Les agriculteurs attendent de pied ferme les annonces du gouvernement
Que fera le gouvernement pour apaiser la colère des agriculteurs, qui multiplient blocages et manifestations ? Le Premier ministre prépare sa réponse alors que le premier syndicat de la profession réclame la prise...
Que fera le gouvernement pour apaiser la colère des agriculteurs, qui multiplient blocages et manifestations ? Le Premier ministre prépare sa réponse alors que le premier syndicat de la profession réclame la prise en compte de "l'intégralité" de ses doléances.
La mobilisation a pris de l'ampleur mercredi avec l'appel de la Confédération paysanne, troisième syndicat d'agriculteurs, classé à gauche, à la mobilisation, à la suite de la FNSEA et de la Coordination rurale à qui elle s'oppose pourtant sur de nombreux sujets.
"C'est un ras-le-bol général, ça fait des mois qu'on essaie de le dire à nos politiques mais rien ne bouge, on en a marre", déclare à l'AFP Julien Duchateau, agriculteur à Marquise (Pas-de-Calais).
Versement plus rapide des aides, ristourne immédiate sur le carburant, meilleure protection des revenus face aux pressions des industriels, opposition aux accords de libre-échange... Des annonces immédiates sont possibles.
Dans un rapport mercredi, les députés Hubert Ott (MoDem) et Manon Meunier (LFI) recommandent "la mise en place de prix planchers pour les produits agricoles", pour "assurer un revenu minimum aux agriculteurs", mesure rejetée à quelques voix près fin novembre dans le cadre d'une proposition de loi LFI.
La FNSEA, premier syndicat agricole, a elle listé ses doléances dans la soirée, réclamant des "réponses immédiates sur la rémunération" dont une aide d'urgence aux "secteurs les plus en crise", et à plus long terme, la mise en œuvre d'un "chantier de réduction des normes", assurant à l'AFP qu'ils les présenteraient "ce soir au Premier ministre".
"On parle de plusieurs centaines de millions d'euros", a reconnu son président Arnaud Rousseau auprès de l'AFP.
Gabriel Attal réunira jeudi les ministres de l'Agriculture, de la Transition écologique et de l'Economie. Il devrait faire des premières annonces jeudi ou vendredi, a-t-on appris de sources concordantes au sein de l'exécutif.
"Attendre jusqu'à vendredi pour avoir des annonces, c'est prendre beaucoup de risques. Plus on attend, plus il va falloir qu'elles soient costaudes, les mesures", s'inquiète Karine Duc, co-présidente de la Coordination Rurale de Lot-et-Garonne.
Dans ce département, à Agen, la tension est montée d'un cran mercredi en fin de journée: des membres de la Coordination rurale, classée à droite de la FNSEA, ont brûlé paille et pneus devant la préfecture, dont les grilles ont été maculées de lisier, sous les yeux de forces de l'ordre impassibles.
Une "dégradation" condamnée par Yohann Barbe, représentant vosgien de la Fnsea, interrogé sur BFMTV: "Ce n'est pas justifié et ce n'est pas utile, surtout, pour avoir un débat démocratique".
"Ne cédez pas à la tentation de certains de semer le trouble", a appelé Arnaud Gaillot, président des Jeunes agriculteurs (JA) lors d'une présentation en direct sur X.
Modération" policière
Le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin a donné mercredi soir des consignes de "grande modération" aux préfets, leur demandant de ne faire intervenir les forces de l'ordre qu'en "dernier recours".
Une "mansuétude" déjà soulignée par l'écologiste Yannick Jadot, alors que la porte-parole du gouvernement Prisca Thevenot a assuré qu'il n'était "pas question de venir empêcher" les blocages routiers.
Ces actions se sont multipliées mercredi et doivent se poursuivre jeudi, sur les autoroutes, les rocades et les ronds-points. Malgré les désagréments causés, une grande majorité des Français (87%) approuve leur mobilisation, selon un sondage Elabe publié mercredi, et l'ensemble de la classe politique reconnaît la crise.
Cultivateurs et éleveurs partagent un même malaise sur leur avenir, écartelés entre désir de produire et nécessité de réduire l'impact sur la biodiversité et le climat, sur fond de revendications très diverses: marges de la grande distribution, jachères, pesticides, normes environnementales, autorisations administratives, prix du gazole...
Endeuillé par les décès accidentels d'une éleveuse et de sa fille mardi sur un barrage routier, le mouvement dit y avoir puisé une "rage" supplémentaire.
Dans l'Oise, environ 50 tracteurs partis de Beauvais prévoient de passer la nuit sur l'A16 et n'excluent pas d'avancer vers Paris, en fonction des annonces du gouvernement.
"On veut montrer que la pression monte et qu"on veut des résultats", dit le président des Jeunes agriculteurs de l'Oise, Matthieu Carpentier.
De premiers convois de tracteurs sont aussi attendus à Provins et Coulommiers, a annoncé la FDSEA de Seine-et-Marne.
Arnaud Rousseau, président de la FNSEA, a écarté "à ce stade" un éventuel blocage de Paris.
En Côte d'Or, "une centaine" de tracteurs, selon les organisateurs, doivent se retrouver dans un champ afin de former, jeudi soir, un SOS géant avec leurs phares et lumières.
A Rennes, une manifestation est organisée dans la matinée devant la préfecture de région par le syndicat Coordination rurale. Des pêcheurs pourraient aussi se joindre à la protestation.
En Occitanie, point de départ de la grogne agricole la semaine passée, l’A64 (Toulouse-Bayonne) est toujours coupée à hauteur de Carbonne, à 40 km de la ville rose, pour la huitième journée consécutive, tandis que le blocage débuté lundi des accès de la centrale de Golfech (Tarn-et-Garonne) se poursuit.
Parmi les nouveaux blocages prévus mercredi soir ou jeudi matin: l'A13 en Normandie, l'A1 au sud de Lille ou le péage de Béthune, sur l'A26.
Le bio chute
Entré dans la mobilisation, la Confédération paysanne qualifie toutefois les dirigeants de la FNSEA de "pompiers pyromanes" et critique leur approche productiviste, via leur coporte-parole dans le Vaucluse , Laurent Théron.
"Le changement climatique nous impacte beaucoup et c'est pour ça que les normes (bio ou haute valeur environnementale) sont utiles", remarque Vincent Desalles, 50 ans, agriculteur et viticulteur dans le Vaucluse. "Mais les prix que nous propose le marché en ce moment sont la moitié du coût de production", regrette-t-il, appelant à un prix minimum pour les produits labellisés.
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