Les entreprises financent les transports en commun

Après Dunkerque, Calais. La gratuité totale des transports en commun dans l’agglomération calaisienne a été annoncée récemment par Natacha Bouchart, présidente de l’Agglo et maire de Calais. Le Syndicat Intercommunal des transports du Calaisis (SITAC) va revoir son programme d’investissement. Le transport collectif en site propre ne devrait pas en faire les frais.

Les transports en commun du Calaisis gratuits dès le 1er janvier 2020.
Les transports en commun du Calaisis gratuits dès le 1er janvier 2020.

La gratuité a un coût. Patrick Gheerardyn, délégué général du Medef Côte d’Opale, n’en revient pas : «On ne peut pas parler de transport gratuit : les véhicules, les voies, les personnels, ça se paie. Au bout du compte, ce sont les entreprises qui financent cela. Ce n’est pas gratuit pour elles…» Au-delà des récriminations récurrentes des entreprises (celles de plus de 11 salariés qui y sont assujetties) à l’égard d’ une taxe qui plombe la masse salariale, la pilule reste dure à avaler. En effet, le SITAC (Syndicat Intercommunal des transports du Calaisis) a des comptes qui font tiquer les entreprises taxées : en 2017, le report d’excédent a dépassé les 7 millions d’euros. De quoi offrir les transports aux habitants et aux touristes de l’Agglomération, et d’augmenter le cadencement de «12 à 14%» selon le vœu de Natacha Bouchart, maire de Calais. Quand le versement transport a été porté à son maximum de 2% de la masse salariale, Natacha Bouchart avait argué du projet de transport en site propre (TCSP). En avril 2017, le président du SITAC, Philippe Mignonnet, par ailleurs adjoint au maire de Calais, présentait les perspectives de l’établissement public dédié aux transports avec 40 millions d’euros d’investissements programmés : le pôle multimodal et le futur TCSP (de l’Hôpital au Fort-Nieulay), projet confié au groupement Ingerop conseil et ingénierie, Bruno Remoué et Associés, Studio Nemo, Ceryx et V2R. «Les premiers coups de pioche devraient avoir lieu fin 2018», indiquait alors l’élu.

«Il est entendu de pouvoir utiliser à terme le versement transport pour financer la gratuité»

Transport en site propre «décalé»

Guy Allemand, maire de Sangatte-Blériot et vice-président du SITAC, se veut quant à lui rassurant : «Le projet TCSP n’est pas supprimé mais décalé. La passerelle piétonne du pont Mollien fait partie des investissements du TCSP. Il n’y a pas de notion de fléchage dans l’utilisation de la taxe du versement transport. Le choix des élus s’est opéré dans la mesure où il est entendu de pouvoir utiliser à terme le versement transport pour financer la gratuité et bien évidemment, honorer les investissements du TCSP à un terme plus étalé.» En 2017, le SITAC affichait un budget de 34 millions d’euros (fonctionnement et investissement), dont 80% proviennent de la taxe du versement transport payée par les entreprises privées et publiques, soit plus de 27 millions d’euros. Le ratio des salariés qui empruntent ces transports pour se rendre au travail n’est pas estimable en l’absence d’étude territoriale. À titre de comparaison, la billetterie plafonne à 10%. Des véhicules sont par ailleurs en voie d’être renouvelés. Caroline Matrat, initiatrice de l’idée de la gratuité à Calais et conseillère municipale, précise que le taux de 2% du versement transport est lié au projet de TCSP : «Il nous faut avoir commencé les travaux pour conserver ce taux de 2%. On sait qu’on ne pourra pas aller au bout du projet en l’état : on met en sommeil le TCSP, mais on le poursuit.» Les réserves du SITAC devraient continuer à grimper jusqu’à ce que les travaux commencent. Une baisse du versement transport est loin d’être à l’ordre du jour.

Contactés à plusieurs reprises, Natacha Bouchart et Philippe Mignonnet n’ont pas donné suite.

Le périmètre du SITAC

Le Syndicat intercommunal des transports en commun de l’agglomération du Calaisis regroupait dix communes en 2017 : Calais, Coquelles, Coulogne, Marck, Sangatte, Fréthun, Les Attaques, Nielles-lès-Calais et Hames-Boucres ainsi que Guînes. La petite commune d’Escalles, au pied du cap Blanc-Nez, les a rejoints la même année, élargissant ainsi le périmètre des routes à couvrir, les dénivelés, pour découvrir un site touristique grandiose.