Le service national universel a du plomb dans l'aile

Le Service national universel, cher à Emmanuel Macron, pourrait-il disparaître? Le gouvernement a assuré jeudi vouloir poursuivre son expérimentation à défaut de le généraliser comme prévu, au lendemain de sa suppression pure et simple en...

Des jeunes du SNU (Service national universel) assistent au défilé du 14-Juillet sur l'avenue des Champs-Élysées à Paris, le 14 juillet 2019 © LUDOVIC MARIN
Des jeunes du SNU (Service national universel) assistent au défilé du 14-Juillet sur l'avenue des Champs-Élysées à Paris, le 14 juillet 2019 © LUDOVIC MARIN

Le Service national universel, cher à Emmanuel Macron, pourrait-il disparaître? Le gouvernement a assuré jeudi vouloir poursuivre son expérimentation à défaut de le généraliser comme prévu, au lendemain de sa suppression pure et simple en commission à l'Assemblée et au Sénat. 

Le gouvernement "ne souhaite pas supprimer le Service national universel", a déclaré jeudi la porte-parole du gouvernement Maud Bregeon, mais "la situation financière telle qu'elle est aujourd'hui ne permet pas la généralisation", a-t-elle reconnu. 

Les deux chambres du Parlement ont voté simultanément mercredi dans leurs commissions des Finances respectives la suppression du SNU dans le budget de l'État, s'accordant, malgré des majorités différentes, sur sa disparition. 

"Il est temps d'abandonner" ce "gadget présidentiel" qui "ne marche pas" et "coûte cher", a jugé le député écologiste Jean-Claude Raux, rejoint par le socialiste Pierrick Courbon pour qui cette "hérésie budgétaire" a "raté sa cible". 

"Après cinq ans d'expérimentation, il n'apparaît pas que le SNU apporte une plus-value suffisante (...) pour justifier la poursuite de son déploiement", a estimé de son côté le sénateur socialiste Éric Jeansannetas dans son rapport présenté mercredi en commission - réunie à huis-clos- et consulté par l'AFP.

Le ministre des Sports et de la Jeunesse, Gil Avérous, avait lui-même reconnu mercredi devant le Sénat le peu de succès rencontré par le SNU. 

Ce dispositif lancé en 2019 par Emmanuel Macron qui en avait personnellement défendu les principes pendant sa campagne, a été repris par l'ancien Premier ministre Gabriel Attal. Il avait promis de le généraliser en 2026 aux 15-17 ans. 

Solution tiède

"Est-ce que le SNU peut être perfectionné ? Oui. Et des travaux ont été fait en ce sens. Mais soyons honnête, il n’y a pas de ministre en charge du SNU dans le gouvernement Barnier", a déploré jeudi auprès de l'AFP l'ancienne secrétaire d'Etat chargée du dossier dans le gouvernement Borrne, Prisca Thevenot, en estimant que "la solution tiède vers laquelle s'oriente le gouvernement laisse penser qu'il n'assume pas de dire +Stop+".

Le SNU comporte une "mission d'intérêt général" et un "séjour de cohésion" comprenant des activités sportives, culturelles et intellectuelles, avec des journées qui débutent par la "levée des couleurs" (drapeau et hymne national) et port de l'uniforme. 

Mais si l'objectif initial était d'attirer 66.000 volontaires en 2025 (après 80.000 en 2024), seuls 35.700 jeunes s'étaient inscrits dans l'immédiat, a rapporté Gil Avérous. Et les crédits alloués par le gouvernement sont passés de 130 à 80 millions d'euros en raison du coup de rabot budgétaire. 

Maud Bregeon a de fait admis qu'il y avait "nécessité de réinterroger le dispositif tel qu'il est conçu aujourd'hui", mais sans pour autant interrompre l'expérimentation dont les participants se disent très satisfaits, selon elle. 

Interrogé, l'entourage d'Emmanuel Macron a temporisé, en renvoyant à la position officielle du gouvernement "qui dit qu'il maintient les crédits et va évaluer" le dispositif.

Multiples difficultés

"Que les parlementaires votent cette suppression en commission, c'est quand même un signal plutôt encourageant pour la suppression du SNU, on sent bien que les lignes bougent à ce sujet", s'est réjoui de son côté jeudi Sophie Vénétitay, secrétaire générale du Snes-FSU, premier syndicat enseignant du second degré. 

Comme les autres syndicats de l'Éducation, elle réclame la réaffectation des crédits pour l'école, alors que 4.000 suppressions de postes d'enseignants sont prévues.  

Les causes du désamour pour le SNU ont plusieurs origines, le coût n'étant pas le moindre en période de disette budgétaire. 

Selon la Cour des comptes, dans un rapport publié en septembre, si le dispositif venait à être généralisé à une classe d'âge (environ 850.000 jeunes par an), son coût pourrait représenter entre 3,5 et 5 milliards d'euros. 

Les Sages avaient également déploré qu'en "matière de mixité sociale comme d'engagement, les ambitions du dispositif ne (soient) pas atteintes" et repéré les "multiples difficultés" de déploiement du SNU, notamment sur l'"identification de lieux d'hébergement susceptibles d'accueillir des mineurs dans le respect des jauges prévues par le cahier des charges, les conditions de recrutement" ou encore la "rémunération des encadrants, le transport des jeunes vers et depuis les centres". 

"Le rapport de la Cour des comptes a été le dernier clou dans le cercueil du SNU", souffle un ministre, pour qui c'"était une bonne idée, mais mal conçue et mal financée". L'un de ses collègues enfonce: "On a laissé le temps aux oppositions de se structurer alors qu'au départ c'était bien reçu par la population".

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