre familial
Pour
faciliter la solidarité familiale face à la dépendance des
personnes âgées, les notaires préconisent de modifier les règles
concernant la vente d’un logement en viager à un de ses héritiers,
pour éviter que les cohéritiers ne s’y opposent et pour limiter
les risques de voir l’opération requalifiée en donation déguisée.
Ils proposent également de créer un prêt viager hypothécaire
familial.
Faciliter
le financement de la rénovation énergétique au niveau des
copropriétés
Enfin, pour faire face aux difficultés de financement que pose la lutte la lutte contre les passoires thermiques et, en particulier, la profession réfléchit actuellement aux moyens de répondre aux problématiques que cela entraîne au niveau des copropriétés. «C’est un sujet complexe sur lequel nous devons encore travailler, mais nous ferons des propositions en ce sens, lors du congrès», a déclaré Yves Delecraz, en précisant que toutes les réflexions de la profession n’étaient pas encore finalisées et étaient susceptibles d’évoluer d’ici là.