L’aéroport de Lille entre dans une nouvelle dimension

Une page se tourne pour l’aéroport de Lille : à partir du 1er janvier 2020, la nouvelle concession sera attribuée à Eiffage en partenariat avec l’aéroport Marseille-Provence. A la clé, 170 millions d’euros d’investissement sur 20 ans et le doublement de la surface de l’aérogare, pour mieux le connecter avec son territoire.

Le projet du cabinet d'architectes ENIA prévoit une refonte de l'aérogare, en se basant sur le bâtiment existant.
Le projet du cabinet d'architectes ENIA prévoit une refonte de l'aérogare, en se basant sur le bâtiment existant.

Marc Legrand, directeur d’Eiffage concessions, n’hésite pas à qualifier le moment d’«historique». Le 26 juillet dernier, date de la signature de la concession de service public de l’aéroport régional, est aussi le signe de l’entrée du groupe de travaux publics Eiffage dans les activités aéroportuaires. «C’est un événement que nous pouvons comparer à la réalisation du viaduc de Millau en 2001. L’aéroportuaire fait partie depuis peu, de notre stratégie. Notre première opportunité s’est portée sur Lille, mais nous n’allons pas y aller seul», détaille-t-il. C’est en effet avec Aéroport Marseille-Provence qu’Eiffage partagera la concession. Le groupe a des ambitions à la hauteur du développement qu’il souhaite donner à l’aéroport de Lille avec ses 2,5 millions de passagers. «L’enjeu de ce marché public avait plusieurs paramètres : assurer le développement de l’aéroport et être à la hauteur des intérêts publics grâce à un partenariat équilibré entre Eiffage et le propriétaire, le SMALIM (Syndicat mixte des aéroports de Lille et Merville)», poursuit Christophe Coulon, président du SMALIM. Alors que Lille occupe la 10e place au rang des aéroports de France et qu’Aéroport Marseille-Provence se hisse à la 6e place, Eiffage veut faire de Lille – géré et exploité depuis le 1er janvier 2009 par la Sogarel (Société de gestion de l’aéroport de la région de Lille), dont l’actionnariat est constitué de la CCI Hauts-de-France, Transdev et la SANEF – un établissement dans l’air du temps, ancré dans son territoire et dans le numérique.

L’espace restauration et commerces passera de 1 800 m2 à 3 000 m2. Crédit photo ENIA Architectes

90 millions d’investissement pour une aérogare flambant neuve

Pour cela, la superficie de l’aérogare doublera de taille d’ici 2023, passant de 18 000 m2 à 33 000 m2, pour un investissement de 90 millions d’euros. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que l’urgence pointe le bout de son nez : «Il va falloir commencer à travailler sur les travaux dès le mois de septembre, mais avec une parfaite continuité de l’exploitation», précise Marc Legrand. Le cabinet d’architectes parisien ENIA a déjà présenté une esquisse, peaufinée au fil des mois. D’ores et déjà, cela passera notamment par une nouvelle identité visuelle, mais surtout avec cette nouvelle aérogare construite devant l’actuelle entrée (avec la suppression de l’actuelle passerelle et du parking aérien), avec un parvis paysage multimodal, puisque l’objectif d’ici 2039 (date de la fin de la concession) est d’atteindre les 4 millions de passagers. «La problématique d’un aéroport est essentiellement celle de la gestion des flux : les navettes, les transports et les passagers. Nous allons proposer un parcours fluide avec la séparation des flux de départs et d’arrivées, des espaces plus grands et lumineux, et la création d’une véritable entrée, qui manque un peu aujourd’hui», détaille Brice Piechaczyk, associé au sein du cabinet ENIA (à Montreuil-sous-Bois). La rampe d’accès sera supprimée pour laisser place à une nouvelle entrée et un parking repensé, avec doublement du nombre de places. L’extension aura lieu exclusivement à l’ouest du bâtiment existant, avec un auvent pour unifier la nouvelle partie et l’ancienne. Côté commerces et restauration, une offre plus dense sera proposée, et le numérique sera aussi au cœur du parcours du passager, en s’appuyant sur les expériences d’Aéroport Marseille-Provence. Il serait par exemple possible d’envisager un parcours digital avec un système automatique de reconnaissance faciale pour le contrôle hors frontières et de développer les bornes d’enregistrement.

Plus de destinations en Europe

Les 170 millions d’euros consentis sur 20 ans par Eiffage et Aéroport Marseille-Provence seront aussi l’occasion de multiplier le nombre de destinations, plus précisément en Europe – avec dix nouvelles destinations d’ici 2029, notamment vers l’Angleterre et l’est de l’Europe –, mais aussi le renforcement des vols domestiques. Les transports collectifs devraient aussi être renforcés : actuellement seuls 5% des passagers les utilisent. «Nous nous fixons l’objectif d’atteindre les 17%, en travaillant sur la navette et des lignes de bus», détaille Christophe Coulon. D’une navette par heure, on devrait passer à une navette toutes les demi-heures, puis toutes les 20 minutes d’ici 2024. Quant à l’idée du tramway, désormais aux oubliettes, Christophe Coulon reste vague : «Le SDIT (Schéma directeur des infrastructures de transport) a été voté, mais il peut évoluer. Cela ne dépend pas que de nous, il faut penser à d’autres solutions que le tramway qui n’a pas l’assentiment de la MEL. Mais c’est encore trop tôt pour être précis.» Quant aux 115 salariés de la Sogarel, ils passeront, à partir du 1er janvier 2020, sous l’entité Eiffage. «Aucun salarié ne doit se faire du souci sur son emploi», a tenu à préciser le directeur d’Eiffage concessions. Les salariés actuels de l’aéroport viendront ainsi rejoindre les 6 000 collaborateurs que compte Eiffage sur les Hauts-de-France. Et 70 emplois supplémentaires devraient aussi s’égrener sur la durée de la concession, pour faire face à cette montée en puissance de l’aéroport.