Le Morvan, à la reconquête de ses vignes
Terre viticole bourguignonne oubliée, le Morvan accueille plusieurs projets de replantation de vignes. Le Parc régional Naturel du Morvan entend les fédérer à travers une convention de partenariat.
« Le Morvan a une riche histoire viticole, avec des vignobles présents dans des communes comme Saint-Péreuse ou Lucenay-l’Évêque avant l’arrivée du phylloxéra », entame Sylvain Mathieu, président du Parc régional du Morvan. « Nous voulons la faire revivre ». Pour faire revivre ce vignoble, le Parc a rassemblé, le 27 novembre dernier, une dizaine de porteurs de projets de replantation.
Déjà, deux pionniers ont obtenu des droits de plantation pour 11 hectares auprès de FranceAgriMer. À La Celle-en-Morvan (71) et à Chiddes (58), les premières parcelles devraient voir le jour d’ici quelques années. D’autres participants sont moins avancés. Bastien Gautheron, vigneron à Dijon, « rêve de cultiver des cépages comme le chenin ou le gamay sur ces sols granitiques. Cela pourrait être un complément à mon activité actuelle. »
Un laboratoire de la viticulture de demain
Alice Bidault, une plasticienne habitante de Poil (58), envisage d’allouer un hectare de ses terres à la vigne, dans un projet d’agroforesterie, où les arbres pourraient faire de l’ombre à la vigne, la protégeant des brûlures du soleil. « J’ai une approche respectueuse de l’environnement et suis passionnée par le pinot noir. Mais il nous faut un solide accompagnement technique avant de commencer », estime-t-elle.
L’ambition ne se limite pas à recréer un vignoble local. Le Parc veut transformer le Morvan en un véritable laboratoire de la viticulture de demain, intégrant cépages hybrides, adaptation aux sols granitiques, et pratiques biologiques ou agroforestières. Emmanuel Clerc, responsable du projet, précise : « Nous voulons créer un vignoble à taille humaine, en phase avec les enjeux climatiques de 2050. L’objectif est aussi de tester de nouvelles pratiques et de s’inscrire dans le paysage des vins de Bourgogne. »
Un patrimoine oublié
Ce projet, soutenu par le Conseil régional de Bourgogne-Franche-Comté, bénéficie d’une subvention de 30 000 € pour financer des études historiques et techniques. Des recherches approfondies sont menées pour retrouver les traces de l’activité viticole passée. Au XIXᵉ siècle, les vins de Château-Chinon figuraient parmi les plus prisés. Des atlas départementaux de 1878 permettent d’identifier les zones autrefois cultivées, à cheval entre la Saône-et-Loire et la Nièvre. À Saint-Péreuse (58), par exemple, 23 hectares étaient dédiés à la vigne.
Ce patrimoine oublié pourrait ainsi renaître avec une identité propre, marquée par les sols volcaniques et granitiques du massif, bien différents des calcaires bourguignons. L’objectif est clair : produire des vins de grande qualité, valorisés localement. Pour l’heure, il faudra patienter : les premières plantations ne devraient intervenir qu’en 2026, et les premières bouteilles n’arriveront pas avant plusieurs années.
Pour Aletheia Press, Arnaud Morel