Retour sur la conférence organisée par la DFCG des Hauts-de-France
Le poste client, clé dans la prévention des difficultés d’entreprises
Dans un contexte marqué par la persistance d’une inflation élevée et un allongement des retards de paiement, une gestion efficace du poste client peut contribuer à prévenir les difficultés financières, ou a minima à les identifier le plus en amont possible. Dans le cadre d’une conférence organisée à Lille fin novembre, la DFCG des Hauts-de-France a dressé un état des lieux et passé en revue les bonnes pratiques à adopter dans ce domaine.
Prévention des difficultés des entreprises, acte 2 ! Après s’être intéressée en mars dernier au rôle des différents acteurs publics et privés dans ce domaine, l’Association française des directeurs financiers et de contrôle de gestion (DFCG) des Hauts-de-France a organisé le 22 novembre dernier, dans les locaux de l’IAE Lille, une nouvelle conférence sur le sujet. Cette fois-ci, les débats étaient centrés sur la gestion de la trésorerie et, plus spécifiquement, sur celle du poste client.
Des retards de paiement en hausse
Malgré un environnement macroéconomique dominé par un ralentissement de la croissance (+0,9% attendu en 2023 en France, contre +2,6% en 2022) et par la persistance d’une inflation élevée (hausse des prix anticipée de +5,8% en 2023), la situation financière des entreprises du territoire reste certes, dans l’ensemble, relativement satisfaisante. «Il y a de l’inquiétude chez les dirigeants, mais ce sentiment ne se reflète pas encore dans les derniers bilans examinés par la Banque de France (plus de 20 000 dans les Hauts-de-France), comme en témoigne par exemple la progression de la trésorerie médiane de 9% pour les grandes entreprises et de 25% pour les ETI», a ainsi constaté Carine Jupin, directrice régionale des Hauts-de-France de la Banque de France.
Pour autant, la dynamique des derniers mois se serait nettement infléchie. «Nous observons chez l’ensemble des entreprises une dégradation des indicateurs financiers, laquelle est du reste forte chez 25% d’entre elles», a fait remarquer Thomas Bonte, responsable des études chez CreditSafe. Pouvant être à la fois la cause et la conséquence, les délais de paiement ont également eu tendance à se détériorer tout au long de l’année, passant de 12 jours en moyenne en 2022 à 15 jours, selon le dernier baromètre du cabinet Arc. Or cet allongement est loin d’être anecdotique dans la mesure où «le crédit inter-entreprise avoisine aujourd’hui 800 milliards d’euros», comme l’a rappelé Nicolas Flouriou, président de l’Association française des Credit managers et Conseils (AFDCC).
Selon la Banque de France, les PME seraient les principales lésées. «Tandis qu’elles sont les meilleures élèves en matière de paiement, avec 75% d’entre elles qui paient leurs fournisseurs à l’heure, elles sont aussi celles qui, dans le même temps, souffrent le plus des retards de règlement de leurs clients», a pointé Carine Jupin. Dans ce contexte, «le sujet de la trésorerie est un vrai sujet pour nos TPE-PME, encore plus depuis ces derniers mois», a pour sa part insisté Laurent Depoorter, président de la CPME Nord.
Un panel de solutions à disposition
Pour tenter de prévenir la moindre difficulté financière, les entreprises disposent de plusieurs leviers actionnables au niveau de leur poste client. Outre la souscription d’outils qui vont permettre d’alerter en temps réel sur la situation financière d’un partenaire commercial, une revue de la politique de credit management peut déjà se révéler précieuse. «De nombreux retards de paiement sont liés à des processus de recouvrement absurdes», a prévenu Nicolas Flouriou. Dans ce cadre, le fait de nouer le contact avec le service comptable du client dès l’émission de la facture pour s’assurer que cette dernière a bien été réceptionnée et validée administrativement peut s’avérer fructueux. «En maintenant un tel lien tout au long du cycle de vie de la facture, nous parvenons à ce que 10 à 15% des factures de nos clients soient réglées en avance», a signalé Sandrine Leman-D’Hem, présidente et fondatrice de CFC Solutions.
En complément, certains instruments financiers peuvent soit contribuer à optimiser le besoin en fonds de roulement (BFR), à l’instar de l’affacturage, soit aider à stimuler l’activité commerciale, comme les cautions et l’assurance-crédit. Deux produits qui sont largement sous-utilisés, parfois à tort sachant que «les créances clients peuvent représenter jusqu’à 40% de l’actif d’une entreprise», a en effet souligné Vianney Brabant, courtier spécialisé chez AU Group. Créée mi-novembre sous l’égide du Conseil régional et du président du tribunal de commerce de Lille Métropole, l’association Ambition Hauts-de-France procède d’ailleurs actuellement à un recensement des solutions de financement accessibles dans la région. Et Laurent Boiron, directeur du Développement & Réseau PME chez Banque Populaire du Nord, de conclure : «Au-delà de la trésorerie, n’oublions pas l’importance des capitaux propres et rappelons que l’entrée d’un fonds au capital peut aussi aider à accélérer le développement de l’entreprise.»
La Banque de France met ses ressources à disposition
Afin d’accompagner les dirigeants, la Banque de France propose en région, gracieusement, une série de services. Parmi eux, un correspondant dédié aux TPE-PME peut déjà les orienter vers des organismes partenaires et les mettre en relation avec des interlocuteurs ciblés. En outre, la banque centrale nationale a déployé Opale, un outil d’analyse financière en ligne permettant d’obtenir une analyse de la situation financière de son entreprise et un comparatif par rapport aux autres acteurs de son secteur. Via son module «simulation», Opale permet également d’évaluer les impacts financiers d’un projet et d’établir des projections selon différents scénarii.