Le Calaisis piétine devant son grand projet

L'assemblée générale de Calais promotion, l'agence de développement économique de l'Agglomération, s'est tenue cette année dans l'amphithéâtre de la Cité internationale de la dentelle et de la mode. Une marque d'intérêẗ pour un secteur qui vient de vivre quelques soubresauts avec la reprise de deux des derniers acteurs de la filière française (cf. nos précédentes éditions). Retour sur une année morose… et les perspectives.

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D.R.

L'ambition du projet Heroic Land est de faire venir 1,5 million de visiteurs par an sur les 50 hectares qui doivent abriter 32 attractions. Calais promotion attend toujours ses premiers investisseurs et exploitants...

 

Restez mobilisés !” Le Calaisis reste à l’affût d’une concrétisation qui lui permettra de sortir de l’ornière du chômage dont le taux reste bloqué à 16% (plus de 20% dans la ville-centre). Son outil privilégié, Calais promotion, est dirigé par Natacha Bouchart, maire de Calais, et emploie neuf personnes dans des locaux face à la mairie de Calais. Sa masse salariale a augmenté de 15% avec le remplacement d’une assistante de direction et d’une chargée de communication par des chargés de mission dédiés à des projets et des secteurs d’activité spécifiques. Leur mission s’avère complexe et l’année 2015 aura été bousculée à plus d’un titre. Natacha Bouchart l’a rappelé en évoquant le contrat de développement signé le 13 novembre dernier, à quelques heures des attentats de Paris. Toute l’année 2015 aura été également marquée par les problèmes migratoires au port et au tunnel. De plus, 2015 a été aussi l’année de préparation des fusions entre agglomérations. Le Calaisis va ainsi accueillir une partie des communes rurales qui ont préféré la ville-centre à une communauté de communes exclusivement rurale avec Guînes. Frethun verra son parking élargi et son pôle “gare” développé. Ce potentiel inexploité a fait l’objet d’un accord entre Natacha Bouchart et Catherine Fournier, maire de Frethun qui rejoint l’Agglomération. Autre invité, Jean-Marc Puissesseau, président de la Société d’exploitation des ports du Détroit, a fait le point sur le projet portuaire de Calais et de Boulogne-sur-Mer. “On gardera le port de commerce de Boulogne au lieu de le rendre à la Région à la fin de l’année“, a-t-il annoncé avant de revenir sur un constat désormais récurrent : “Nous ne travaillons qu’avec trois ou quatre passerelles aujourd’hui. Nous sommes en train de perdre notre première place en termes de transport à cause des problèmes migratoires alors que le trafic croît de 5% par an.” Sur le projet, on sait désormais qu’il y aura trois passerelles supplémentaires dans le projet à Calais. Le chantier verra défiler 600 camions par jour quand il s’agira de construire la digue de près de 3 km. La première phase ira jusque 2021. Ensuite, deux nouveaux postes à quai devraient sortir de terre et donner à Calais une plus grande capacité pour transporter du fret et des passagers.

Héroic Park n’est pas en avanceLes pistes de développement de Calais promotion sont tournées autour du transport et de la logistique. Si sa situation géographique donne à Calais un avantage sur tout autre site, la présence de migrants, la situation sociale, la fiscalité (notamment la taxe sur le versement transport dans le Calaisis) et la réglementation française peuvent cependant dissuader les investisseurs… Mais le grand projet du territoire reste Heroic Land. Initié il y a maintenant quatre ans, l’implantation du parc de loisirs dans la zone du Virval, face à l’autoroute, sur un périmètre qui sera aussi urbain, donne du fil à retordre à l’agence. Après avoir financé un fonds d’étude, obtenu un master plan où les nouveautés sont rares, Calais promotion attend toujours ses premiers investisseurs et exploitants. Jean-François Thibous, le maître d’œuvre désigné par Natacha Bouchart, planche toujours. L’ambition est de faire venir 1,5 million de visiteurs par an sur les 50 hectares qui doivent abriter 32 attractions. Le quartier dit “Heroic City” devrait drainer des financements fléchés “aménagement” dans le contrat de territoire. L’ambition, c’est aussi la taille financière du projet : “265 millions d’euros, 1 000 emplois non délocalisables dès l’ouverture du parc (750 emplois directs, dont 300 CDI et 450 saisonniers, et 250 emplois indirects), 2 430 emplois générés pendant deux ans pour les travaux de construction sur 2017 et 2018“. Les édiles s’appuient sur de sérieux arguments pour y croire : “Les habitants de l’Europe du nord sont de forts consommateurs de grands parcs d’attractions et parcs à thème. Les secteur est en forte croissance (+3% en 2014). L’objectif de 1,5 million de visiteurs annuels est réaliste et positionne Heroic Land dans le top 20 des parc européens, avec une offre hôtelière qui n’existe pas à Thorpe Park (UK), Plopsaland (BE), Walibi Belgium (BE), Bellewarde (BE) et Bagatelle (FR)“, explique la brochure. Mieux : Calais promotion voit son futur parc “dans le top 4 de fréquentation (derrière trois parcs britanniques), avec des prix d’entrée adulte et enfant compétitifs“. Mais la réussite ne se décrète pas et si le Calaisis veut inaugurer ce parc en 2019, le temps lui est largement compté pour trouver son maître d’œuvre et ses investisseurs. De plus, la Commission nationale du débat public qui doit encadrer ce projet ne servira pas d’accélérateur.

