Le cahier des charges AOPen révision
Le syndicat du maroilles – ex-syndicat des producteurs et affineurs de maroilles – a dû s’ouvrir aux producteurs de lait de la zone d’appellation d’origine protégée. L’Europe attend maintenant du syndicat qu’il redéfinisse le cahier des charges. Enjeu : garder l’appellation d’origine protégée acquise en 1996.
Do m i n i q u e Duquesnoy, président du syndicat depuis 2007, le reconnaît : le film Bienvenue chez les Ch’tis, sorti en 2008, a dopé les ventes de maroilles. Il estime la progression à 30% et souligne que le film a suscité la curiosité et l’intérêt un peu partout en France mais aussi parmi les gens du Nord eux-mêmes. “Je pense qu’on a fait le plein de nos consommateurs nordistes, explique-t-il. En 1992, on disait encore que 60% d’entre eux n’en mangeaient pas et que 40% ne le connaissaient pas du tout.”
L’effet Dany Boon s’est sans doute un peu estompé mais il a permis à la production, au sein de la zone d’appellation contrôlée, de franchir la barre des 4 000 tonnes de fromage produites. Selon l’INAO1, en 2005 la production était de 2 700 tonnes.
Le syndicat s’efforce maintenant d’entretenir la flamme et de garder les “convertis”. A l’occasion du dernier Salon de l’agriculture, il a, par exemple, sorti le DVD “Le maroilles : le trésor de la Thiérache” et un livret de recettes. “Dès que l’on communique ou que l’on aide les acteurs de la filière, ça rapporte. Des consommateurs reviennent, d’autres arrivent”, constate le président. Il ajoute qu’en France, beaucoup croient encore que le maroilles est un fromage fort ou qu’il est fabriqué en Belgique…
AOC depuis 1976. Rappelons que le maroilles a reçu son appellation d’origine contrôlée (AOC) en 1976, après 20 ans de procédure et de négociations, que c’est la seule au nord de Paris, et que l’appellation d’origine protégée, qui étend la protection à l’Europe (AOP), lui a été accordée en 1996. Autre précision : la zone géographique concernée par l’appellation est à cheval sur le Nord et l’Aisne, dans l’Avesnois- Thiérache (Bergues n’y est donc pas).
La commune de Maroilles, dans l’Avesnois, a donné historiquement son nom au fromage. L’histoire de celuici, telle qu’elle est reprise d’ailleurs par le Journal officiel de l’Union européenne, mentionne que son élaboration, la façon de transformer le lait de vache et de l’affiner ont été mises au point vers 960 par les moines de l’abbaye de Maroilles (fondée au VIIe siècle).
Renouvellement de l’AOP en cours. L’actualité du Syndicat du maroilles (voir présentation page 13), c’est d’abord le renouvellement de l’AOP, appelée à remplacer progressivement l’AOC, l’un n’allant plus sans l’autre, ce qui passe par l’élaboration d’un nouveau cahier des charges plus exigeant pour l’ensemble des acteurs de la filière. Dominique Duquesnoy reconnaît que c’est l’Europe qui pousse à ces changements. Il explique que cela fait quatre ans que ce cahier des chargesest en chantier et que la copie devra être prête pour 2012, après avoir franchi toutes les étapes d’un long processus d’élaboration, de discussions, de modifications et de validation de propositions… “L’obtention de l’AOC – en 1976, je le précise – avait été précédée de 20 années de travail… Certains pourraient croire qu’il s’agit d’une simple question de notoriété mais l’appellation apporte une protection, car il fallait à l’époque vraiment protéger le fromage des copies. C’est aussi une reconnaissance aux conséquences économiques réelles pour les acteurs de la filière, comme l’accès aux réseaux de vente et à la grande distribution”, commente-t-il notamment. Le maroilles a des débouchés aussi auprès des transformateurs de l’agroalimentaire, traiteurs ou fabricants de plats préparés. Ce cahier des charges, explique-t-il, pour ne pas être retoqué, doit à la fois composer avec les exigences de l’INAO et avec les capacités réelles des acteurs du terrain, qu’ils soient producteurs de lait, producteurs du fromage, ou les deux en même temps. Une étape décisive au niveau européen doit être franchie mi- 2011. Début mai, Dominique Duquesnoy se disait confiant, en assurant qu’il mettrait un point d’honneur, en tant que président, à réussir cette opération.
Elaboration d’un nouveau cahier des charges. Le nouveau cahier des charges en préparation apporte des nouveautés pour la filière maroilles : les transformateurs et les producteurs doivent être fédérés afin que toutes les étapes de la vie du lait et du fromage soient bien concernées.
Dominique Duquesnoy estime que le nouveau document aura un autre effet : celui de protéger le bocage, ses haies et ses pâtures, puisqu’il fera expressément référence à l’identité géographique du territoire et même à des surfaces minimales en la matière. “Les rattachements à une zone géographique, à un terroir bien défini, à un patrimoine naturel sont des données essentielles.” En fait, résume-t-il, “on écrit ce qui ne l’était pas, avec des normes en plus, et le DVD que nous avons sorti permettra d’avoir tous le même discours et le même outil pédagogique vis-à-vis des élus et touristes”.
D’autres normes vont protéger et, d’une certaine manière, réglementer le savoir-faire, c’est-à-dire les étapes dans la fabrication et l’affinage du maroilles, jusqu’à la taille des moules et la forme carrée des fromages. Selon le président, seules les races de vache échapperaient aux nouvelles normes. Bien sûr, les mécanismes de certification, de contrôle et les procédures d’adhésion vont être davantage formalisées.