Le salon horloger de Genève s'est ouvert sur une note plus tiède après trois ans de records
Après trois années de croissance spectaculaire, le salon horloger de Genève s'est ouvert mardi sur une note plus tiède, face à une consommation plus timide en Chine et une demande plus frileuse...
Après trois années de croissance spectaculaire, le salon horloger de Genève s'est ouvert mardi sur une note plus tiède, face à une consommation plus timide en Chine et une demande plus frileuse pour le luxe dans son ensemble.
Appelé Watches & Wonders, ce salon, qui fait partie des temps forts de l'année pour le secteur horloger, accueille 54 grandes marques - dont Rolex, Patek Philippe, Cartier Chopard, Hermès et Chanel - qui viennent y présenter leurs nouveautés jusqu'à lundi.
A partir de samedi, ce salon où les professionnels viennent passer leurs commandes ouvrira ses portes au public pendant trois jours, en multipliant les animations et contenus sur les réseaux sociaux pour tenter de séduire la prochaine génération d'acheteurs.
Lors des précédentes éditions, la moyenne d'âge des visiteurs pendant les journées ouvertes au public était "de 35 ans, ce qui est extrêmement encourageant", s'est félicité dans un communiqué Matthieu Humair, directeur de la fondation qui organise cet événement.
L'an dernier, les exportations horlogères suisses ont battu des records pour la troisième année de suite, culminant à 26,7 milliards de francs suisses (27,2 milliards d'euros au taux de change actuel). Elles ont progressé de 7,6% en 2023, après une croissance de 11,4% en 2022 et un rebond de 31,2% en 2021.
Le trou d'air de 2020, marqué par la pandémie de Covid-19, a été rapidement effacé grâce notamment à ce que les analystes financiers ont appelé les "achats de revanche", une partie des consommateurs utilisant les économies accumulées pendant les confinements pour s'offrir des produits de luxe après les mois passés enfermés chez eux.
Retour à la réalité
Mais, plus récemment, la croissance horlogère a ralenti, la clientèle apparaissant un peu "plus frileuse", a expliqué à l'AFP Karine Szegedi, responsable du secteur de la consommation au sein du cabinet d'audit Deloitte en Suisse.
La consommation chinoise "n'a pas retrouvé ses niveaux d'avant-Covid", la vague d'achats de revanche est "désormais passée" tandis que l'inflation, la hausse des taux d'intérêt ou encore les licenciements dans le secteur des technologies affectent une partie de la clientèle des fabricants de produits de luxe, a-t-elle précisé.
Ce ralentissement commence à se faire ressentir chez les sous-traitants, qui fournissent des composants horlogers. Les commandes "repoussées" ou les quantités sont "diminuées". Et pour les marques qui ont toujours le vent en poupe les délais de livraison raccourcissent "parce que d'autres marques ont réduit les quantités", a observé Mme Szegedi.
"Aujourd'hui, je n'ai pas envie de dire que c'est un mauvais moment, c'est un peu plus calme", a jugé Thierry Stern, le patron de Patek Philippe. "Mais peut-être qu'on revient à la réalité", a-t-il déclaré à l'AFP.
Le patron de cette marque de luxe, qui fait partie des préférées des collectionneurs de montres dans les salles d'enchères, reste toutefois confiant quant aux perspectives de sa propre marque.
"Je fais 72.000 montres (par an) et elles vont quasiment toutes être vendues ici en une semaine", a-t-il ajouté, ce salon étant l'occasion pour la marque de rencontrer les détaillants qui vendront ensuite les montres dans leur boutiques.
Car le ralentissement ne touche pas toutes les marques de manière uniforme. Les plus haut de gamme, comme Patek Philippe, s'appuient sur une clientèle très aisée et peu sensible aux aléas de l'activité économique, ce qui leur permet de continuer de croître.
Selon une étude de la banque américaine Morgan Stanley, les modèles dont le prix dépasse 25.000 francs suisses contribuent à eux seuls à 69% de la croissance de l'horlogerie suisse.
De nombreux analystes s'attendaient à une ambiance plus tiède au salon, sans pour autant que les fabricants de montres n'y soient "abattus", avait estimé Jon Cox, analyste chez Kepler Cheuvreux. Cet expert penchait en faveur d'un "atterrissage en douceur", avec une croissance des exportations horlogères ralentissant à 4% en 2024.
"J'ai été positivement surpris par les nouveautés, je m'attendais à beaucoup plus de prudence", a réagi Oliver Müller, le fondateur de la société de conseils en horlogerie LuxeConsult. "Je n'ai pas vu de folies mais beaucoup de très belles choses", a-t-il confié à l'AFP.
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