Encadré 1 :

Les moyens de Calais promotion

Calais promotion continue de bénéficier de moyens conséquents et essentiellement publics : 600 000 euros de la ville de Calais et 630 000 de l’Agglomération… “La CCI Côte d’Opale, contributeur important par le passé, ne finance plus l’agence depuis la fin de l’exercice 2014“, lit-on dans le rapport financier ; 350 000 euros ont dû être apportés par les collectivités. Globalement, Calais promotion fonctionne avec un budget (déséquilibré de 25 000 euros cette année) de 1,7 million d’euros de produits et de 1,72 million d’euros de dépenses. Si ses subventions ont un peu baissé en 2015, le projet Heroic Park en a drainé deux fois plus qu’en 2014 (avec 420 000 euros). L’agence gère également les fonds de revitalisation comme celui d’Eurotunnel, mais là aussi l’activité baisse avec 16 000 euros de produits en 2015 contre 30 000 en 2014. Calais promotion développe son fonds d’étude pour les projets qui ont vocation à s’implanter sur le territoire. Fixé à 500 000 euros en 2013, ce fonds s’est envolé jusqu’à 1,32 million d’euros l’an dernier. Mobilisé essentiellement pour Heroic Parc, il devrait culminer jusqu’à 2,5 millions à la fin de l’année. Outil de politique publique dédié au développement économique, Calais promotion ne compte que 58 entreprises adhérentes.

 

Encadré 2 :

Valérie Létard en visite à Calais

Quelques jours après l’assemblée générale de Calais promotion, Valérie Létard, vice-présidente du Conseil régional chargée du contrat de plan, des fonds structurels européens et de l’aménagement, a visité l’agence et assisté à une présentation des projets du Calaisis le 25 mai dernier. “S’il y a un territoire intéressé par les trois sujets, c’est bien le Calaisis“, a rassuré la vice-présidente de la Région. Natacha Bouchart, chargée des questions portuaires à la Région, a démontré, cartes à l’appui, l’étendue des qualités qui confère au territoire un rôle moteur dans l’économie régionale. Projet de parc d’attractions, doublement du port, requalification urbaine, nouveaux équipements publics, la liste des ambitions calaisiennes est longue. La dimension européenne a affleuré tout au long de la rencontre : “Ce que l’Union européenne peut apporter ici est très important : les fonds ‘innovations territoriales intégrées’ (l’UE doit consacrer 1% des fonds Feder à la politique de la ville). Ces fonds sont couplés à l’ANRU auprès de laquelle Calais émarge déjà. On a toujours travaillé sur le renouvellement urbain. Désormais, il faut y mettre de l’activité économique“, a prêché Valérie Létard. Forte de son rôle de pilote délégué à l’instruction et à la gestion de fonds européens pour les régions, les Hauts-de-France pourraient donner à Calais une ouverture européenne à l’avenant. Une perspective qui s’est fait jour avec le projet de création d’un centre des langues. “Une révolution à Calais“, a indiqué Natacha Bouchart.

 

 

 

 

Morgan RAILANE