Le retrait de Rupert Murdoch inquiète ses médias britanniques

Le passage de relais de Rupert Murdoch à la tête de son empire laisse les médias britanniques du groupe, dont le tabloïd The Sun, dans l'expectative, alors que son fils Lachlan...

Rupert Murdoch en mai 2011 à Paris © Lionel BONAVENTURE
Rupert Murdoch en mai 2011 à Paris © Lionel BONAVENTURE

Le passage de relais de Rupert Murdoch à la tête de son empire laisse les médias britanniques du groupe, dont le tabloïd The Sun, dans l'expectative, alors que son fils Lachlan qui lui succède y paraît moins attaché.

Au Royaume-Uni, outre The Sun, News Corp (l'une des deux jambes, avec Fox Corp, du conglomérat médiatique du milliardaire de 92 ans) est propriétaire de médias conservateurs influents, comme le quotidien The Times et son édition du dimanche The Sunday Times.

Le groupe a aussi lancé l'an dernier la chaîne d'opinion TalkTV, nouveau canal de diffusion pour les conservateurs britanniques.

L'annonce de la prise de recul du magnat, qui deviendra mi-novembre le président honoraire des deux sociétés, a suscité de nombreuses réactions à Londres, le ministre des Finances Jeremy Hunt soulignant par exemple son "influence déterminante sur nos vies".

Né en 1931 en Australie, Rupert Murdoch a une relation de longue date avec le Royaume-Uni. Il a étudié à l'université d'Oxford en Angleterre, et y est revenu à la fin des années 1960 pour racheter l'hebdomadaire News of the World et The Sun, qu'il mène tous deux vers le succès avec leur format tabloïd populaire, ce qui lui permet de gagner en influence sur la vie politique britannique. Sa deuxième épouse, Anna Torv était une journaliste d'origine écossaise.

A l'inverse, Lachlan Murdoch, 52 ans, bien que est né au Royaume-Uni a été élevé aux Etats-Unis. Il est ensuite envoyé par son père en Australie pour démarrer sa carrière au sein du groupe, où il a passé plusieurs années et où il a mené plusieurs investissements personnels. 

Jusqu'ici il était président de Fox Corporation, maison mère de Fox News, et s'occupait surtout des affaires américaines du groupe.

Ce passage de relai suscite ainsi des interrogations sur la place et l'avenir des médias britanniques au sein du groupe.

"La nomination inévitable de Lachlan est une mauvaise nouvelle pour la branche londonienne (il n'y est quasiment jamais venu ces dix dernières années)", a par exemple prédit jeudi dans une tribune au Spectator Kelvin MacKenzie, ancien rédacteur en chef du Sun dans les années 1980 et 1990.

Cette branche a perdu de son lustre ces dernières années, sur fonds de transition numérique et de scandales, comme celui du piratage de téléphones de personnalités, dont des membres de la famille royale, qui a entrainé la fermeture en 2011 de News of the World, propriété de Murdoch depuis 1969. 

contrôle

Longtemps de loin le quotidien le plus lu au Royaume-Uni, The Sun - qui ne publie plus de chiffres de vente depuis plusieurs années - serait talonné, voire même dépassé par son concurrent le Daily Mail pour son édition papier.

Mais il reste le 2e média sur internet, avec plus de 24 millions de lecteurs chaque mois, derrière l'incontournable BBC, selon des données récentes du site spécialisé The Press Gazette.

Les audiences de la jeune TalkTV restent elle confidentielles malgré le recrutement de fortes personnalités conservatrices, comme l'ancienne parlementaire Nadine Dorris, une proche de l'ex-Premier ministre Boris Johnson, ou Piers Morgan, l'ancien rédacteur en chef du disparu News of The World.

Les attaches potentielles de Lachlan, "ce n'est pas la question. La question est qui détient les titres (actions)" du groupe, souligne toutefois Alice Enders, chercheure au sein du cabinet Enders Analysis, spécialisé dans le secteur des médias.

Elle rappelle que Rupert Murdoch "ne va partir totalement. Il reste propriétaire et garde le contrôle. (...) Lachlan ne pourra pas lancer une grosse opération (de cession ou de rachat) sans l'aval de son père".

Et "cela n'aurait par exemple aucun sens de se séparer du Times", au moment où son concurrent direct, le Telegraph, et le magazine conservateur influent The Spectator, ont été mis en vente après des dettes impayées de leur société-mère, propriété de la richissime famille Barclay, explique Alice Enders.

L'intérêt de Rupert Murdoch pour racheter The Spectator a d'ailleurs été évoqué par les médias britanniques.

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