Les acteurs agricoles recrutent
Premier employeur de la région, l’agriculture peine pourtant à recruter. D’après une enquête de Pôle emploi, les agriculteurs des Hauts-de-France auraient 17 200 projets de recrutement cette année.
«Au départ, j’ai commencé à chercher des saisonniers par moi-même, mais ça prend un temps fou et c’est un métier… C’est la quatrième année que je fais appel au Geiq A3 (un groupement d’employeurs pour l’insertion et la qualification, ndlr) et ça fonctionne très bien ! Ils font vraiment un super boulot, il est très rare que les profils ne collent pas», se félicite Emilie Lebel. Cette agricultrice bio, installée à Bavincourt, emploie entre 5 et 7 personnes à l’année et une vingtaine l’été. Pour rendre les emplois proposés plus attractifs, elle a notamment investi dans deux bed weeders, littéralement "lits de désherbage", pour améliorer les conditions de travail des saisonniers.
«Il est primordial de travailler sur l’accueil de nos salariés», renchérit Emmanuel Dalle, arboriculteur à Saulty. «En tant que chefs d’entreprise, nous devons accepter que les gens qui arrivent chez nous ne maîtrisent pas parfaitement les gestes et qu’il leur faut un temps d’adaptation pour monter en productivité», ajoute-t-il avant d’évoquer la propreté des installations, la mise à disposition de vestiaires ou encore les conditions de rémunération. «Nous devons leur apporter de la visibilité : ils doivent savoir quand et comment ils seront payés», note l’arboriculteur qui a recruté 25 personnes cette année.
Accompagner les agriculteurs
Pour accompagner les agriculteurs dans leur recrutement saisonnier ou à plus long terme, plusieurs organismes existent. «Pour nous, le plus important c’est la motivation et le savoir-être ; les compétences, ça s’acquiert», assure Nadège Durimel, directrice du Geiq 3A. La structure qui comptait, en 2020, 165 entreprises adhérentes et quelque 400 salariés, peine aussi à trouver des candidats. «C’est difficile. Pourtant, nous proposons des formations de six à dix-huit mois et des expériences dans des métiers très divers autour de l’agriculture. Aujourd’hui, nous avons en moyenne 50 postes à pourvoir», indique-t-elle.
L’équipe du Geiq organise les plannings en fonction des zones géographiques des salariés et peut même mettre en place du covoiturage pour lever les freins liés à la mobilité. «Il y a beaucoup d’offres saisonnières, mais nous arrivons à lier les missions pour faire travailler nos salariés tout au long de l’année», détaille Nadège Durimel. Parfois, un intérimaire, venu un peu par hasard, trouve sa voie. C’est le cas d’Achref Habibi. «Pour moi, le Geiq, c’est le pont entre la ville et la campagne. Après une réunion d’information, j’ai passé des tests et fait une semaine d’essai dans une exploitation. Je venais de la mécanique, mais pas agricole. J’ai fait une alternance, obtenu un CS machinisme avant de passer mon permis poids lourd. Ça n’a pas toujours été évident, mais l’équipe du Geiq a toujours été là, ça a été un vrai déclic pour moi», sourit celui qui a aujourd’hui décroché un CDI en mécanique agricole.
Un secteur en pleine évolution
Moins pénibles, de plus en plus techniques, les métiers liés à l’agriculture ont connu une réelle évolution ces dernières années, avec une vraie place laissée à l’innovation. «Nous sommes une région reconnue pour son savoir-faire AgTech. Nous avons aussi de gros besoins sur des postes de cadres, d’ingénieurs ou de techniciens», observe Sandrine Leleu de l’Association pour l’emploi des cadres, ingénieurs et techniciens de l’agriculture (Apecita). L’organisme a traité plus de 1 400 postes en 2020, dont plus de 70% en CDI. On estime que 10% des actifs régionaux travaillent dans la sphère agricole. «Ce sont des emplois non délocalisables qui irriguent le tissu socio-économique du territoire», rappelle d’ailleurs Francine Théret de la chambre d’agriculture du Nord - Pas-de-Calais.