Les promoteurs s’inquiètent de l’avenir
Mises en chantier et ventes de logements neufs en diminution… sur cette conjoncture morose, les mesures gouvernementales en faveur du logement ne seront pas suffisantes pour encourager les investisseurs, d’après le promoteur immobilier, Nexity.
«L’horizon des 500 000 logements semble s’éloigner toujours plus», estime Bruno Corinti, PDG immobilier résidentiel chez Nexity, promoteur immobilier. Lors d’une conférence de presse, le 2 octobre à Paris, la société a présenté son analyse de la politique gouvernementale, via les dispositions de la loi de Finances 2014 et de la loi Alur (Accès au logement et urbanisme rénové), adoptée le 17 septembre, en première lecture, à l’Assemblée nationale. Ont également été présentés le point semestriel sur la conjoncture du logement et une étude sur le rôle des collectivités dans l’accession à la propriété. Pour l’essentiel, la politique gouvernementale en matière de logement est loin de susciter l’enthousiasme chez Nexity. Déception, par exemple, sur les plus-values des terrains à bâtir : le promoteur aurait préféré un dispositif qui taxe d’autant moins les propriétaires pour qu’ils vendent rapidement. En revanche, les limites posées aux recours en contentieux «nous vont bien, même si on les trouve trop timides», commente Bruno Corinti. Quant aux dispositions sur la baisse de la TVA de 7 à 5 % dans les zones Anru (Agence nationale pour la rénovation urbaine), «c’est un élément assez positif», juge Bruno Corinti, qui attend la confirmation définitive de la baisse de la TVA sur le logement social ainsi que la publication des décrets sur les mesures concernant le logement intermédiaire. Les modifications du régime de taxation des plus-values vont «dans le bon sens. D’après les notaires, cela ferait repartir un peu les ventes dans l’ancien», note Bruno Corinti. Les Français pessimistes Ces mesures sont destinées à s’appliquer à un secteur dont l’activité diminue. Pour 2013, Nexity prévoit environ 75 000 réservations de logements neufs des promoteurs, soit 16 % de moins que l’année précédente. Quant aux mises en chantier et aux permis de construire, ils affichent tous les deux des baisses à deux chiffres, entre 2012 et 2013. Seul élément favorable de la conjoncture, les taux d’intérêt qui restent «historiquement bas», pour l’expert immobilier : 3,2 % (hors assurance) sur vingt ans, en juillet 2013. Mais cette donnée ne suffit pas à encourager les acheteurs privés. «Le diagnostic des Français sur le logement reste sombre», commente Fabienne Simon, directrice générale adjointe d’Ipsos secteur public, qui présentait le baromètre «Les Français et le logement». D’après ce dernier, plus de 80 % des personnes estiment qu’il est aujourd’hui difficile de trouver un logement. Un sondé sur trois déclare avoir renoncé à un projet de déménagement à cause des prix, qu’il s’agisse de location ou d’achat. Et cela n’a rien d’étonnant : 23 % disent vivre sur leurs économies ou à crédit. Néanmoins, «il y a une légère décrispation des perceptions», juge Fabienne Simon. D’après le sondage, les Français ont une vision nuancée de l’état du marché, percevant la diversité des situations locales. À ce titre, plus de la moitié d’entre eux considèrent que la politique du logement devrait être territorialisée, notamment au niveau des inter-communautés.
Les collectivités et l’accession à la propriété
Dans les faits, la territorialisation de la politique de l’immobilier existe déjà. C’est ce que montre une étude sur le rôle des collectivités locales dans l’accession à la propriété, réalisée par des étudiants du master d’affaires urbaines de Science Po, «en étroite collaboration » avec Nexity, explique Brigitte Fouilland, responsable du master. Aujourd’hui, cette étude montre que les collectivités utilisent essentiellement deux leviers : les aides aux ménages et les aides aux constructeurs. La première forme d’intervention est la plus utilisée, via des prêts à taux faible ou nul, ou des subventions. C’est la politique adoptée à Marseille, notamment. Annecy a opté pour l’aide aux constructeurs, en minorant le coût du foncier. Mais il est également possible de mettre en place des chartes pour réguler les prix. C’est l’option choisie par Saint-Ouen (Seine-Saint-Denis). Cette commune soumise à une forte pression des prix, du fait de sa proximité avec la Capitale, a signé une charte avec une trentaine de promoteurs sur le respect du prix moyen et plafond. Quant à Rennes Métropole, elle établit des réserves foncières, pour mieux maîtriser son développement urbain. Une politique de long terme.