Les éditeurs demandent d'interdire la pub télé pour les livres, le ministère persiste

L'organisation professionnelle des éditeurs a appelé mercredi le gouvernement à interdire la publicité télévisée pour les livres, mais le ministère de la Culture a indiqué à l'AFP...

Dans une librairie éphémère à Nantes (Loire-Atlantique), le 1er février 2024 © LOIC VENANCE
Dans une librairie éphémère à Nantes (Loire-Atlantique), le 1er février 2024 © LOIC VENANCE

L'organisation professionnelle des éditeurs a appelé mercredi le gouvernement à interdire la publicité télévisée pour les livres, mais le ministère de la Culture a indiqué à l'AFP qu'il croyait fermement à ses bénéfices.

Prenant position sur un décret du 5 avril qui autorise cette publicité à titre expérimental pendant deux ans, le Syndicat national de l'édition (SNE) a publié un communiqué pour demander "son abrogation".

Ce décret "inquiète les professionnels de l'édition qui craignent une fragilisation du secteur et un appauvrissement de la création littéraire" au profit des best-sellers, pour lesquels les gros éditeurs ont les moyens de payer les publicités, a-t-il rapporté.

Le ministère de la Culture avait ouvert en janvier et février une consultation publique sur cette mesure, dont les résultats n'ont pas été rendus publics. Puis le décret a été publié au Journal officiel d'une manière qui, selon le patron du groupe Madrigall Antoine Gallimard, a "surpris" tout le secteur.

Le SNE a indiqué qu'il s'était "déclaré défavorable" lors de cette consultation, afin de ne pas "déséquilibrer une filière du livre qui vaut par sa très grande diversité".

Pas d'unanimité

Mais, d'après le ministère de la Culture, l'organisation patronale n'a pas répondu dans les délais. "Ils ne pouvaient pas, parce qu'ils n'avaient pas d'unanimité sur le sujet. Après de multiples relances, ils nous ont envoyé un bref message, hors délai", a indiqué à l'AFP une source au sein de ce ministère.

"Nous ne croyons pas que les éditeurs aient été surpris. Nous les avions prévenus à l'issue de la consultation que nous allions autoriser cette publicité", a ajouté cette source.

Le gouvernement compte mener l'expérimentation jusqu'au bout des deux ans. "L'objectif n'est pas du tout de faire des cadeaux aux télévisions, comme on l'a lu, mais d'élargir le lectorat, en faisant de la promotion du livre sur d'autres canaux. Ces télévisions comprennent bien que c'est une politique publique", a souligné le ministère.

La ministre Rachida Dati avait défendu sa mesure le 12 avril en estimant que des lecteurs pourraient "franchir le seuil d'une librairie (...) pour acheter un best-seller et repartir avec trois autres livres sous le bras".

Une seule maison d'édition a diffusé un spot télévisé depuis: les éditions XO, sur BFMTV. Elles revendiquent n'avoir "cessé de militer" pour cette forme de publicité.

Libraires "fermement opposés

L'organisation des libraires, le Syndicat de la librairie française, tient la même position que les éditeurs. "Avec l'ensemble de la filière, nous avons toujours été fermement opposés à la publicité télévisée pour les livres. Et nous l'avons réaffirmé lors de la consultation publique", expliquait son délégué général, Guillaume Husson, à l'AFP lundi.

Le ministère de la Culture a répondu vouloir apaiser ces craintes. "La mesure n'enlève rien aux librairies indépendantes, au contraire, puisqu'elle vise à élargir le nombre de lecteurs", a précisé la source.

Une fédération d'organisations représentatives d'auteurs, le Conseil permanent des écrivains (CPE), et une autre organisation qui regroupe environ 400 éditeurs, la Fédération des éditions indépendantes (Fedei), ont également publié mercredi un communiqué commun contre la publicité à la télévision.

Malgré le consensus de la filière du livre, le ministère de la Culture se dit persuadé du bien-fondé de cette nouveauté.

"Des Français qui ne voient pas les affiches de promotion des livres dans le métro ou dans les rues de Paris et qui ne lisent pas les médias s'adressant aux CSP+ vont voir plus de livres à la télévision. La seule visée de cette mesure, c'est la diversité culturelle", d'après la source qui s'est exprimée auprès de l'AFP.

34PJ8BH