Réchauffement climatique
Le météorologue Louis Bodin invité à La Capelle
Groupama Nord-Est avait invité agriculteurs et élus à une réflexion collective autour des aléas climatiques en agriculture sur fond de réforme début septembre, à La Capelle. L'invité d’honneur de cette conférence organisée à l’hippodrome, Louis Bodin, passionné de météorologie, a partagé sa vision scientifique du réchauffement climatique.
Passionné, oui, mais scientifique avant tout. Le météorologue médiatiquement connu des Français n’était pas venu à La Capelle le 2 septembre dernier, veille de la Foire aux fromages, uniquement pour rassurer les organisateurs sur la météo du week-end. L’intervenant a souhaité avec beaucoup d’humilité, d’honnêteté et d’humanisme échanger autour de sa vision du réchauffement climatique, partager des « éléments de réflexion » reposant sur des données chiffrées, des paramètres vérifiés car, a-t-il recommandé, aux auditeurs « ne vous fiez pas à votre mémoire. Ne mélangeons pas tout, ne déformons pas tout, partons des bons constats ».
Graphiques à l’appui, le météorologue a exposé ce que l’analyse des relevés du passé nous enseigne : « Relativisons nos comportements. Les phénomènes qui aujourd’hui nous dérangent, ont toujours existé, et c’est tant mieux, les cyclones comme les volcans sont nécessaires… Aujourd’hui, on sème, on vendange, on récolte différemment, plus tôt, c’est sur l’évolution des températures que nous devons nous appuyer. Nous devons apprendre à réfléchir de manière plus globale en pensant à nos enfants. Nous devons faire preuve d’altruisme et d’humanisme, comme autrefois les bâtisseurs de cathédrales, nous savons que ne verrons pas les effets de notre action. Je crois à la science, nous avons les solutions techniques pour nous en sortir, à nous d’avoir une réponse humaine. »
Le rapport à la nature
Ponctuée de nombreuses anecdotes qui ont tenu l’auditoire en haleine, l’intervention de Louis Bodin a donné à réfléchir « aux citoyens engagés » présents dans la salle et c’est avant tout l’objectif recherché : « La variabilité du climat existe depuis 1821, oui, il se passe quelque chose, dû à une évolution naturelle mais aussi à l’impact de l’homme. Le rapport à la nature m’a appris l’humilité. »
Louis Bodin a rappelé que « dans son rapport à la nature l’homme se comporte comme un consommateur, un utilisateur qui pense la nature à son service, qu’elle lui offre tout ce qu’il veut au moment où il le veut. Mais la nature nous résiste… Nous devons être plus résilients. La météo nous rappelle le travail collectif, les gestes de solidarité à accomplir à l’échelle de le la Planète et de l’espère humaine. Nous devons oublier les frontières quand nous pensons à la nature et réfléchir sur un temps long, avec du recul dans la réflexion. Nous allons avoir à nous adapter, à utiliser des connaissances pas encore très importantes, la météorologie n’existe que depuis 150 ans, et incomplètes ».
Indemnisation des risques climatiques sur fond de réforme
L’été 2022 restera marqué par les images de la sécheresse et des incendies, partout en France, la canicule intervenant après d’autres aléas climatiques, et l’Aisne n’a pas été épargné, auxquels les agriculteurs sont confrontés depuis quelques années. Risques assurables ? Risques non-assurables ? L’assureur Groupama avait alerté au niveau de l’État, « le déséquilibre technique est très important, nous ne pourrons pas tenir » a témoigné Pascal Vine, directeur institutionnel, durant la table-ronde.
Une approche collégiale
Au printemps dernier, les parlementaires ont adopté la loi d’orientation relative à une meilleure diffusion de l’assurance récolte en agriculture et portant réforme des outils de gestion des risques climatiques en agriculture. Le député, Frédéric Descrozaille, engagé dans le travail de la commission, avait été invité à intervenir lors de la conférence organisée à l’hippodrome de La Capelle, pour présenter la réforme.
Des axes sont fixés, dont il faut assurer la mise en place, comme la création d’un groupement d’assureurs qui permettra une large mutualisation des risques. Il fut également question de gouvernance réunissant les agriculteurs, les assureurs, les réassureurs et l’État au sein de la Commission chargée de l’orientation et du développement des assurances garantissant les dommages causés aux récoltes (Codar).
Le nouveau dispositif de gestion des risques s’appuie sur la complémentarité entre la responsabilité individuelle, l’assurance et la solidarité nationale au travers d’un dispositif de gestion des risques, dit à « trois étages » : les dispositions prises par l’agriculteur, l’assurance récolte et la solidarité nationale au travers d’un fonds de solidarité national, le député rappelant qu’un fonds de 600 millions d'euros a été voté pour l’année prochaine. La réforme instaure le principe d’un interlocuteur unique pour tous les agriculteurs qu’ils soient assurés ou non. Robert Boitelle, président de la Chambre d’agriculture de l’Aisne, a exprimé le souhait que la mise en place de la réforme sur le terrain, soit pour les agriculteurs : « Simple, rapide, efficace et juste. »