Le nouveau challenge de Franck Darnoux après son licenciement
Ancien salarié de Kerry à Montcornet, Franck Darnoux a repris le seul tabac/jeux/presse du bourg. La CCI de l’Aisne l’a aidé dans cette reprise.
Montcornet : bourg axonais de 1 500 habitants situé aux portes du Laonnois et de la Thiérache et à l’intersection des voies romaines de Laon à CharlevilleMézières et de Reims à Bavay. Des routes encore empruntées quotidiennement par des dizaines de poids lourds, des salariés et, l’été, par des voyageurs hollandais. Sur le plan économique, les entreprises se comptent sur les doigts d’une main. Il est annoncé la probable fermeture de la Matt (groupe Treves), sous-traitance automobile. Il n’y a plus que les commerçants et artisans qui animent la cité. Franck Darnoux est l’un d’eux. Un Montcornois pur souche qui a repris, en mars 2015, le seul bureau tabac/presse/ jeux du bourg. À 47 ans, pour cet exsalarié et syndicaliste CGT, « c’est un nouveau challenge personnel et professionnel. J’ai toujours dit que je reprendrais un commerce après 40 ans ». La rencontre avec Picardie la Gazette a été l’occasion de revenir sur le site de son ancienne entreprise, Kerry, située sur une zone d’activités en bordure de la commune, en direction de Reims. « Ici, nous fabriquions des fonds de sauce. J’ai travaillé durant 16 ans à différents postes », se rappelle-t-il en regardant le site délabré par le temps. La flore reprend les espaces délaissés par l’activité humaine. « C’est dommage ! » Créée après la fermeture de la sucrerie en 1988, l’entreprise était l’un des fleurons du département. Elle s’appelait Aromont et les politiques défilaient pour découvrir cette pépite axonaise. En 2014, le groupe irlandais Kerry a racheté le site et, quelques mois plus tard, les salariés ont appris sa fermeture : la production a été délocalisée en Angleterre. Un coup dur pour le territoire. « La plupart des salariés ont retrouvé un poste ou ont créé une entreprise. De mon côté, j’ai repris ce commerce », indique Franck Darnoux.
La CCI, un partenaire de poids C’est une rencontre, mi-juin, avec Bernard Fleury, propriétaire de ce commerce et connu sur le plan régional et national pour avoir été président de la confédération des débitants de tabac, que l’idée de concrétiser son rêve se présente. « J’en ai discuté tout le weekend avec mon épouse. J’ai décidé d’y aller, de me lancer dans un nouveau challenge. » Les premiers contacts ont commencé mi-juillet. D’abord avec la cellule de reclassement mise en place suite à la fermeture du site. Ensuite avec La Française des jeux, la confédération des débitants de tabac, l’État et ses différents services et les distributeurs de presse. Enfin, avec la chambre de commerce de l’Aisne. « C’est surtout elle qui m’a aidé et m’a accompagné sur mon projet. Sans elle, je n’y serais pas arrivé. J’ai noué une excellente relation avec Franck Pionneau, conseiller à la CCI de Laon. C’est peutêtre parce que nous portons le même prénom… », raconte Franck Darnoux.
Le futur commerçant a rencontré plusieurs péripéties. Certaines d’entre elles sont cocasses. Salarié protégé, Franck Darnoux avait annoncé à la cellule de reclassement son choix de reprendre un commerce. À elle d’en informer l’inspection du travail. Jusque-là rien d’anormal. Sauf que la loi impose que l’ensemble des salariés protégés soient dans le même cadre (nouveau poste, reprise ou création d’entreprise). « La loi est parfois bizarre », se souvient Franck Darnoux qui a tout de même reçu l’aval de l’inspection du travail… pour créer son entreprise.
Une épicerie pour apporter un plus Pour ouvrir son commerce, Franck Darnoux a financé le stock (tabac et commerce) pour 41 000 euros et a racheté le fonds de commerce pour 130 000 euros. Des aides ont abondé l’apport personnel : 7 500 euros d’Aisne initiative (prêt à taux zéro), 15 000 euros du groupe Kerry (création de l’entreprise) et 3 000 euros (création de l’emploi). C’est en mars 2015 que Franck Darnoux s’installe. Seize mois après, il ne regrette pas son choix. « Je travaille à 160 mètres de chez moi. Je commence à 6 h 30 et termine à 19 h. Je fais plus d’heures, mais ce n’est pas la même fatigue. Mon employée me permet de m’organiser et d’avoir du temps pour m’adonner à mes passions, notamment la lecture. » Son comptoir voit passer environ 450 clients par jour, dont certains sont d’anciens collègues de travail et des amis. Pour élargir sa gamme de produits, il a ouvert un rayon épicerie. « C’est un plus. Cette épicerie a été ouverte avec l’appui de l’enseigne Franprix qui a passé un accord avec la Confédération des buralistes. Cette épicerie a bien marché au début et connaît actuellement un ralentissement. » Ce bureau tabac/jeux/presse est situé au c?ur du centre-bourg face à une intersection qui voit passer de nombreux poids lourds provenant des Ardennes. Une situation géographique qui lui permet d’être visible. « Je ne regrette pas mon choix. Nous sommes le seul commerce de tabac à 20 km autour de Montcornet et nous sommes sur un secteur résidentiel, avec des clients qui passent le matin avant de prendre la route pour travailler sur Laon ou Reims, ou le soir au retour. »