Le Boulonnais produit plus de 500 millions de crayons par an

Présent à Boulogne depuis 1959 et à Samer depuis 2000, Bic a décidé de réunir sur un même site toutes ses activités boulonnaises. D’ici 2020, la nouvelle usine de Samer rassemblera les 120 salariés qui y travaillent déjà et les 130 qui œuvrent à Boulogne. Elle a été inaugurée le 23 octobre par le directeur général délégué Gonzalve Bich, en présence du ministre de l’Action et des Comptes publics, Gérald Darmanin.

Le directeur Emmanuel Bathélémy a guidé le ministre Darmanin dans sa visite des installations.
Le directeur Emmanuel Bathélémy a guidé le ministre Darmanin dans sa visite des installations.

 

Dérogeant à sa tradition de discrétion, le groupe familial Bic a choisi de communiquer à l’occasion de cette inauguration. Ce qui a fait avouer au ministre invité, ancien maire de Tourcoing, qu’il ignorait que «le crayon (qu’il utilisait) à l’école de la République était fabriqué à quelques kilomètres de la plage où, enfant, (il venait) en vacances».

La décision de déménager l’unité jusque-là implantée en plein centre de Boulogne sur l’usine de Samer, distante d’à peine vingt kilomètres, répond à une logique industrielle d’optimisation du process de fabrication de ses instruments d’écriture. Trois bâtiments existaient déjà sur le site de Samer : ils abritaient l’unité de fabrication des mines du crayon Evolution et le service de R & D de Bic. En 2017, deux autres structures sont sorties du sol. La première (5 400 m²) abrite la confection du porte-mine Bic Matic, jusque-là assurée à Boulogne ; la seconde (6 600 m²), la logistique, la maintenance et le restaurant d’entreprise. Restera à construire en 2018 le troisième bâtiment destiné à héberger la fabrique des feutres et des encres ainsi que le conditionnement des différents produits.

De gauche à droite : Claude Bailly, maire de Samer, Claude Prudhomme, président de la Communauté de communes, le ministre Gérald Darmanin, le directeur Emmanuel Barthélémy, le directeur général Gonzalve Bich et le député Jean-Pierre Pont.

Au total, ce sont 18 000 m² de locaux qui sont en train de voir le jour à Samer, portant la surface du site à 29 500 m², ce qui représente un investissement de 13,5 millions d’euros. Ce projet ambitieux, dont le chantier a impliqué majoritairement des entreprises locales, a bénéficié du soutien actif de la Ville de Samer, de la communauté de communes Desvres-Samer et de la sous-préfecture de Boulogne.

Une attention particulière a été apportée à l’environnement : des panneaux solaires sont installés pour chauffer l’eau sanitaire, des panneaux photovoltaïques alimentent les éclairages des parkings, des bassins de récupération des eaux de pluie sont aménagés et l’électricité est privilégiée par rapport au gaz. Les certifications ISO 14 001 et 50 001 récompensent cette démarche positive.

 

Le centre mondial de la recherche Bic

Parallèlement, la fabrication boulonnaise des feutres et marqueurs Visacor et Décarolo, qui demandait moins de technicité, a été délocalisée en Tunisie. «Notre projet, explique le directeur, Emmanuel Barthélémy, vise à conserver ici, sur un site moderne, intégré et compétitif, les très grosses séries dont la production est tout à fait adaptée à la France et à envoyer en Tunisie les plus petites séries.» Le savoir-faire et l’innovation demeurent plus que jamais dans le Boulonnais. «Notre objectif, affirme Gonzalve Bich, est de faire de Samer le centre mondial de la recherche et du développement de Bic dans le domaine des produits graphites et de coloriage.»

 

Les salariés contrôlent la qualité des produits à la sortie des lignes automatisées.

Le crayon de bois et le porte-mine

Fidèle à son histoire, le pôle boulonnais reste spécialisé dans les moyens d’écriture. Il est équipé en machines, développées en interne, capables de produire 4,5 millions de crayons par jour et 1,4 milliard de mines fines chaque année. Mais Bic fabrique et diffuse aussi dans le monde entier des rasoirs et des briquets jetables, des bateaux et des téléphones avec carte de communication prépayée. Leur ADN commun ? Des objets simples, adaptables et accessibles. «Chaque jour, assure le petit-fils du baron Bich, plus de trente millions de consommateurs achètent un produit griffé à notre marque.» Soit 21 500 articles par minute ! Néanmoins, en 2017 encore, c’est la division des instruments d’écriture (en progression de 3%) qui tire le chiffre d’affaires du groupe : plus de deux milliards d’euros. L’inventeur du Bic Cristal en 1950 a vendu depuis, affirme-t-on, plus de cent milliards de ce stylo à bille, ce qui représenterait suffisamment d’encre pour tracer une ligne jusqu’à Pluton et en revenir plus de vingt fois. A Samer, on aime aussi les records célébrés par le groupe, resté familial, mais on les préfère lorsqu’ils sont «made in Boulogne».

