Le canal de Bourgogne dans l’impasse ?
À partir de janvier 2023, le Canal de Bourgogne devrait être coupé en deux, empêchant sa navigation de bout en bout. Encouragé par l’État à faire des économies dans le cadre d’un contrat pluriannuel, VNF réduit les services apportés à ses utilisateurs, inquiétant certains usagers.
Les 245 kilomètres de long du Canal de Bourgogne pourraient être coupés en deux dès le mois de janvier 2023, entre Venarey-les-Laumes et Pouilly-en-Auxois en Côte-d’Or. Cette portion de 25 kilomètres interrompra la navigation du nord au sud sur cette voie navigable. « Près de 200 bateaux l’ont empruntée en 2022, mais en fermant cette partie, cela va réduire le passage sur les autres portions et créer deux culs-de-sac » regrette Roger Collins, représentant Bourgogne-Franche-Comté de l’association Agir pour le fluvial qui participe à ce titre à la commission des usages de la direction territoriale Centre Bourgogne de VNF.
Pour cet acteur du Canal de Bourgogne, le contrat d’objectif et performance signé entre l’Etat et VNF est à l’origine de cette décision. De son côté, VNF comptabilise une centaine de bateaux, plaisanciers privés uniquement, sur la portion contre cinq fois plus de circulation en amont et en aval de ce tronçon.
Service préservé ailleurs
« En commission, nous avons entendu parler de ce contrat en novembre 2021 pour la première fois. » Imposant à VNF de réaliser des économies tout en garantissant un budget pour dix ans à compter de 2023, le contrat facilite la planification des opérations de VNF à plus long terme. « A ce jour, aucune décision de fermeture n’a été prise. Nous ouvrons le débat pour adapter le niveau de service à la réalité d’usage » explique Cécile Azevard, directrice de VNF Bourgogne qui rappelle que VNF doit avoir une gestion raisonnée des deniers publics.
Roger Collins commente : « Pour tenir les engagements, VNF se voit obligée de réduire les services en diminuant les horaires de navigation ou le mouillage des bateaux avec des profondeurs moins importantes par exemple et des fermetures à la navigation. » D’autres canaux ont été menacés de fermeture, mais ont trouvé une solution. « Alors qu’en Bourgogne-Franche-Comté, j’ai le sentiment que les élus sont peu informés de cette décision, dans les Ardennes et les Vosges, la région s’est engagée financièrement pour sauver les canaux de la fermeture. » Un soutien indispensable pour que le Canal de Bourgogne puisse rester ouvert d’un bout à l’autre, sans interruption.
« J’ai proposé à VNF de garder la portion ouverte sur demande, mais on m’a opposé un refus à moins d’une intervention financière des collectivités. Pourtant, à ma connaissance, aucune discussion n’a été entamée. » De son côté, VNF n’exclue aucune alternative, y compris l’ouverture à la demande, mais insiste : « Le seul usage de la navigation ne justifie pas que nous financions, mais derrière, d’autres questions se posent qui invitent les collectivités à se saisir du sujet et s’impliquer comme elles l’ont fait sur d’autres territoire. »
Une impasse fluviale
Le canal de Bourgogne rejoint l’Yonne à Laroche-Migennes et la Saône à Saint-Jean-de-Losne, mais en fermant la partie entre Venarey-les-Laumes et Pouilly-en-Auxois, les plaisanciers et autres bateaux se retrouveront, d’un côté comme de l’autre, dans une impasse. « Même si VNF a maîtrisé les réserves d’eau, la voie fluviale principale entre le nord et le sud qui passe par le canal de la Marne à la Saône a été fermée pour sécheresse tout comme le canal rattaché à la Loire sur décision préfectorale. Le canal de Bourgogne offrait alors le seul moyen de transiter du nord au sud. » En fermant cette portion, la totalité de l’itinéraire alternatif se fermerait aussi, impactant le réseau fluvial européen et les bateaux venant d’Allemagne, des Pays-Bas, des pays baltes, du Royaume-Uni… « On peut relier les deux versants par d’autres itinéraires » rappelle la directrice de VNF Bourgogne.
Roger Collins met également l’accent sur le rôle patrimonial du canal, ouvert de bout en bout depuis 1832, et son poids à la fois touristique, économique et environnemental. « La consommation de carburant d’une péniche au kilomètre tonne est 70 % moins élevée qu’un camion. » Loin d’accuser VNF de cette décision, Roger Collins comprend les obligations imposées et interpelle les élus locaux afin de trouver le soutien nécessaire au maintien du tronçon menacé.
Pour Aletheia Press, Nadège Hubert