Les entreprises doivent privilégier un management de proximité
La crise de la Covid-19 a imposé la pratique massive du télétravail dans un délai très court et sous la contrainte. Les entreprises ont déployé plateformes et outils collaboratifs pour s’adapter. Par la suite, le travail collectif à distance pourrait devenir la norme, avec 87% des télétravailleurs qui souhaitent poursuivre le télétravail après la crise*.
«Ce n’est pas la fin des RH ni la fin du management de proximité, bien au contraire !», relève Benoît Serre, directeur associé du Boston Consulting Group (BCG) et vice-président de l’ANDRH (Association nationale des DRH), lors d’un webinaire organisé par News Tank et Exclusive RH, le 19 mai. «Il a fallu cette distanciation sociale et ce ‘stress test’ pour se rendre compte de l’importance du management de proximité. La crise va nous pousser à faire de la proximité». La généralisation du travail à distance dans la plupart des organisations a permis de révéler les nouvelles règles et les compétences nécessaires aux managers : les qualités humaines, d’attention, de bienveillance et d’accompagnement liées au management de proximité sont essentielles.
Le rôle des managers ? Préparer, expliquer et reconfigurer le travail. Autre dimension toute aussi importante, l’organisation du travail. «Il n’est pas question de chercher à reproduire l’organisation que les salariés avaient au bureau. Cela ne peut pas fonctionner avec les mêmes règles. Les managers doivent prendre en compte les difficultés et contraintes de chacun. C’est d’autant plus important que les salariés ont le sentiment de travailler plus qu’auparavant», explique Benoît Serre. En cause notamment, l’absence des pauses conviviales et salutaires pour se détendre, comme le font les salariés lorsqu’ils sont en entreprise.
Passer des coups de fil d’attention
«Ce n’est pas parce que l’on avait installé le télétravail sur le plan technique qu’il était facile de passer en télétravail permanent», explique Benoît Serre. Si BCG, qui compte plus de 90 bureaux dans 50 pays, permet depuis longtemps déjà à ses collaborateurs de travailler à distance, le télétravail confiné et contraint en full time, imposé par le Covid-19 a été une vraie épreuve. Première étape, doter les équipes des équipements techniques adéquats. Si les outils digitaux permettent de maintenir les liens, reste à encourager les collaborateurs à s’en servir. Au-delà de ces considérations technologiques, pour conserver un lien direct avec les collaborateurs, le «bonjour comment ça va ?», reste la première clé, relève Marc Gosselin, DRH du groupe mutualiste Arkéa. Ainsi, chaque manager doit s’attacher à cette attention en veillant à passer des coups de fil, à envoyer un mail ou une attention positive à ses collaborateurs pour éviter qu’ils s’isolent. «C’est le pendant du bonjour. Même si les collaborateurs sont chez eux, cela ne doit pas empêcher les managers de prendre soin d’eux». D’autant que l’on ne peut pas imaginer les situations psychologiques et personnelles de chacun. La meilleure façon de savoir comment ils vont est de leur poser la question. L’idée : avoir «des palpeurs actifs au sein de l’organisation pour s’assurer que tout va bien». Ainsi, chez Arkéa, les 1 700 managers ont chaque jour contacté un membre différent de leur équipe, non pour des réunions de travail, mais simplement pour prendre leur pouls.
Retrouver de la convivialité
Au-delà du bien-être individuel, c’est le bien-être collectif auquel il faut aspirer. L’un des premiers critères de qualité de vie au travail étant l’ambiance et les relations avec les collègues pour 49% des salariés (selon une étude de Malakoff Médéric), il est d’autant plus indispensable dans le cadre du télétravail d’entretenir ces liens. «C’est à l’entreprise de les reconstituer. C’est une opportunité pour la fonction RH et les managers de l’entreprise, affirme Benoît Serre. Il faut s’assurer que le collectif et l’esprit d’entreprise demeure, indépendamment de l’activité travail». Ainsi, le cabinet international de conseil en stratégie a permis à ses collaborateurs d’organiser des échanges sur d’autres sujets que celui du travail pendant cette période. Au sein de la start-up Accretio, plateforme de services RH, derrière les journées de travail s’organisaient des plannings et des échanges «pour amener les collaborateurs qui ont un vrai besoin de lien à mieux se connaître», confie Samy Aloulou, son vice-président.
Dernier enseignement positif de la crise, «le confinement et le déconfinement ont permis aux collaborateurs de retrouver de l’affection pour leur entreprise et leurs collègues. Eloignés de leur quotidien et de leur environnement de travail qui participent en temps normal à leur équilibre de vie, le rapport des salariés à l’entreprise et leurs rêves ont changé», constate Marc Gosselin. Ils ont besoin d’un collectif de travail et veulent retrouver de la convivialité. Il est donc essentiel de solidifier ce collectif et de leur donner une bonne raison de travailler ensemble. Or, pour l’heure, «seuls 29% des salariés s’estiment engagés dans leur travail. Ils sont engagés pour A, font B et sont évalués sur C», regrette Samy Aloulou.
* enquête de l’Anact, Agence nationale pour l’amélioration des conditions de travail.