 

Un nouveau record inscrit au Guinness Book

Ainsi, douze jours avant l’inauguration officielle de la nouvelle usine, quelque 133 salariés des sites de Boulogne et de Samer s’étaient réunis pour battre le record du monde du plus long crayon à mine graphite, à l’initiative de leur directeur, Emmanuel Barthélémy, qui en a offert un morceau au ministre Gérald Darmanin. Le crayon à papier Evolution, fabriqué avec de la résine de synthèse à la place du traditionnel bois, sorti ce jour-là mesurait plus d’un kilomètre : 1 091,99 mètres exactement, bien plus que le précédent record (établi en 2015 par le fabricant allemand Staedtler avec 450,97 mètres). Rien à voir avec le crayon classique de 18 centimètres de long et de six grammes que l’usine produit chaque année à 500 millions d’exemplaires !

Bic est l’une des marques les plus visibles et les plus reconnues dans le monde entier : numéro 2 mondial et leader européen pour les instruments d’écriture. Ses produits, diffusés dans plus de 160 pays, sont fabriqués au sein de 27 usines réparties sur les cinq continents par 17 500 salariés. Le ministre Gérald Darmanin a tenu à féliciter Gonzalve Bich pour son attachement au savoir-faire national : si 92% des produits Bic sont consommés à l’export, 50% de leur production est réalisée en France. La nouvelle usine est assurée de conserver une bonne mine !

Le directeur Emmanuel Bathélémy a guidé le ministre Darmanin dans sa visite des installations.

 

 

 

 

 

 

 

 

Phrase en gras et gros :

«Le nouveau site de Bic confirme l’ancrage historique du groupe dans la région qui a vu naître les premiers ateliers de Conté»

 

Encadré

Quelques chiffres

• 13 millions d’euros : l’investissement consenti par Bic pour regrouper ses deux entités boulonnaises sur le site de Samer.

• 250 salariés : l’effectif de Bic sur le Boulonnais (dont 130 encore à Boulogne).

• 500 millions : le nombre de crayons Evolution fabriqués chaque année dans le Pas-de-Calais.

 

 

ENCADRE

Le crayon de bois, une longue histoire boulonnaise

L’activité de production de moyens d’écriture (plumes et crayons) dans le Boulonnais remonte à 1846. La nouvelle usine Bic n’est autre que l’héritière des grandes manufactures du Boulonnais : Conté ou Baignol et Farjon. Le procédé de fabrication n’est d’ailleurs pas éloigné de celui inventé en 1794 par Nicolas-Jacques Conté, dont plusieurs rues du Boulonnais portent le nom. Conté est le véritable inventeur du crayon de bois. C’est lui qui a eu l’idée d’employer un mélange de graphite ordinaire et d’argile, cuit à haute température, pour produire des mines de qualité. Le processus de fabrication se prête bien à l’industrialisation, puisque la mine est protégée par deux demi-cylindres de bois. Enfin, en faisant varier la température ou la proportion des intrants, elle peut être plus ou moins grasse. Le crayon à papier moderne est inventé et Boulogne en devient la place forte. Après avoir racheté l’entreprise Gilbert & Blanzy-Poure, créatrice du fameux porte-mine Critérium en 1939, les producteurs de plumes Baignol et Farjon ainsi que la compagnie française qui produisait les célèbres plumes de la marque Sergent Major, l’entreprise Conté a été à son tour rachetée par Bic.

Aujourd’hui, la manufacture fabrique toujours des crayons, mais synthétiques. Evolution, lancé en 1993, est un crayon à papier sans bois qui se tord à volonté et dont la mine casse moins que les autres. Avec 500 millions d’exemplaires de crayons noirs ou de couleur produits dans le Boulonnais chaque année, Bic est le numéro un sur le marché de la mine graphite. La société fait recycler des chutes de pots de yaourt ou des isolants des réfrigérateurs en billes de plastique qui sont ensuite chauffées et transformées en pâte molle, la matière première de ce crayon moderne et populaire, vendu moins de trente centimes d’euro l’unité.