"Le plus beau cartable...": une aide aux familles privées d'allocation
Samira a les yeux qui brillent. "Je vais avoir le plus beau cartable de la classe", se réjouit cette écolière de huit ans, après avoir récupéré ses fournitures scolaires dans...
Samira a les yeux qui brillent. "Je vais avoir le plus beau cartable de la classe", se réjouit cette écolière de huit ans, après avoir récupéré ses fournitures scolaires dans un centre de distribution de Strasbourg.
Comme chaque année depuis sept ans, le Secours populaire français et Caritas s'associent pour distribuer des fournitures de rentrée aux familles dans le besoin pendant deux semaines en août. Une bouée de sauvetage pour des parents pour qui la reprise de l'école est souvent synonyme de stress, surtout en période d'inflation.
Ces distributions sont réservées aux familles ne pouvant pas toucher l'allocation de rentrée scolaire (ARS): déboutés du droit d'asile ou personnes en cours de régularisation par exemple, qui ne sont pas autorisées à travailler et ne bénéficient pas des allocations familiales.
A la sortie de l'entrepôt du Secours populaire situé dans le quartier du Neuhof, Diar, 11 ans, transfère ses cahiers, classeurs, trousse etL crayons de couleur dans le sac à dos bleu qu'il vient de récupérer.
"Je suis content. J'ai suffisamment de choses pour la rentrée", pense cet enfant d'origine kosovare, en France depuis un an. Son père, Bekim Morina, est soulagé.
"Ca nous aide beaucoup. Sans cette distribution, je serais obligé de demander de l'aide au collège", dit-il. "Je n'ai pas de revenus car je n'ai pas le droit de travailler".
La distribution se passe comme au supermarché: parents et enfants parcourent les rayons, accompagnés par un bénévole qui leur explique à quelle quantité de gommes ou d'ardoises ils ont droit en fonction de leur nombre d'enfants.
Tout neuf
A la différence près qu'à la sortie, on ne paie pas. A l'entrée, les organisateurs demandent une participation de 2 euros par enfant (5 euros maximum par famille), même si tous ne peuvent pas payer.
Demander une participation est une façon de respecter la dignité des personnes. "On fait de la solidarité, pas de la charité", explique Claude, une bénévole.
"On veut leur donner l'impression qu'ils sont dans un magasin comme tout un chacun", souligne Thibaut Stoeckel, chargé du projet rentrée scolaire pour le Secours populaire et Caritas Alsace.
Dans le même esprit, toutes les fournitures sont neuves à l'exception de quelques gros classeurs d'occasion offerts par des administrations.
Les fournitures sont achetées grâce à une subvention de 30.000 euros de la mairie de Strasbourg ou bien récupérées lors de collectes effectuées en juillet aux portes des supermarchés.
Les bénévoles récupèrent ainsi ce qu'on leur donne, avec un léger excès de cartables roses, qui ne plaisent pas nécessairement aux garçons...
Certaines entreprises participent aussi à l'opération, comme Amazon. Le distributeur a effectué des dons en nature, mais aussi autorisé ses salariés à donner trois heures de leur temps de travail pour du bénévolat lors de la distribution.
1.120 inscrits
Ces dernières années, la précarité s'est envolée en Alsace. "Dans le Bas-Rhin, nous sommes passés en deux ans de 7.000 à 22.000 personnes assistées" sur les listes du Secours populaire, selon M. Stoeckel. "C'est énorme".
Toutes les familles ne sont pas concernées par les distributions de fournitures scolaires: 1.120 enfants sont inscrits sur les listes cette année, l'année dernière ils étaient 600.
L'ARS, comprise entre 389 et 435 euros, est versée sous conditions de ressources. Seules 3 millions de familles (soit 5 millions d'enfants) y ont droit. L'allocation a été revalorisée de 5,6% cette année mais selon la Confédération syndicale des familles (CSF), le coût des fournitures s'est renchéri de 11,3% par rapport à l'an dernier.
"L'inflation pousse les gens dans une plus grande précarité", observe M. Stoeckel. "La rentrée est une grande source d'inquiétude supplémentaire".
Enchantée par son cartable arc-en-ciel, Samira, elle, n'est pas stressée et a désormais hâte de retrouver les bancs de l'école. L'enfant, qui vient de la République russe d'Ingouchie, n'est pas partie en vacances. "Je me suis un peu ennuyée".
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