Entretien avec Guillaume Curnier, directeur de la région Nord chez BNP Paribas
«Les PGE illustrent un besoin important d'ancrage territorial»
Alors que ses clients traversent une crise de grande ampleur, BNP Paribas met un point d'honneur à les accompagner dans la poursuite de leur activité. Guillaume Curnier, directeur de la région Nord chez BNP Paribas, envisage une reprise de l'activité au second semestre 2021 et encourage les entrepreneurs à investir.
La Gazette Nord-Pas-de-Calais. Comment ressentez-vous l'état d'esprit de vos clients professionnels (52 500 clients professionnels sur les Hauts-de-France et la Normandie) ?
Guillaume Curnier. Les deux confinements ne se ressemblent pas. Après l'effet de sidération en mars et un arrêt de 70 % des activités, l'activité s’est davantage maintenue au second confinement, hormis pour certains secteurs et notamment celui des hôtels, cafés et restaurants (HCR). Depuis le début de la crise sanitaire, nos équipes accompagnent chacun de nos clients pour analyser avec eux leurs besoins et trouver les solutions les plus adaptées. Et nous avons constaté, malgré le contexte, une vraie tonicité des entreprises. Toutefois, si le rebond a été fort après le premier confinement, le second a donné un vrai coup de blues aux chefs d'entreprise.
Les chefs d'entreprise dénoncent parfois un manque de lisibilité dans les démarches d'aides qu'ils peuvent effectuer.
L'Etat et l'ensemble des responsables économiques ont été disponibles et à l'écoute mais il peut néanmoins être difficile pour certaines entreprises, notamment les TPE, de savoir vers quel interlocuteur elles peuvent se tourner pour obtenir le soutien dont elles ont absolument besoin en cette période. Je pense particulièrement au secteur HCR, avec de nombreuses PME / TPE – un secteur qui représente 5 % du PIB national, mais beaucoup plus en emplois – avec sa dimension humaine très forte et qui souffre beaucoup. Nous devons rassurer les dirigeants sur l’issue de la crise car les études montrent que les Français ont envie de consommer. L’enjeu est de tenir encore quelques mois… et de préparer la reprise et le rebond. Je suis résolument optimiste pour 2021 et notamment sur le second semestre avec une relance de la consommation, du tourisme...
Par quels moyens ?
Nous avons constaté l'explosion de l'épargne forcée et/ou de précaution sur les comptes des particuliers pendant les périodes de confinement (on évoque le chiffre de 200 milliards d'euros en France). Notre rôle, au-delà du soutien à la consommation, est également de transformer l’épargne des Français en y apportant une approche de long terme, en soutien au capital des entreprises, avec un nouveau paradigme rendement-risque-liquidité-sens.
Qu'en est-il des créations d'entreprises ? Ont-elles subi un déclin ?
Le rythme de créations a un peu ralenti, mais nous observons dans le même temps une baisse de l'ordre de 30% des mandats de redressement, liée à l'effet des PGE et au soutien marqué de l'Etat. Certaines entreprises se sont fortement endettées pendant la crise, et logiquement nous pouvons anticiper une augmentation des défaillances au second semestre 2021. Les PGE ont permis d’apporter de la liquidité mais également de la sérénité nécessaire aux chefs d'entreprise. Nous encourageons les dirigeants à se projeter davantage dans l’avenir : renforcement des fonds propres, accélération de la digitalisation, consolidation sectorielle… Nous constatons une forte demande de nos clients sur ces sujets.
Les banques prônent l'ouverture du capital. Pourquoi ?
En cinq ans, les mentalités ont évolué. Ouvrir son capital permet de renforcer la structure du bilan mais également d'aller plus vite dans la croissance. Les dirigeants sont davantage à l’écoute sur le sujet, quel que soit le secteur d'activité.
Du point de vue des particuliers, le besoin de digitalisation va crescendo. Est-ce la fin annoncée des agences ?
Pas du tout. Le PGE a illustré de manière encore plus importante le besoin de proximité et d'ancrage dans le territoire. Le réseau d'agences est rassurant pour les clients. Nous avons 180 agences sur le territoire régional, six centres de banque privée et deux centres d'affaires. Il n’y a pas d’inflexion dans le rythme de fermetures, car nous croyons fortement dans le réseau de proximité, essentiel pour nos clients. Tout comme nos recrutements : pour 2021 nous prévoyons pour la zone Nord un volume de recrutements équivalent à celui de 2020, soit une centaine de CDI notamment au sein du réseau d’agences et de la banque en ligne. La crise a montré l’importance de la relation de proximité entre un client et son banquier qui le soutient, l’écoute, le conseille et le rassure. Si j'avais un message à faire passer aux entrepreneurs, je leur dirais que 2021 est le moment pour eux d'accélérer leur croissance, de renforcer leur capital humain, de reprendre les investissements et d'analyser leurs besoins en haut de bilan.