Le gouvernement promet un changement de cap
Le Premier ministre annonce une «modernisation de l’action publique» et enterre la RGPP, la réforme de l’Etat d’inspiration néolibérale déployée par le précédent gouvernement. Un rapport public dresse un bilan plutôt sévère des résultats obtenus, malgré des économies consistantes.
Adieu RGPP, bonjour modernisation de l’action publique. Le 1er octobre, à la fin d’un séminaire sur la rénovation de l’action publique, le Premier ministre, Jean-Marc Ayrault, a annoncé la création d’un secrétariat général pour la modernisation de l’action publique. Il devrait être mis sur pied avant la fin du mois, et être rattaché aux services de Matignon. Cette annonce signe aussi la fin de la RGPP (Révision générale des politiques publiques). Déployée par le gouvernement de Nicolas Sarkozy, cette réforme de l’administration était supposée rendre l’Etat moins coûteux et plus restreint. La RGPP, pilotée par le ministère de l’Economie, comportait plus de 500 mesures disparates, allant de la fusion des administrations des impôts et du Trésor, à la dématérialisation de procédures administratives en passant par la rationalisation des achats de l’Etat ou la refonte de la carte judiciaire. Ce 25 septembre, les inspections générales des Finances, des Affaires sociales et de l’Administration (IGF,IGAS,IGA) ont remis à Jean-Marc Ayrault leur rapport d’évaluation sur la RGPP. Et les conclusions de l’audit sont plutôt sévères.
Des économies mais pas de vision d’ensemble
Pourtant, en termes d’économies budgétaires, la RGPP a quasiment atteint les objectifs qui lui avaient été fixés par le gouvernement, estiment les rapporteurs : à la fin de l’année, la réduction des dépenses atteindra 11,9 milliards d’euros. L’objectif initial était de 15 milliards d’euros d’économies entre 2009 et 2013, dont 12,3 milliards fin 2012. Parmi les mesures qui ont contribué à atteindre ce résultat, figure notamment l’application de la règle du non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant à la retraite. Tout n’a pas fonctionné : par exemple, les gains de productivité attendus de la rationalisation des fonctions supports de l’Etat, comme l’informatique, se font attendre, tempère le rapport. Mais surtout, c’est le pilotage global de la réforme qui est critiqué par les rapporteurs : la RGPP s’est focalisée sur des mesures qui génèrent des économies immédiates, mais n’a pas mis en oeuvre une réforme de l’Etat dictée par une vision globale. Partant, la réforme porte aussi l’empreinte des cabinets d’audits, largement sollicités par Bercy dans sa démarche, et qui ont été rémunérés à hauteur de 114 millions d’euros. Las, ces consultants privés étaient «parfois peu au fait des réalités du secteur public», critique le rapport, qui pointe également l’absence de concertation. Résultat : une gestion des ressources humaines peu efficace et des fonctionnaires mécontents. Ces derniers ne sont pas les seuls oubliés de la gouvernance de la RGPP, ajoute le rapport : collectivités locales et organismes de Sécurité sociale, avec qui l’Etat partage pourtant la mise en oeuvre de politiques, ont été également mis de coté.
Nouveau cap annoncé
Si les rapporteurs préconisent de poursuivre les chantiers entrepris dans le cadre de la RGPP, ils invitent à un changement de cap dans la gouvernance de la réforme. Les annonces de Jean-Marc Ayrault vont dans ce sens. Il a promis la mise en place d’un comité interministériel associé à la réforme. Et la réforme de l’Etat devrait s’imbriquer avec la nouvelle étape de la décentralisation. Par ailleurs, à partir de début novembre, des réunions de concertation sont prévues avec les fonctionnaires sur le territoire, pour les entendre sur leurs conditions de travail et propositions pour améliorer les services. Des évaluations des politiques publiques, impliquant l’Etat, ses opérateurs, les collectivités et les organismes sociaux, seront menées pour déterminer les chantiers à engager pour remédier aux dysfonctionnements qui auront été décelés. Les mois à venir montreront si le gouvernement parviendra à conjuguer recherche d’économies et rénovation de l’action publique.