La reprise menacée par la guerre en Ukraine et la résurgence de la Covid

Dans ses prévisions économiques pour 2022, l’Insee s’efforce d’intégrer les grandes incertitudes que font peser la guerre en Ukraine et le regain des contaminations au Covid, en particulier en Chine, sur la situation des entreprises et des ménages en France.

Guerre en Ukraine, potentielle réelle reprise de l’épidémie de la Covid-19, tous les ingrédients sont là pour plomber le climat des affaires.
Guerre en Ukraine, potentielle réelle reprise de l’épidémie de la Covid-19, tous les ingrédients sont là pour plomber le climat des affaires.

Chef du département de la conjoncture de l’Insee, Julien Pouget a insisté, lors de la présentation de la note de conjoncture de mars 2022, sur «les très fortes incertitudes» qui pèsent sur les prévisions de croissance et d’inflation à l’échelle mondiale. Dans un contexte de reprise plutôt dynamique, le déclenchement de la guerre en Ukraine a en effet eu pour conséquence immédiate de faire grimper l’inflation. Au «choc sur les prix de l’énergie et de certaines matières premières» vient se greffer un «choc d’incertitude, qui peut avoir un impact sur l’investissement des entreprises et sur la consommation des ménages», a-t-il expliqué. Et la résurgence des cas de Covid en Chine «est de nature à attiser les difficultés d’approvisionnement de nos économies.»


Le climat des affaires et le moral des ménages à l’épreuve de la guerre

Les derniers résultats des enquêtes de conjoncture sur les entreprises et les ménages français collectés le 25 février, soit juste avant l’annonce des sanctions prises à l’encontre de la Russie, font apparaître une nette baisse des perspectives d’activité dans l’industrie manufacturière, le commerce de gros et de détail - le secteur des services est en revanche moins affecté -, ainsi qu’une chute significative de la confiance des ménages sur leur situation financière personnelle future. C’est pourquoi «on s’attend à une baisse assez nette du climat des affaires», a pointé l’économiste.


L’impact de la hausse des prix de l’énergie en France

L’Insee s’est notamment penchée sur l’impact de la guerre en Ukraine et de l’augmentation des prix de l’énergie (pétrole, gaz et charbon) sur l’économie française. Il en ressort que, si cette hausse se maintient au niveau de début mars et si on ne prend pas en compte le bouclier tarifaire mis en place par le gouvernement sur les tarifs réglementés du gaz et de l’électricité, «cela affecterait l’économie française à hauteur d’un peu moins d’un point de PIB en 2022», a précisé Olivier Simon, chef de la division synthèse conjoncturelle de l’Insee. Avec une dégradation de la balance commerciale de la France «parce que nos importations coûteraient plus cher, et que nos exportations seraient affectées par une demande moindre de la part de nos partenaires commerciaux.»


Une perspective de croissance du PIB de 0,3 %, au premier trimestre 2022

Entre la vague Omicron en janvier, la levée progressive des restrictions sanitaires en février et la guerre en Ukraine en mars, les prévisions de croissance du PIB pour le premier trimestre 2022 doivent intégrer des périodes très contrastées. Et même si le mois de mars demeure très incertain, l’Insee maintient une perspective de croissance du PIB de 0,3 % pour le premier trimestre en France, et de 2,7 % pour l’année, si l’activité se maintient au niveau de ce premier trimestre.


Un taux de chômage qui devrait se maintenir à un niveau bas

Du côté de l’emploi, le taux de chômage, qui a enregistré une forte baisse fin 2021, devrait se stabiliser à un niveau bas de 7,4 % de la population active au premier trimestre 2022. La forte hausse de l’emploi salarié observée au dernier trimestre 2021, en raison du recours à l’intérim pour pallier les arrêts maladies liés au Covid, devrait connaître un net ralentissement sur les trois premiers mois de 2022, en raison de l’amélioration de la situation sanitaire. Et il faut s’attendre à une dynamique similaire pour l’emploi non salarié.


Un taux d’inflation qui avoisine les 4 %, en mars

En raison de la hausse des prix de l’énergie, l’inflation pourrait dépasser 4 % en mars - sans le bouclier tarifaire sur les tarifs réglementés du gaz et de l’électricité mis en place en février, elle aurait pu atteindre 5 % - et se situer autour de 4,5 % au deuxième trimestre. Mais il est toutefois très difficile d’établir des prévisions sur l’évolution des prix à la consommation dans le contexte actuel de très forte volatilité des prix de l’énergie.


Un recul de 0,5 % du pouvoir d’achat

Enfin, l’Insee prévoit une stabilité des revenus des ménages ce premier trimestre et un recul de 0,5 % du pouvoir d’achat, en raison de la hausse de l’inflation. La consommation des ménages devrait fléchir au premier trimestre, et le taux d’épargne, qui avait atteint des niveaux particulièrement élevés en 2020 et 2021, diminuer sur la période, en raison de la baisse du pouvoir d’achat.

Miren LARTIGUE