Les noces de la musique et de la philosophie
Concerts, conférences musicales, rencontres : la septième édition de ce festival conjuguera les sens et l’esprit lors d’un week-end surprenant. Car du 31 août au 2 septembre, musiciens et philosophes dialogueront autour des rythmes et de la pensée pour le plus grand bonheur des spectateurs. Bref aperçu de deux événements du festival.
Pour la septième édition de ce festival unique en Europe, le programme réunira musiciens, chanteurs, philosophes et comédiens pour trois jours de spectacles, de rencontres inédites, de réflexion et de débats dans des lieux patrimoniaux uniques au cœur de la ville : la Cathédrale Notre-Dame, la cour et les jardins de l’Évêché, la Halle aux Draps ou le Musée des Beaux-Arts. L’édition 2018 aura pour thème «Changer de mondes» avec une soirée d’ouverture en deux parties : Marc Ysaye, fondateur du groupe belge Machiavel et directeur de la radio Classic 21, décryptera d’abord les grands moments de l’histoire du rock. Des Rolling Stones, à Led Zeppelin, en passant par Jimi Hendrix ou Jim Morisson, ces musiciens sont partis en Orient à la recherche de sensations et de sons nouveaux. Une quête initiatique et psychédélique dont ils reviendront avec des compositions originales qui marqueront leurs albums. Répondant aux propos de Marc Ysaye, Francis Métivier interprétera à la guitare des extraits musicaux, décodant les rapports entre rock et philosophie. Puis un concert-spectacle intitulé Salam’ Rock ! associera musiciens belges et marocains pour créer une musique purement fantasmée lorsque notre imaginaire européen s’aventure sur les terres d’Afrique du nord, d’Orient …
Le musicien et le philosophe
La cathédrale de Tournai accueillera l’un des événements de la manifestation : une création autour de la tumultueuse histoire de Wagner et de Nietzsche. Laquelle commence par une sorte d’amitié amoureuse, Nietzsche comparant Wagner à Eschyle, l’Opéra total à la naissance de la Tragédie. Cependant, quelques années plus tard, Nietzsche écrit Le cas Wagner, une diatribe à la fois furieuse et parfois d’une extrême lucidité contre son ancienne passion. Que s’est-il passé entretemps ? Sur scène, derrière deux pupitres, se tiendront d’un côté Wagner, paradoxalement joué par le philosophe Alain Badiou, et de l’autre Nietzsche, plus raisonnablement incarné par l’acteur Denis Lavant, le duo accompagné par l’orchestre symphonique de la Chapelle musicale de Tournai. Agencés comme un drame, ce sont des textes tirés de la correspondance des deux antagonistes, ou des pamphlets de Nietzsche, que liront le philosophe et l’acteur. Une lecture ponctuée par des œuvres de Wagner telles que l’ouverture des Maîtres Chanteurs de Nuremberg ou l’ouverture de Parsifal.
Lors d’un spectacle singulier intitulé L’impureté créatrice, un philosophe, un comédien, des chanteurs et un pianiste vont entremêler la philosophie et les arts. La philosophie s’est toujours située dans un langage impur : Platon utilise ainsi dans ses ouvrages les ressources du théâtre mais aussi celle de la poésie ou des mathématiques. Du côté des arts, l’impureté existe tout autant. Des exemples frappants sont ceux du lied allemand ou de la mélodie française pendant le XIXe siècle car la «mise en musique» de grands poèmes suscite l’interrogation : comment faire consonner ces deux registres ? Le philosophe Alain Badiou liera entre elles dix mélodies écrites par sept musiciens sur les vers de cinq grands poètes tels Berlioz et Chausson sur des œuvres de Théophile Gauthier, Duparc sur deux chefs-d’œuvre de Baudelaire ou Fauré et Debussy sur Mandoline de Verlaine. Une création en complicité avec l’acteur François Marthouret qui lira les poèmes et les musiciens Karim Gharbi, Joëlle Charlier et Dorian Dumont pour l’interprétation des mélodies.
Enfin le célèbre accordéoniste Richard Galliano donnera un concert autour du thème de l’exil. L’exil, c’est une histoire d’hommes mais aussi celle d’un instrument, l’accordéon, parti au XIXe siècle de sa Sicile natale pour des horizons musicaux plus vastes. Compagnon d’infortune des exilés, des marins, des nomades, «le piano du pauvre» ensoleille les bals des faubourgs parisiens, sème ses notes à la Nouvelle Orléans, inspirateur du blues cajun, puis glisse de la polka musette brésilienne au tango argentin, mariant ses harmonies à celles de son cousin, le bandonéon. Ce concert est un hommage à tous ceux qui, partis malgré eux, n’ont pas renoncé…
Renseignements et réservations au 00 32 69 25 30 80 ou sur www.lesinattendues.be