La visite de Macron au Salon vire au chaos, avec des services dépassés
Jamais de mémoire de policiers et d'agriculteurs, le Salon de l'Agriculture n'avait vu, pour la venue d'un chef de l'Etat, CRS et gendarmes mobiles s'affronter avec des manifestants dans son...
Jamais de mémoire de policiers et d'agriculteurs, le Salon de l'Agriculture n'avait vu, pour la venue d'un chef de l'Etat, CRS et gendarmes mobiles s'affronter avec des manifestants dans son enceinte même, donnant l'image d'un immense chaos.
Le contexte de grande colère des agriculteurs laissait présager une visite compliquée samedi pour le président. Mais de là à imaginer des forces de l'ordre casquées et boucliers en main tentant de contenir des agriculteurs en colère, jamais.
"Jamais, je n'ai vu cela", a affirmé à l'AFP le secrétaire national Alliance des CRS et ancien responsable de groupes de sécurité du président et du Premier ministre, Johann Cavallero.
"Quand on en arrive là, c'est que la situation est hors de contrôle", estime cet ancien policier.
Manque d'anticipation
Et pourtant, a noté un connaisseur des visites de personnalités de haut rang au Salon, "ce n'était pas une surprise cette colère, exacerbée par l'invitation des Soulèvements de la terre au débat présidentiel". "Ce manque d'anticipation est incompréhensible".
D'habitude, les forces mobiles sont déployées autour de l'enceinte du Salon. "C'est le protocole pour le chef de l'Etat", c'est aussi le cas pour d'autres personnalités politiques comme le Premier ministre, a confirmé M. Cavallero.
Tout a dérapé peu après 8H00, alors qu'Emmanuel Macron était dans une salle au 1er étage du parc des expositions de la porte de Versailles avec des représentants syndicaux agricoles.
A ce moment-là, des agriculteurs de la FNSEA et de la Coordination rurale ont forcé les grilles d'entrée du salon. Grilles gardées par la sécurité privée du Salon, comme l'ont assuré à l'AFP M. Cavallero et deux sources policières. "Depuis plusieurs années, la responsabilité de la garde des grilles est confiée aux personnels de sécurité privée", a affirmé le responsable Alliance des CRS.
Quatre compagnies de CRS étaient mobilisées depuis 06H00 du matin aux abords du Parc des Expositions. Et deux autres sont venues en renfort dans la matinée. Il y avait aussi des compagnies de gendarmes mobiles. Deux forces qui ont l'habitude de travailler ensemble dans les opérations de maintien de l'ordre.
"Il y a eu un loupé avec le franchissement des barrières d'entrée. Après, un peu tout le monde a fait du maintien de l'ordre à l'intérieur. Et là s'est posé un problème de coordination entre les forces", analyse M. Cavallero.
Samedi, il y avait des policiers en civil de la préfecture de police de Paris, des policiers de la CRS 8 (l'unité spécialisée dans les opérations de lutte contre les violences urbaines et autres), des CRS, des gendarmes mobiles, des forces de l'ordre à cheval...
"Les CRS avaient interdiction d'utiliser des gaz lacrymogènes à cause des animaux", ont affirmé à l'AFP plusieurs membres des forces de l'ordre. Néanmoins, des agriculteurs ont fait état sur des chaines d'information de l'utilisation très brève de lacrymogène.
Paroxystique
Pendant plusieurs heures, de façon intermittente, il y a eu des agriculteurs poussant violemment les forces de l'ordre qui elles-mêmes les repoussaient vivement, au milieu d'animaux en panique.
"C'est de la poussette. On ne peut pas faire autre chose dans un milieu clos tel que le Salon", a expliqué le syndicaliste policier, ajoutant que si les policiers avaient mis leurs casques, c'était pour se protéger des divers projectiles jetés par les agriculteurs (mottes de terre, oeufs, etc..).
Jamais en outre une inauguration du Salon par un chef de l'Etat n'était intervenue plus de quatre heures après l'horaire prévu, avec le hall principal, celui des animaux, fermé au public à l'ouverture.
D'autres présidents ont dû affronter au Salon sifflets, huées et bousculades, comme Nicolas Sarkozy ou François Hollande. Mais l'intensité de ceux-ci étaient bien moindres.
Nicolas Sarkozy s'était emporté contre un visiteur qui avait refusé de lui serrer la main, en lui lançant un "casse-toi pauv'con" resté dans les mémoires. François Hollande avait été sifflé et hué. Jacques Chirac, lui, était comme un poisson dans l'eau dans cet univers.
"Samedi, la tension était à un niveau paroxystique", a résumé un habitué du Salon.
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